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Gaza : Enquête du parquet antiterroriste sur la mort de deux enfants

Une enquête a été ouverte en France après la mort de Janna et Abderrahim Abudaher, deux enfants français âgés de six et neuf ans, dans un bombardement israélien à Gaza le 24 octobre 2023. Le parquet national antiterroriste a demandé à un juge d’instruction d’enquêter pour « crimes de guerre », mais estime qu’il n’y a « pas lieu » d’enquêter pour « génocide » ni « crime contre l’humanité ».


Une enquête a été ouverte en France. Le Parquet national antiterroriste a demandé à un juge d’instruction parisien d’enquêter pour « crimes de guerre » suite à la mort de deux enfants français lors d’un bombardement israélien à Gaza en octobre 2023, selon des sources proches du dossier rapportées par l’AFP vendredi.

Le parquet a cependant estimé qu’il n’est « pas nécessaire » d’enquêter pour « génocide » ni pour « crime contre l’humanité », contrairement aux demandes de la grand-mère des victimes et de la Ligue des droits de l’homme (LDH) dans leur plainte.

### « Bombardements réguliers »

Janna et Abderrahim Abudaher avaient six et neuf ans lorsqu’ils ont perdu la vie dans un bombardement israélien, le 24 octobre 2023, 17 jours après l’attaque meurtrière et sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas sur le territoire israélien. Jacqueline Rivault, la grand-mère maternelle des enfants, a déposé une plainte pour « meurtre » et « génocide » visant Israël, avec la LDH qui s’est constituée partie civile.

La plainte précise que les « bombardements réguliers » de l’armée israélienne ont poussé la famille à se réfugier dans une maison « au nord de la bande de Gaza », laquelle a été frappée par deux missiles, l’un d’eux ayant pénétré « directement dans la chambre où se trouvait la famille ». Abderrahim est mort « sur le coup » et Janna peu après.

Leur petit frère Omar et leur mère, Yasmine Z., ont été gravement blessés. Yasmine Z. a un passé judiciaire en France : elle a été condamnée en 2019 en son absence à Paris pour financement du terrorisme, ayant envoyé de l’argent à Gaza à des membres du Jihad islamique et du Hamas entre 2012 et 2013. Un mandat d’arrêt l’inquiète.

### Attaque délibérée

Trois mois après cette plainte, le parquet a demandé à un juge d’instruction d’enquêter « contre X » pour crimes de guerre, évoquant une « attaque délibérée contre la population civile » ainsi qu’une attaque contre un bien civil « n’étant pas un objectif militaire ».

En revanche, le parquet antiterroriste, compétent pour les crimes de guerre contre des Français, estime qu’aucune enquête pour « crimes contre l’humanité » ni pour « génocide » n’est justifiée. Les plaignants soutenaient que l’attaque s’inscrivait dans un « génocide » perpétré par Israël contre les Palestiniens. Toutefois, le parquet a fait valoir que la frappe pouvait avoir ciblé la mère des enfants, de nationalité française, et non palestinienne.

Concernant le « crime contre l’humanité », mentionné par la Cour pénale internationale (CPI) dans ses mandats d’arrêt contre le dirigeant israélien Benyamin Netanyahou et l’ex-ministre de la Défense Yoav Gallant, le parquet français estime qu’il ne comprend pas les bombardements aériens.

### Série de plaintes

« Nous sommes satisfaits que le parquet nous rejoigne sur l’ouverture de l’instruction et reçoive notre constitution de partie civile. Il va y avoir une enquête sur les tirs israéliens qui ont tué ces deux enfants français », a déclaré l’avocat de la grand-mère, Me Arié Alimi, à l’AFP. « La qualification initiale de génocide depuis la fin du mois d’octobre 2023 sera bien discutée dans le cadre de l’instruction française », a-t-il ajouté, même si le parquet ne l’a pas retenue à ce stade.

« Avant même de débuter les investigations, le parquet a une volonté dogmatique de circonscrire les investigations au crime de guerre », a regretté l’avocat de la LDH, Me Emmanuel Daoud. Par ailleurs, d’autres plaintes ont été déposées en France visant des exactions présumées contre des Palestiniens, à Gaza et en Cisjordanie occupée.

Plusieurs ONG, y compris la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et la LDH, ont porté plainte cet été contre deux soldats franco-israéliens d’une unité d’élite de l’armée israélienne, la « Ghost Unit », qu’elles accusent d’« exécutions sommaires » de civils à Gaza. En juin, la LDH a également déposé une plainte contre l’entreprise française d’armement Eurolinks et une entreprise israélienne, notamment pour complicité de crimes contre l’humanité et complicité de génocide.

Deux autres plaintes ont été déposées à l’encontre de Franco-Israéliens et d’entités françaises accusés d’être auteurs ou complices du crime de colonisation : la première par l’association Avocats pour la justice au Proche-Orient (AJPO), cofondée par l’avocate Gisèle Halimi, et la seconde par l’association France Palestine Solidarité.