Tunisie

Céréales 2025-2026 : Le manque de semences ne brise pas le silence !

La saison céréalière ne se déroule pas sous de bons auspices, laissant de nombreux agriculteurs dans l’expectative à cause d’un retard cumulé. Jusqu’au 28 novembre, la forte demande en semences n’a pas été satisfaite et certains agriculteurs restent en quête de variétés de blé dur comme «Mâali», «Inrat 100», «Saragolla» ou «Karim».

La saison des céréales aurait dû débuter sous de bons auspices pour permettre le lancement des nouvelles semailles à temps. Malheureusement, un retard accumulé laisse de nombreux agriculteurs dans l’expectative, dépendant du hasard. Le manque de semences les a incités à s’exprimer !

Bien qu’il pleuve et que nous soyons bénis d’une pluie si généreuse, il semble que nous ne soyons pas encore prêts à préparer nos terres et à mobiliser les ressources nécessaires pour semer. Les céréaliculteurs continuent de patienter, demandant des semences et des engrais, mais les quantités fournies par l’État sont insuffisantes.

Les semences déjà programmées depuis septembre ne couvriront, au total, que près de 350 000 hectares, laissant plus de 750 000 hectares sans emblavement. «Nous avons déjà mis à disposition un stock d’environ 520 000 quintaux de semences sélectionnées, toutes variétés confondues», déclare Mohamed Ali Ben Romdhane, responsable à la direction générale de la production agricole.

Céréaliculteurs dans l’urgence

Deux mois plus tard, aucune avancée n’est constatée ! Les quotas de semences de blé dur affectés à chaque région demeurent en deçà des attentes. Dans l’urgence, les céréaliculteurs sont perdus. Ils réclament surtout des semences. «Nous ne comprenons pas pourquoi cela se produit si souvent. Nous n’avons jamais eu la possibilité de nous approvisionner dans les délais, sans parler de l’absence de DAP ou d’autres engrais.

A chaque fois, nos prévisions sont erronées !», déplore un agriculteur, souhaitant rester anonyme. La pénurie est ressentie presque partout.

«Jusqu’à aujourd’hui, 28 novembre, la forte demande en semences n’a pas été satisfaite. Nous luttons toujours pour les trouver. Certains de mes collègues sont restés sur leur faim. Ils recherchent «Mâali», «Inrat 100», «Saragolla» ou «Karim», leurs variétés de blé dur préférées», témoigne Imed Jamazi, agriculteur à Boussalem, dans le gouvernorat de Jendouba.

«Je n’arrive pas non plus à obtenir mon quota de semences», ajoute-t-il, évoquant les problèmes liés au nouveau système de gestion des semences. En raison du manque d’approvisionnement en semences de blé, les céréaliculteurs ont habitué à se servir de leurs réserves personnelles destinées à la saison suivante.

Cette année, tout a changé. «On m’a demandé de livrer toute la quantité de semences que j’avais stockées après la récolte, en échange d’autres dites sélectionnées, mieux traitées. Et jusqu’à présent, je n’ai rien reçu pour pouvoir semer», confie-t-il, ayant seulement reçu une quantité de semences mère destinée à la multiplication, en vertu d’un contrat avec une société privée de fertilisation.

Face à cet élan de protestation et de plaintes, aucune réaction n’a été observée. Silence total ! Le ministère concerné n’a pas appris de ses erreurs et n’a pas pris en compte les préoccupations des agriculteurs.

Tous absents

En effet, Imed n’est pas le seul à souligner ce manque critique de semences. Le Syndicat tunisien des agriculteurs en a beaucoup parlé. Dans une déclaration récente à une radio privée, son président, Midani Dhaoui, a dénoncé le retard accumulé, en particulier concernant la fourniture de semences de blé dur, en se basant sur les mêmes arguments.

«Décembre approche, alors que la saison stagne, et l’ensemencement des cultures de blé avance à un rythme très lent, autour de 40 % à l’échelle nationale», a-t-il averti, inquiet. Cela pourrait affecter le cycle de croissance de la plante (floraison, maturité), mettant en péril toute la campagne céréalière. De ce fait, la prochaine récolte de blé risque d’être inférieure aux attentes.

En outre, l’Office des céréales semble perdu dans la gestion de la situation, malgré ses promesses. «C’est toujours pareil ! Rien n’a changé depuis des années», déclare un autre céréaliculteur mécontent. Il redoute de ne pas trouver satisfaction.

Il rappelle avoir rencontré le même problème l’année dernière : «Je n’ai pas reçu la quantité de semences de blé dur dont j’avais besoin». Le répétition des mêmes causes entraîne des conséquences comparables. L’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche reste silencieuse.

Ses bureaux locaux et régionaux ainsi que les cellules de vulgarisation et de formation agricoles, réparties sur le territoire, ont failli à leur mission. Actuellement, rien n’indique un changement.

Ces cartels du blé

Pourquoi en est-on arrivé là ? «Nous naviguons à vue, sans aucun plan d’action ni concertation avec le corps agricole», répond un agriculteur de Béja. Tout aurait dû être engagé et préparé bien à l’avance. En juin dernier, la Cheffe du gouvernement avait abordé les préparatifs de la moisson de l’année, appelant à une coordination entre tous les acteurs, publics et privés, pour assurer le succès de la campagne céréalière.

Cependant, cela n’a pas suffi pour débuter correctement.

Cette crise des semences ne serait-elle qu’une conséquence d’une mauvaise gouvernance du secteur ? Les cartels du blé en profitent pour spéculer sur certaines variétés qui ne conviennent plus aux céréaliculteurs. «Nous voulons nous approvisionner en semences de notre choix, avec un rendement élevé, mieux adaptées aux aléas climatiques.

En plus de «Mâali» et «Inrat 100», nous privilégions également «Saragolla» et «Iride», deux variétés réputées pour leur résistance au stress hydrique et leur performance en qualité et quantité», réclament plusieurs agriculteurs.