Belgique

Gouvernement bruxellois : un système électoral pour ne plus bloquer ?

Aujourd’hui, les partis peinent à se mettre autour de la table pour former un gouvernement, malgré les tentatives de six partis. La réforme proposée par Re-Bel suggère de remplacer le double collège par un collège électoral unique, permettant à tous les électeurs de voter pour les mêmes listes.


Il y a quelques jours encore, six partis tentaient de former un gouvernement à travers la négociation budgétaire. Actuellement, les discussions sont confrontées à des difficultés pour rassembler les partis autour de la table. Dans ce cadre, on retrouve les négociateurs du côté francophone, soit le MR, le PS et Les Engagés, et du côté néerlandophone, Groen, Open VLD et Vooruit, ce qui permet d’avoir une majorité au parlement et au sein du collège francophone, mais seulement 8 sièges sur 17 côté néerlandophone.

Pour obtenir une majorité flamande, le CD&V aurait pu participer aux négociations, mais l’Open VLD a exercé son véto. Les négociations continuent sans donner d’indications d’un dénouement imminent. C’est dans ce contexte que Re-Bel, une plateforme associant des universitaires flamands et francophones, a présenté une proposition de réforme du système électoral bruxellois.

Cette initiative remet en question la séparation des électeurs en deux collèges linguistiques, francophone et flamand. L’idée proposée est de transitionner vers un collège électoral unique, où « tous les Bruxellois voteraient pour les mêmes listes », comme l’explique Philippe Van Parijs, philosophe, économiste et un des signataires de cette proposition. Cette réforme vise à moderniser le système bruxellois et à faciliter la formation du gouvernement régional.

Aujourd’hui, le parlement bruxellois fonctionne sur la base du double collège linguistique, divisant les voix des électeurs en deux groupes. Le parlement compte ainsi 72 sièges francophones et 17 sièges néerlandophones, quelle que soit l’issue électorale pour chaque communauté. Ce système, établi dans les années 1970-1980, avait pour but de protéger les intérêts linguistiques.

Le collectif de chercheurs derrière cette étude estime que cette logique ne correspond plus à la réalité actuelle, où « les questions politiques les plus émotionnelles à Bruxelles ne concernent pas autant la langue que des enjeux tels que la gouvernance, la sécurité, la mobilité ou la laïcité ».

Ce double collège engendre aussi des blocages, car le gouvernement bruxellois ne peut se former qu’avec une double majorité : francophone et néerlandophone. Or, ces majorités se constituent « indépendamment l’une de l’autre », créant parfois des incompatibilités politiques, ce qui conduit à des impasses, comme celle rencontrée par la Région. « On aurait déjà un gouvernement si, comme au niveau fédéral, il suffisait d’une majorité simple », rappelle-t-il.

La réforme proposée par Re-Bel vise donc à abolir cette séparation : tous les électeurs voteraient pour un seul collège, et les sièges seraient attribués proportionnellement aux listes. Ensuite, une correction garantirait la représentation minimale des deux groupes linguistiques (72 francophones et 17 néerlandophones).

Si ce système électoral était adopté, les prochaines élections seraient donc différentes pour les Bruxellois. D’abord, il n’y aurait plus de choix linguistique préalable au vote : « Il n’y aurait plus qu’un seul collège électoral sur lequel se présentent toutes les listes ».

On remarquera également moins de listes, car « les partis d’une même famille politique pourraient se présenter ensemble ». Ce système permettrait aux électeurs de choisir librement entre candidats francophones et néerlandophones sur une même liste, comme l’explique Philippe Van Parijs : « Si je trouve un ministre néerlandophone sympathique, cela ne m’empêchera pas de voter également pour des francophones ».

Le poids du vote sera, finalement, le même pour tous, quelle que soit la langue du candidat.

Avec des listes bilingues, les partis devraient négocier avant même les élections, et les compromis linguistiques seraient ainsi intégrés : « les accords de nature communautaire auront déjà été faits au sein des listes ».

Dès lors, les partis pourraient former des coalitions plus facilement, sans avoir à gérer des équilibres institutionnels complexes, rendant ainsi la logique de négociation plus proche de celle des autres régions belges. Philippe Van Parijs conclut qu’avec un tel système, « on peut être assuré qu’on n’arrivera plus aux 541 jours auxquels on est arrivé cette fois-ci ».