Maroc

La justice dit non à la marchandisation de l’enseignement supérieur.

Le jugement rendu par le tribunal administratif d’Oujda, le mercredi 3 décembre, a ordonné la suspension immédiate de la décision de l’Université Mohammed 1er d’imposer des frais d’inscription au cycle doctoral pour les salariés, les fonctionnaires et les employés. Plusieurs étudiants, notamment à Martil, saluent un jugement qui renforce leur position, celle d’un refus ferme des frais imposés et d’un engagement renouvelé à défendre le caractère gratuit de l’inscription doctorale.


Dans les salles d’audience où se dessine l’avenir des droits fondamentaux des Marocains, le jugement prononcé par le tribunal administratif d’Oujda, le mercredi 3 décembre dernier, résonne comme un avertissement fort. Il rappelle que l’enseignement supérieur n’est ni une faveur éphémère ni un privilège réservé à ceux qui ont les moyens de payer. C’est un droit constitutionnel, ancré dans la conscience collective et garanti par la loi. En ordonnant la suspension immédiate de la décision de l’Université Mohammed 1er de demander des frais d’inscription au cycle doctoral pour les salariés, les fonctionnaires et les employés, la justice établit une distinction claire entre la gestion administrative et l’essence même de l’égalité sociale.

Cette décision, fondée sur une argumentation juridique précise, ne se limite pas à corriger une dérive administrative. Elle remet en perspective un contexte où certains établissements ont commencé à explorer les limites du silence législatif, cherchant à imposer des charges financières sans base légale. La cour a fermement rappelé que l’administration, quelle qu’elle soit, doit respecter la légalité. Aucune urgence budgétaire ou interprétation aléatoire du cadre réglementaire ne peut justifier l’instauration de frais contraires aux obligations constitutionnelles. En suspendant l’exécution de la décision contestée avec effet immédiat, le tribunal souligne que la loi n’attend pas et que la protection des droits ne peut être différée.

Au cœur de la motivation judiciaire se trouve un principe simple : le droit à l’enseignement. Le droit à l’égalité des chances. Le droit à une ascension sociale qui ne repose pas sur des critères financiers, mais sur la volonté, la compétence et l’effort. En se référant explicitement à la Constitution et à la section où le droit à un enseignement moderne, accessible et de qualité est qualifié d’obligation nationale, cette décision judiciaire remet le débat dans son cadre légitime. Celui d’un état qui s’est engagé à assurer l’accès universel au savoir.

Ce jugement ne surgit pas dans un vide politique ou social. Il apparaît au sein d’une tempête nationale où plusieurs universités ont tenté d’imposer des frais de doctorat aux étudiants salariés, entraînant un mouvement de protestation intense, surtout dans le nord du pays. À l’Université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan, les étudiants avaient déjà sonné l’alarme. Ils dénonçaient des pratiques qu’ils considéraient comme illégales, soulignant l’incompatibilité de ces frais avec les orientations royales, la philosophie de la loi cadre 51.18 et les dispositions constitutionnelles protégeant l’égalité et l’absence de discrimination.

Les manifestants avaient également mis en avant un autre aspect : l’effet rétroactif de ces décisions. Alors que des dossiers avaient été soumis et acceptés via les plateformes officielles, la décision de facturer les inscriptions est survenue sans préavis, mettant en lumière une gestion administrative confuse, improvisée et déconnectée des préoccupations réelles des étudiants qui essaient, souvent en travaillant, de suivre un projet doctoral exigeant. Leur indignation exprimait un profond malaise face à ce qui apparaissait comme une menace inquiétante à l’accès à l’enseignement supérieur.

Dans ce contexte tendu, le jugement du tribunal administratif d’Oujda se présente comme une boussole. Il guide vers un état de droit qui ne tolère ni précipitation ni arbitraire. Il offre aux étudiants concernés, souvent parents, parfois engagés professionnellement et porteurs de projets de recherche sérieux, la possibilité de poursuivre leur parcours sans que des obstacles financiers injustifiés ne viennent compromettre leurs ambitions.

Le soulagement dont ont témoigné de nombreux étudiants à la sortie du jugement n’est pas seulement individuel. Il est politique, social et symbolique. Il atteste que la vigilance judiciaire demeure un rempart essentiel à un moment où les pressions budgétaires pourraient inciter certains établissements à explorer des solutions simplistes, au risque de nuire aux valeurs fondamentales du pays.

De nombreux étudiants, notamment à Martil, saluent un jugement qui renforce leur position, celle d’un rejet ferme des frais imposés et d’un engagement renouvelé à défendre la gratuité de l’inscription doctorale. Ils exigent désormais un retrait clair et définitif des mesures contestées et affirment leur détermination à poursuivre la lutte, que ce soit par voie juridique ou par une mobilisation collective.

Cette affaire transcende la simple question d’un frais d’inscription. Elle ouvre un débat national sur la vision que nous souhaitons pour l’enseignement supérieur au Maroc de demain. Un enseignement ouvert, inclusif, accessible à tous sans distinction sociale. Un enseignement qui ne deviendra jamais un produit marchand soumis aux aléas des stratégies financières. Un enseignement porteur de la promesse d’une société plus juste et plus en accord avec les principes inscrits dans la Constitution.

En rendant ce jugement, le tribunal administratif d’Oujda a rappelé une vérité fondamentale : l’éducation n’est pas un luxe. Elle constitue la colonne vertébrale du Royaume et l’un des rares biens qui enrichissent la nation, même lorsqu’ils sont gratuits. Toute tentative de restreindre cet accès rencontrera, tôt ou tard, la résistance d’une société attachée à sa dignité et la rigueur d’un pouvoir judiciaire vigilant.

Au-delà des débats techniques, cette décision représente une victoire du droit sur l’arbitraire. Une victoire de la raison contre l’improvisation. Une victoire des valeurs contre les calculs. Elle constitue un moment marquant pour des milliers d’étudiants et un message clair adressé à toutes les institutions du pays. L’enseignement supérieur ne deviendra pas un laboratoire tarifaire et la justice restera présente chaque fois que l’un des droits essentiels des Marocains sera mise en danger.

Dans un Maroc qui aspire à l’équité, cette décision représente un engagement renouvelé à défendre la dignité académique et sociale de chaque citoyen. C’est également une preuve que l’opposition ittihadie, exigeante et responsable, a eu raison de tirer la sonnette d’alarme dès les premiers signes de dérive. Le débat continue, mais une chose est sure : avec ce jugement, l’idée d’un enseignement payant pour les doctorants salariés a subi un coup sévère. Et c’est la démocratie, une fois de plus, qui en sort renforcée.

**Adam Ali**