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Japon : feu vert pour redémarrer la plus grande centrale nucléaire malgré la méfiance locale

Ce vendredi, Hideyo Hanazumi, gouverneur de la préfecture de Niigata, a confirmé qu’il « approuverait » la reprise des activités de la centrale de Kashiwazaki-Kariwa, qui attendait cette décision locale indispensable pour avancer vers un redémarrage des réacteurs. En 2024, le nucléaire, qui fournissait 30% de l’électricité avant 2011, ne représente plus que 9,5% de la production, bien qu’il soit en hausse par rapport aux 5,6% de 2022.


Ce vendredi, Hideyo Hanazumi, gouverneur de la préfecture de Niigata, a confirmé qu’il « approuverait » la reprise des activités de la centrale de Kashiwazaki-Kariwa. Ce vaste complexe, capable de fournir de l’électricité à des millions de foyers mais à l’arrêt depuis 2011, attendait cette décision locale essentielle pour avancer vers un redémarrage des réacteurs.

Cependant, ce redémarrage est particulier. Si 14 réacteurs gérés par d’autres compagnies ont déjà repris du service dans l’ouest et le sud du pays depuis l’instauration de nouvelles normes de sécurité strictes, le cas de Kashiwazaki-Kariwa est unique. Il marquerait le tout premier redémarrage d’une installation nucléaire sous la gestion de Tepco, l’opérateur de la centrale de Fukushima Daiichi, depuis la catastrophe de 2011. Conscient de la méfiance, Tepco a fortifié le site : une digue de 15 mètres face à la mer du Japon et des systèmes de secours surélevés ont été érigés pour se prémunir contre les tsunamis. Pourtant, la défiance demeure : près de 70% des habitants de la région se disent inquiets de voir Tepco aux commandes, selon un sondage commandé par la préfecture.

Au-delà de la politique locale, ce redémarrage répond à une urgence d’approvisionnement que les données de l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) révèlent clairement, montrant l’ampleur du « trou » laissé par l’arrêt du nucléaire. En 2024, le mix électrique japonais demeurait dominé par une forte dépendance aux importations : le charbon et le gaz naturel représentant chacun environ 30% de la production totale d’électricité.

Cette dépendance énergétique expose dangereusement l’archipel aux chocs géopolitiques, tels que les conflits en Ukraine et au Moyen-Orient, qui compliquent l’approvisionnement en matières premières. Du côté des énergies renouvelables, elles progressent : le solaire photovoltaïque atteint désormais 10% du mix selon l’AIE, mais elles ne suffisent pas à remplacer la production de base pilotable. Quant au nucléaire, qui fournissait 30% de l’électricité avant 2011, il ne représente plus que 9,5% de la production en 2024 ; il est cependant en hausse par rapport aux 5,6% de 2022, illustrant la lenteur de la reprise.

C’est dans ce contexte de vulnérabilité que le gouvernement a révisé sa doctrine. Le nouveau plan énergétique ne mentionne plus de « réduire » la dépendance à l’atome, mais de « maximiser » son utilisation. L’objectif est clair : porter la part du nucléaire à 20% d’ici 2040.

Ce changement est dicté par une nouvelle pression : la demande énergétique des centres de données pour l’intelligence artificielle et des usines de semi-conducteurs. Pour répondre à cet appétit vorace tout en visant la neutralité carbone d’ici 2050, le Japon prolonge la durée de vie de ses réacteurs au-delà de 60 ans. Les experts estiment qu’il en faudrait 33 pour atteindre les cibles fixées, une course contre la montre freinée par des protocoles de sécurité stricts.

Le pari de Kashiwazaki-Kariwa reste néanmoins fragile face à l’opinion. À Niigata, le publique est divisé : 50% en faveur du redémarrage, 47% contre. Il est clair que le spectre de Fukushima hante toujours les esprits.

Les opposants, soutenus par Greenpeace, rappellent que l’activité sismique ne diminue pas, citant le tremblement de terre du Nouvel An 2024 dans la péninsule de Noto comme un avertissement. Pour eux, remplacer une dépendance au gaz par une dépendance à l’uranium importé ne résout pas l’équation de l’autonomie et augmente le risque d’accidents majeurs.