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Niger : Fin de l’ère française sur l’uranium nigérien.

En 2024, la croissance économique de l’Afrique subsaharienne est de 4 %, tandis que le commerce avec la France a reculé de 0,4 % sur un an. En 2023, après le coup d’Etat, le Niger ne livre plus d’uranium à la France et a nationalisé la Somaïr, détenue à 63,4 % par Orano.


Année après année, l’influence de la France diminue en Afrique. Alors que la croissance économique de l’Afrique subsaharienne était à 4 % en 2024, le commerce avec la France a enregistré une baisse de 0,4 % sur un an, selon le ministère de l’Économie. Cet héritage colonial, qui a longtemps soutenu l’économie et l’énergie françaises, s’effrite à cause des nationalismes locaux, de la diversification des marchés africains et de l’instabilité politique.

Dimanche soir, le Niger a annoncé qu’il mettrait l’uranium produit par la Somaïr, une filiale d’Orano (ex-Areva), sur le marché international. Depuis le coup d’État de 2023, le pays ne livre plus d’uranium à la France, symbolisant ainsi le recul de l’influence française sur le continent africain. Pourquoi l’uranium du Niger est-il si crucial pour la France ? Quelles raisons ont conduit Niamey à se tourner vers d’autres partenaires ? Éléments de réponse.

Pourquoi l’uranium du Niger est-il si important pour la France ? L’énergie nucléaire est la principale source d’électricité en France, et l’uranium constitue une ressource essentielle pour la souveraineté énergétique du pays. Le Niger possède plusieurs gisements, notamment celui d’Imourarent, avec des réserves estimées à 200 000 tonnes. Avant la prise de pouvoir de la junte militaire, l’uranium importé du Niger couvrait de 10 à 15 % des besoins français, d’après Jeune Afrique.

Pourquoi Niamey a-t-il tourné le dos à la France ? En 2023, suite au coup d’État, la junte militaire dirigée par Abdourahamane Tchiani a rompu ses liens avec l’ancienne puissance coloniale française, plaçant sa souveraineté comme une priorité, en particulier en matière d’uranium.

Sur le terrain, la Somaïr, détenue à 63,4 % par Orano et à 36,6 % par l’État du Niger, a été nationalisée en juin dernier. Paris a perdu le contrôle opérationnel de cette filiale et peine à changer la situation, même après avoir engagé des recours devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements. Depuis, le gouvernement français s’est tourné vers le Kazakhstan, qui fournit environ 43 % de la production mondiale à des prix compétitifs, ainsi que vers l’Australie, plus coûteuse.

« Ce gouvernement [français] en désarroi cherche à nous entraîner dans des procès interminables pour arrêter l’exploitation et la vente de notre minerai », a accusé fin septembre le Premier ministre nigérien Ali Mahaman Lamine Zeine, lors de l’Assemblée générale de l’ONU. « En un demi-siècle d’exploitation, l’uranium n’a apporté aux Nigériens que misère, pollution, rébellion, corruption, désolation et aux Français, prospérité et puissance », a-t-il déclaré, illustrant les tensions postcoloniales.

Quels acteurs sont en jeu ? Bien qu’il soit difficile de répondre, un mystérieux convoi d’uranium a suscité de nombreuses spéculations en novembre 2025. Environ 1 000 tonnes de « yellow cake », de l’uranium concentré mais non enrichi, auraient été transportées par des camions sous le contrôle de groupes djihadistes. Beaucoup d’experts évoquent une implication russe. La France a même affirmé être convaincue que le géant du nucléaire russe Rosatom avait conclu un accord de 147 millions d’euros.

Les relations entre la Russie et le Niger se renforcent alors que la France recule dans le pays. En juillet, le ministre russe de l’Énergie, Sergueï Tsiviliov, s’est rendu à Niamey pour discuter avec le général Abdourahamane Tchiani de la coopération économique entre les deux pays. « Notre but principal est d’exploiter l’uranium ainsi que de créer un système complet pour son exploitation », a déclaré le ministre à la suite de sa visite, promettant ainsi de remplacer la présence française.