Les organes des Français envoyés en Israël : pas une loi de Simone Veil.
La loi Veil, qui légalise l’interruption volontaire de grossesse (IVG), a été promulguée en France en janvier 1975. Un accord entre la France et Israël pour coopérer dans le domaine de la santé est entré en vigueur en juin 1993.
Il y a cinquante ans, en janvier 1975, la loi Veil, qui légalise l’interruption volontaire de grossesse (IVG), a été promulguée en France. Ce texte historique a été porté et défendu par Simone Veil, alors ministre de la Santé. « Mais à côté, il y a singerie sur singerie », déclare « Sofixne__ », un streamer actif sur Twitch, dans une vidéo publiée sur son compte TikTok, qui a été vue plus de 170.000 fois. Il poursuit en affirmant que « les organes des Français sont donnés gratuitement à Israël » à cause d’une loi que Simone Veil aurait fait « passer en 1972 ». Il précise qu’elle était « ministre de la santé en France, sous Giscard d’Estaing ».
Selon cet internaute, cette loi serait « encore applicable aujourd’hui ». Il ajoute, « À cause de cette loi de merde, nos corps, parfois même sans notre accord, sont prélevés et envoyés à Israël ». Il conclut en affirmant que Simone Veil, avec cette loi, « a servi le lobbyisme […] israélien plus qu’elle n’a servi la France, alors qu’elle était ministre de la Santé ».
En réalité, cette affirmation, empreinte d’antisémitisme, est fausse et fabriquée. Bien qu’elle contienne des éléments factuels, ceux-ci ne sont pas liés entre eux.
**FAKE OFF**
Simone Veil a bien été ministre de la Santé à deux reprises : de mai 1974 à juillet 1979 sous Valéry Giscard d’Estaing, puis de mars 1993 à mai 1995 sous François Mitterrand. Toutefois, elle n’était pas ministre en 1972, comme le prétend l’internaute. Cette année-là, elle siégeait au conseil d’administration de l’Office de radiotélévision française (ORTF), comme l’indique Jocelyne Sauvard, autrice de la biographie « Simone Veil : la force de la conviction ».
Lors de ses mandats, la question du prélèvement et de la greffe d’organes a été abordée plusieurs fois. Un seul texte de loi portant sur ce sujet émane de Simone Veil, en tant que ministre de la Santé et membre du gouvernement. En novembre 1993, sur proposition du gouvernement, l’Assemblée a adopté un article additionnel dans le projet de loi relatif à la santé publique et à la protection sociale, qui autorise certains « établissements de santé […] à importer » et « exporter » des organes « hors du territoire douanier ». Cet article, présent dans la version finale de la loi, ne sera plus en vigueur deux ans plus tard.
À partir du 3 décembre 2025, l’importation et l’exportation d’organes hors du territoire sont régies par un décret de février 2000, stipulant que ces opérations ne sont autorisées qu’à « des fins scientifiques ». Selon le Code de la santé publique, le prélèvement d’organes sur une personne décédée est réalisé « qu’à des fins thérapeutiques ou scientifiques ». Un tel prélèvement peut être effectué sur une personne majeure, à condition qu’elle n’ait pas exprimé son refus de son vivant.
**Un accord franco-israélien dans le domaine de la santé**
Restons en 1993, lors du second mandat de Simone Veil au ministère de la Santé. Un accord entre la France et Israël, visant à coopérer « dans le domaine de la santé, de la médecine et des hôpitaux », est entré en vigueur en juin 1993 et est toujours en vigueur aujourd’hui, selon le site LégiFrance.
Cependant, Simone Veil n’a rien à voir avec cet accord, consigné au Journal officiel du 30 octobre 1993, car il a été signé en novembre 1992, alors qu’elle était députée européenne, par le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Roland Dumas. Cet accord permet l’échange d’informations entre les deux pays et leurs hôpitaux, notamment sur « la formation des médecins et des personnels paramédicaux », « les équipements » et les « avancées technologiques ». Les termes « organes » et « prélèvements » n’y figurent à aucun moment.

