Macron critiqué, Le Pen saluée : extraits du livre de Sarkozy.
L’ancien président Nicolas Sarkozy publie ce mercredi Le Journal d’un prisonnier (Fayard), un livre consacré à ses 20 jours de détention à la prison de la Santé à Paris. Nicolás Sarkozy écrit que sa condamnation n’a « ni logique ni cohérence » et qu’elle relève de « l’injustice » et est qualifiée de « dérive judiciaire ».
L’ancien président Nicolas Sarkozy publie ce mercredi *Le Journal d’un prisonnier* (Fayard), un ouvrage dédié à ses 20 jours de détention à la prison de la Santé à Paris. Ce livre paraît après sa condamnation à cinq ans de prison dans l’affaire des soupçons de financements libyens de sa campagne de 2007, avec mandat de dépôt différé et exécution provisoire. Que peut-on retenir de cet ouvrage de l’ancien chef d’État ? *20 Minutes l’a* lu pour vous et met en lumière cinq épisodes marquants de ce journal.
### Le quotidien presque ordinaire d’un détenu extraordinaire
Sous le numéro d’écrou 320535, l’ancien président (2007-2012) devenu prisonnier relate des anecdotes, décrivant avec précision la « cellule numéro 11 » de « douze mètres carrés » où il entre le 21 octobre, en soulignant le matelas « au poids étonnant » et si « dur » qu’« une table aurait presque été plus souple ». Le lecteur découvre que son alimentation se compose de « laits, de barres de céréales, d’eau minérale, de jus de pommes et de quelques douceurs sucrées », car les plats servis dans des « petites barquettes en plastique qui sentaient si fort (lui) soulevaient le cœur ».
La « monotonie » de la vie « grise » de la prison, toujours bruyante, est interrompue par les visites de sa famille, de ses avocats, du directeur de la prison, de l’aumônier et même du garde des Sceaux, Gérald Darmanin. Ses moments d’« évasion » se trouvent dans l’écriture mais aussi dans son activité physique quotidienne, seul, dans la salle de sport de l’établissement pénitentiaire, avec « un rameur, un vélo, un tapis de course ». Quant à la prière, si elle « fut la première expérience positive de (sa) vie de prisonnier », l’ancien président évoque le « match du PSG diffusé sur Canal+ en direct de Leverkusen en Allemagne » lors de sa première soirée d’incarcération comme un « miracle ».
### Possible alliance avec l’extrême droite aux élections
Dans son journal, Nicolas Sarkozy rapporte une conversation avec Marine Le Pen, cheffe de file du Rassemblement national (RN), qui lui demande s’il envisagerait de s’unir à un éventuel « front républicain » contre le RN lors de prochaines élections. La réponse de l’ancien chef d’État, qui, en 2017 et 2022, avait publiquement appelé à voter pour Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle face à Marine Le Pen, est claire : « Ma réponse fut sans ambiguïté : « Non, et de surcroît je l’assumerai en prenant le moment venu une position publique sur le sujet » ». Il précise que « le chemin de reconstruction (de la droite) peut être long, mais je suis certain qu’il ne pourra passer que par l’esprit de rassemblement le plus large possible, sans exclusive et sans anathème ». À propos du Rassemblement national, l’ancien président ajoute que l’« exclure du champ républicain serait une erreur et un contresens ».
### Les bons et les mauvais points à sa famille politique
Dans cet ouvrage de 213 pages, Nicolas Sarkozy revient fréquemment sur ses amis et ses ennemis en politique, déplorant le manque de soutien de sa famille politique. L’ancien Premier ministre Michel Barnier est l’un des rares à recevoir des éloges, car il est « le seul dirigeant de (sa) famille politique qui a demandé à venir (le) visiter en prison », tout comme Henri Guaino, son ancien conseiller à l’Élysée, qui l’a « beaucoup aidé ». Nicolas Sarkozy critique aussi, à l’inverse, Bruno Retailleau, actuel président du parti Les Républicains : « (il) m’appela régulièrement, mais n’en fit publiquement pas davantage. Laurent Wauquiez (président du groupe parlementaire Droite républicaine à l’Assemblée nationale) se manifesta aussi, mais ses prises de position publiques furent prudentes et moins tranchées que celles de Gérard Larcher (président du Sénat), qui osa affirmer que l’exécution provisoire posait un problème ».
### La distance prise avec Emmanuel Macron
Nicolas Sarkozy, qui a soutenu Emmanuel Macron avant de s’en éloigner, évoque plusieurs échanges avec son successeur à l’Élysée avant son incarcération : « Je n’avais rien à lui dire et n’avais guère envie d’une discussion amicale avec lui ». Sa critique devient acerbe lorsqu’il aborde le retrait de sa Légion d’honneur suite à sa condamnation à de la prison ferme dans l’affaire des écoutes : « La faute était aggravée, du moins à mes yeux, par le fait qu’à aucun moment Emmanuel Macron ne m’avait appelé pour m’en informer. S’il m’avait téléphoné pour s’expliquer, j’aurais compris ses arguments et accepté sa décision. En ne le faisant pas, il confirmait une démarche que j’imaginais au minimum insincère ». Nicolas Sarkozy précise que « quelques mois plus tard », Emmanuel Macron s’est « excusé avec un réel fair-play, confessant avoir « mal géré les choses » […] J’ai écouté sans être parfaitement convaincu, tant cette posture était à l’exact opposé de mon caractère qui me pousse à toujours préférer assumer et faire face. J’avais décidé, en conséquence, de tourner la page de notre amitié sans pour autant entrer dans une opposition systématique à sa politique comme à sa personne ».
### Des magistrats en accusation
La relation avec les magistrats est qualifiée d’acrimonieuse à plusieurs moments du récit de Nicolas Sarkozy. L’ancien président critique « les excès » du Syndicat de la magistrature et la froideur de la présidente du tribunal, Nathalie Gavarino, jamais nommée. L’ancien chef d’État s’attarde sur sa condamnation, qu’il considère comme n’ayant « ni logique ni cohérence ». Selon lui, celle-ci est une « injustice » et constitue une « dérive judiciaire ». Elle est décrite comme « un scandale judiciaire sans précédent » et « une comédie ». La décision de la détention provisoire est qualifiée de « brutalité inouïe ». « On ne m’empêchera pas de penser que l’on est bien loin du respect dû à tout justiciable qui a le droit d’être jugé pour ce qu’il a fait, non pour ce qu’il est », écrit l’ex-président, confirmant qu’il œuvre pour une « réhabilitation complète ».

