1200 décharges recensées en Wallonie, des centaines à découvrir encore
Philippe Tomsin, agent de la Spaque, est chargé de retrouver d’anciens dépotoirs en Belgique, ayant déjà identifié plus de 1200 sites. Actuellement, 50 de ces décharges sont sous surveillance, dont 7 seront sécurisées dans le cadre de travaux coûtant 44 millions d’euros.
Il s’appelle Philippe Tomsin, agent particulier de la Spaque, la Société publique d’Aide à la Qualité de l’Environnement. Sa mission consiste à retrouver d’anciens dépotoirs, ces lieux où, pendant des décennies, les Belges ont déversé divers déchets sans protections adéquates. Aujourd’hui, avec la nature ayant repris ses droits, ces sites ont disparu de notre vue.
Pour dénicher ces vestiges, Philippe Tomsin s’appuie sur une équipe de détectives. Ensemble, ils explorent les archives communales, examinent des images satellites et utilisent parfois des photographies aériennes de la Royal Air Force datant de la Seconde Guerre mondiale.
Actuellement, leur objectif est de localiser une vieille décharge à Jemeppe-sur-Sambre. Philippe Tomsin a récemment été intrigué par une archive de la RTBF, montrant un trou près de la Sambre semblant être un ancien dépotoir. Dans un film des années 60, le commentaire est sans ambiguïté : « On comble actuellement l’ancien lit du fleuve qui devient progressivement un immense dépôt d’ordures. »
Grâce à des éléments de l’arrière-plan de la vidéo—deux maisons et une chapelle proches de l’ancien site présumé—Tomsin a réussi à situer le lieu. Pour confirmer l’existence de ce dépotoir, il se déplace systématiquement sur le terrain, prenant des photos, inspectant les lieux et cherchant des témoignages d’habitants se souvenant de ce déversement.
Tomsin souligne l’urgence de ces investigations, car avec le temps, les témoins diminuent. Même lorsque des personnes se rappellent, leurs souvenirs peuvent devenir flous ou imprécis.
À Jemeppe, Tomsin ne trouve personne rappelant un « trou à crasse. » Il note que chaque hameau avait son propre dépotoir. En plus de ses recherches, il a signalé que, depuis plus de dix ans, lui et son équipe avaient identifié plus de 1200 anciens dépotoirs à travers le pays. Ce chiffre, loin d’être complet, indique qu’il existe encore de nombreux « trous à crasse » à découvrir, possiblement plusieurs centaines.
Pour enrichir ces données, les rédactions de L’Avenir et de la RTBF ont sollicité le public pour identifier ces anciens dépotoirs. Les résultats de cette enquête sont compilés dans un rapport accessible en ligne.
Il existe de nombreuses décharges cachées sous la végétation wallonne. Ainsi, lors de l’achat d’un terrain, il n’est pas évident de savoir s’il y a des déchets enfouis. Renaud Grégoire, porte-parole de la fédération des notaires, explique que les notaires se basent sur les informations dont ils disposent, notamment les renseignements d’urbanisme et la banque de données de l’état des sols, qui ne couvrent pas toujours l’historique des lieux.
Actuellement, cette banque répertorie un peu plus de 290 décharges. Cela représente seulement 1 décharge sur 4 des 1200 identifiées par la Spaque, et le ministre de l’Environnement admet que la base de données doit être mise à jour.
Les décharges n’affectent pas seulement l’environnement, mais également la santé publique. Le cas le plus notoire est celui de Mellery, un petit village du Brabant Wallon, où près d’un million de mètres cubes de déchets industriels ont été déversés illégalement. Des analyses ont révélé des niveaux de benzène, un cancérigène, atteignant 30 fois les normes européennes.
Les habitants de Mellery s’interrogent sur leur santé. Jean Pauluis, médecin au moment des faits, milite pour un suivi médical, mais celui-ci n’a été instauré que dix ans après la demande initiale. Les vérifications n’ont pas été à la hauteur des attentes, et de nombreux résidents, dont Josette, affirment n’avoir reçu qu’une simple prise de sang.
Les décharges continuent à polluer, même des décennies après leur exploitation. Environ 50 décharges parmi les 1200 au total sont considérées comme problématiques et sont sous surveillance. Un certain nombre d’entre elles seront prochainement sécurisées, avec des travaux estimés à 44 millions d’euros, financés par le plan de relance wallon.
Les travaux, cependant, ne suffiront pas à résoudre tous les problèmes posés par ces sites. Renaud Devriese, directeur des opérations à la Spaque, précise qu’il ne s’agit pas de déplacer les déchets, mais de gérer les zones afin d’éviter tout impact négatif sur l’environnement.
La Spaque devra continuer à assurer la maintenance et la surveillance de ces sites, avec des coûts annuels d’environ 1 million d’euros. L’avenir de ces décharges reste incertain, et il est anticipé que les efforts de monitoring devront se prolonger sur plusieurs années.

