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RDC : les combats ne cessent pas à l’est malgré l’accord de paix M23

Le 27 juin 2025, Donald Trump annonçait la signature d’un accord de paix entre le Rwanda et la RDC. Cinq mois plus tard, les affrontements entre l’armée congolaise et le M23 se poursuivent toujours.

« C’est un grand jour pour l’Afrique et un grand jour pour le monde« , a déclaré avec fierté Donald Trump le 27 juin dernier lors de la signature d’un accord de paix à Washington entre les ministres des Affaires étrangères du Rwanda et de la République démocratique du Congo. D’après le président américain, cet accord devait mettre fin à des années de conflits. Cependant, cinq mois plus tard, les combats entre l’armée congolaise (FARDC) et le M23 continuent.

Un conflit qui s’enlise

« Sur le terrain, les affrontements ont continué sur tous les fronts après la signature des accords, indique Reagan Miviri, analyste à l’Institut congolais de recherche sur la politique, la gouvernance et la violence, Ebuteli. Le M23 a repris plusieurs localités au Nord-Kivu et au Sud-Kivu. L’armée congolaise, qui semblait respecter le cessez-le-feu jusqu’alors, a également utilisé des drones contre le M23 ces dernières semaines. On ne perçoit donc pas vraiment les effets de ce qui a été décidé à Doha et à Washington. »

« On se dirige clairement vers un enlisement du conflit, ajoute Bob Kabamba, politologue à l’Université de Liège. Et ce statu quo satisfait le Rwanda, qui dispose désormais d’une zone tampon occupée par la rébellion du M23, le long de sa frontière. Il faut rappeler que cette zone est riche en ressources minières, qui sont exportées sur le marché international en transitant par le Rwanda.« 

Le 27 juin 2025, Donald Trump annonçait la signature d’un accord de paix entre le Rwanda et la RDC. Cinq mois plus tard, les armes ne se sont toujours pas tues entre les belligérants. © – Belga image

Les risques de balkanisation du Congo

Depuis les prises de Goma et Bukavu par l’AFC/M23, en janvier et février dernier, le Congo fait face à une partition de fait. D’importantes portions du territoire dans les provinces du Nord et Sud Kivu sont désormais administrées par les rebelles soutenus par le Rwanda, que l’armée congolaise semble incapable de reprendre par la force.

« La balkanisation du pays est un fait aujourd’hui, affirme Bob Kabamba. L’AFC/M23 organise la zone sous son contrôle. Ils ont mis en place une police, une politique commerciale, un système de justice. Cette zone de 40 000 kilomètres carrés fonctionne comme un État parallèle et englobe près de 12 millions de personnes. Cette situation perdurera tant que les négociations de paix n’aboutiront pas entre le gouvernement de Kinshasa et les rebelles soutenus par le Rwanda. »

Le 15 novembre 2025, un « accord-cadre » a été signé entre Kinshasa et la rébellion de l’AFC/M23 sous la médiation du Qatar, à Doha. © – Belga image

Un « accord-cadre » sans réelles avancées

Les accords signés à Washington et Doha ont plutôt tendance à maintenir le statu quo. « L’accord-cadre de Doha apparaît plutôt comme une victoire diplomatique pour le M23, qui se voit légitimé de facto dans les territoires contrôlés par la rébellion et reconnu comme interlocuteur officiel du gouvernement de Kinshasa, explique Reagan Miviri. On ne demande plus au M23 de quitter les territoires qu’il occupe, ce qui est tout bénéfice pour la rébellion. »

L’accord comprend huit protocoles, dont seulement deux ont été signés : celui sur le cessez-le-feu, qui n’est pas encore respecté, et celui sur l’échange de prisonniers, qui est en cours d’exécution. Cependant, les six protocoles restants, qui traitent de l’accès humanitaire, du désarmement et de la réintégration des groupes armés, du rétablissement de la souveraineté de l’État dans les zones contrôlées par l’AFC/M23, de la relance économique, de la réinstallation des déplacés, des questions identitaires divisant le pays, de la justice et de la réconciliation, sont les plus difficiles à mettre en œuvre.

 Il est important de faire intervenir l’ensemble des forces politiques du pays dans la résolution du conflit, y compris l’opposition politique non armée.

R. Miviri, analyste à l’Institut Ebuteli

« Il sera difficile d’avancer sur ces questions car elles impliquent l’ensemble de la nation, poursuit Reagan Miviri. Mais aujourd’hui, tant le gouvernement de Kinshasa que les rebelles de l’AFC/M23 semblent de moins en moins légitimes aux yeux de l’opinion publique. D’où l’importance de faire participer toutes les forces politiques du pays à la résolution du conflit, y compris l’opposition politique non armée. »

Une option de plus en plus fréquemment évoquée serait la reprise des négociations sous l’égide du président togolais, Faure Gnassingbé, médiateur officiel de l’Union Africaine. Cependant, il est difficile d’imaginer comment ces négociations pourraient réussir là où celles de Doha et Washington ont échoué jusqu’à présent.