CAN 2025 : tournant décisif pour le football africain
La Coupe d’Afrique des Nations a officiellement débuté au Maroc ce dimanche 21 décembre 2025. À partir de 2028, la Coupe d’Afrique des Nations se jouera tous les quatre ans.
Une compétition longtemps sous-estimée
Le dimanche 21 décembre 2025, la Coupe d’Afrique des Nations a officiellement été lancée au Maroc. Cette date est exceptionnelle. Cette édition représente un tournant pour le football africain sur les plans sportif, économique, politique et symbolique.
Depuis sa création en 1957, la CAN a souvent été perçue comme distante, souvent caricaturée et parfois dévalorisée : jugée trop désorganisée, trop imprévisible et gênante pour les calendriers européens. Cependant, en décembre 2025, la situation a largement changé. Le football africain n’est plus marginalisé : il est devenu central. Les joueurs africains dominent les plus grands clubs européens, les audiences explosent aussi bien sur le continent qu’au sein de la diaspora, et la CAN est désormais suivie dans plus de 170 pays.
Le Maroc, vitrine d’un football africain structuré
Cette édition au Maroc survient à un moment crucial. Demi-finaliste historique de la Coupe du monde 2022, le Maroc s’est affirmé ces dernières années comme l’un des pays les plus organisés du continent en matière de football. Avec des infrastructures modernes, des stades conformes aux normes FIFA, un réseau de transports efficace et une organisation rigoureuse, tout est conçu pour faire de cette CAN une vitrine.
Le centre Mohammed VI, le Clairefontaine marocain, est le symbole de cette ambition à long terme : former, structurer, professionnaliser. Accueillir la CAN n’est donc pas un hasard, mais l’aboutissement d’un projet mûri sur plusieurs années, conçu comme un levier de rayonnement sportif et international en vue de la Coupe du monde 2030.
Une CAN tous les 4 ans, un nouveau cycle
La CAN 2025 est historique pour une autre raison majeure : elle annonce le début d’un nouveau cycle. À partir de 2028, la Coupe d’Afrique des Nations se jouera tous les quatre ans. Ce changement stratégique est porteur de sens et soulève des controverses.
Durant longtemps, la fréquence bisannuelle de la CAN a été critiquée, en particulier par les observateurs européens, qui la considéraient trop intrusive dans le calendrier des clubs. En adoptant un rythme quadriennal, la CAF envoie un message clair : la CAN s’aligne sur les standards des grandes compétitions continentales comme l’Euro ou la Copa América, tout en cherchant à en renforcer la rareté, la valeur et le prestige.
Pour les partisans de cette décision, elle représente également une forme de maturité institutionnelle. Moins de CAN, mais des éditions plus fortes, mieux préparées et plus structurant pour les pays d’accueil. Cela permet d’anticiper les investissements, de consolider les infrastructures durables et d’ériger le tournoi au statut d’événement exceptionnel, attendu et respecté.
Une réforme qui divise
Cependant, les critiques sont nombreuses et parfois très vives. Pour certains observateurs, cette réforme semble être une perte d’identité. La CAN, événement populaire, accessible et fréquent, offrait à de nombreuses sélections l’opportunité de progresser, de se reconstruire rapidement après un échec et de fournir une vitrine régulière aux talents du continent. Espacer les éditions réduit de telles possibilités.
Amir Abdou, sélectionneur des Comores, décrit même cette décision comme’une grande perte pour le continent », soulignant que la CAN risque de perdre son attrait et son rôle de tremplin pour les joueurs africains.
Une autre préoccupation concerne le calendrier. En se plaçant définitivement sur un cycle de quatre ans, la CAN se retrouve mécaniquement dans le même cadre temporel que l’Euro et la Copa América. Dans un paysage médiatique déjà saturé, certains craignent que la compétition africaine ne soit reléguée au second plan, noyée dans l’agenda footballistique mondial face à des tournois historiquement mieux établis.
Un enjeu économique et structurel majeur
Les préoccupations financières alimentent aussi les inquiétudes. Actuellement, la CAN représente la principale source de revenus pour la CAF et pour de nombreuses fédérations africaines. Diminuer la fréquence du tournoi risque de fragiliser un équilibre économique déjà sensible.
Contrairement à l’Europe, où les clubs tirent leurs ressources de compétitions annuelles telles que la Ligue des champions, le football africain dépend en grande partie de ses compétitions nationales. Diminuer la fréquence de la CAN sans garanties solides constitue donc un pari risqué.
Pour soutenir cette réforme, la CAF promet l’établissement d’une Ligue des nations africaine, conçue pour maintenir un rythme compétitif et proposer des affiches attrayantes. Sur le papier, cette idée séduit. Sur le terrain, elle suscite des doutes : plusieurs pays ne disposent toujours pas de stades homologués, et l’engouement populaire demeure un élément essentiel du développement du football africain.
Un avenir à construire
Au-delà des chiffres et des stratégies, cette édition soulève une question plus profonde : celle du regard porté sur le football africain. Longtemps, la CAN a été critiquée. Aujourd’hui, elle s’établit. Les critiques logistiques persistent, les attentes sont immenses, mais le rapport de force a évolué. La CAN n’est plus un tournoi que l’on subit : c’est un événement que l’on observe, que l’on analyse, que l’on respecte.
La CAN 2025 ne résoudra pas tout en un mois. Mais elle peut marquer un tournant. Celui d’un football africain qui n’est plus seulement un réservoir de talents pour l’Europe, mais un écosystème capable d’organiser, de raconter, de structurer et de projeter sa propre vision du jeu. Ce 21 décembre, ce n’est pas simplement une compétition qui a été lancée. C’est une nouvelle ère qui s’ouvre.

