Le café, ingrédient tendance, éclabousse la cuisine des chefs.
Le café est devenu un ingrédient à part entière dans la cuisine, utilisé par des chefs comme Juan Arbelaez et Mikhailovitch Shakine pour rehausser les plats salés. Des techniques variées, comme l’infusion à froid présente en Asie, permettent de libérer des saveurs uniques du café, associées à différents ingrédients selon les cultures.

Lorsqu’on évoque le café, chacun a une image en tête. Ce carburant matinal, souvent associé à l’incontournable : « il ne faut pas me parler tant que je n’ai pas bu mon café ». Les pauses devant la machine à café au bureau sont également emblématiques, tout comme les coffee shops au design soigné qui se multiplient en France. Dans le domaine culinaire, le café est surtout présent dans les desserts : les amateurs de tiramisu ne diront pas le contraire.
Or, le café s’invite désormais en dehors de la tasse. Il devient un ingrédient véritable, exploité comme une épice, une infusion ou une croûte aromatique. Plusieurs chefs, ainsi que The Fork, confirment cette tendance : « Le café, c’est un univers organoleptique bien plus vaste que ce qu’on nous a servi pendant des années », souligne le chef Juan Arbelaez. Dans les menus des restaurants, l’amertume, longtemps redoutée, devient un espace d’expérimentation, un contrepoint, permettant de rehausser les plats salés.
Le café, un ingrédient qui ne doit pas intimider le salé
Pour Juan Arbelaez, le café n’est pas un terrain inconnu ; il fait partie de son héritage colombien. « Le café, c’est comme une baie aromatique : ça va avec tout, comme le poivre », déclare-t-il, précisant que la difficulté réside non pas dans le produit, mais dans le dosage : « En France, on a toujours un peu peur de l’amertume », ajoute-t-il. Le chef n’hésite pas à suggérer une recette à base de café dans son restaurant Bazurto à Paris.
« C’est un ingrédient qui a du caractère. On assiste à l’émergence du café comme un véritable ingrédient, presque une épice contemporaine. Les gens recherchent des saveurs profondes, amères et élégantes », expliquent Shirley et Mathieu, les créateurs du compte Instagram The Social Food. Cette vision est également partagée par Mikhailovitch Shakine, chef au restaurant Dame, où l’un des plats emblématiques depuis l’ouverture est une échine de cochon du Tarn frottée au café fraîchement moulu et aux épices cajun. « Le café, c’est en réalité très doux quand on le travaille bien », raconte-t-il.
Une tendance déjà présente à l’international
Dans d’autres régions du monde, le café est utilisé dans la cuisine salée depuis longtemps. Une méthode notamment observée en Asie : à Singapour, par exemple, le porc au café est une spécialité prisée. « Dans les pays asiatiques, ils exploitent le café par infusion à froid ou par d’autres techniques qui libèrent les matières grasses du grain », explique Mikhailovitch Shakine. « Cela confère un goût presque cacaoté et ouvre des possibilités d’associations que l’on n’imagine pas en Occident ». Les créateurs de The Social Food partagent cet avis : « Chaque pays a sa manière de faire du café un geste social : le café filtre japonais, le café vietnamien, les cafés arabes… Ces rituels enrichissent notre manière de cuisiner. »
Le café figure également dans les créations du chef Gordon Ramsay, animateur de « Cauchemar en cuisine ». « C’est un grand classique américain. La spécialité de Gordon Ramsay, c’était le steak grillé au café », explique le chef de Dame. Pour le chef colombien, c’est à l’international que l’on peut appréhender la véritable diversité du café : « Nous avons grandi avec des cafés non brûlés, pas forcément amers. Certains présentent des notes de fruits de la passion, d’autres des touches fermentaires similaires à celles du kombucha. On oublie souvent que le café est avant tout un produit culturel avant de devenir une boisson », rappelle-t-il.
Comment intégrer le café dans nos plats ?
Une question demeure : comment intégrer le café à la maison ? Selon Juan Arbelaez, la réponse se résume en un mot : dosage. « Le café, c’est comme une baie aromatique. Comme le poivre : ça fonctionne avec tout. Mais il faut apprendre à le doser », insiste-t-il. L’un des usages les plus accessibles, et également l’un des plus surprenants, consiste à enrober une viande dans du café moulu, comme une croûte. « Ensuite, on déglace, on prépare une sauce, et le café apporte cette note amère-salée qui équilibre l’ensemble. C’est exceptionnel », détaille-t-il. Mikhailovitch Shakine partage cette opinion. Pour son échine de cochon du Tarn : « Je laisse la viande une nuit dans un mélange de café, sauce cajun et herbes. Ce n’est pas du tout amer, c’est même très doux », précise-t-il. Il souligne également que le café peut être utilisé comme finition : « Sur un velouté de topinambour, moulu à la minute, cela produit un contraste sucré-amère très subtil. »
Pour les néophytes ? Les deux chefs s’accordent à dire qu’il n’est pas nécessaire de se compliquer la vie. « Un légume rôti, un poisson grillé, une volaille crémeuse… Un peu de café râpé et cela change tout », sourit Juan Arbelaez. Pour ceux qui préfèrent commencer en douceur, il reste l’huile d’olive infusée au café, conçue par The Social Food pour Maison Nespresso. Une façon simple et sensorielle d’ajouter cette note chaude et légèrement amère, « parfaite sur des légumes grillés ou une burrata », assurent Shirley et Mathieu. Le café ne s’est peut-être jamais aussi bien exprimé qu’en sortant de la tasse.

