Désarmement du Hezbollah : pression israélienne et américaine sur l’armée libanaise
L’armée libanaise a déployé jusqu’à présent 9.000 militaires dans le sud du Liban pour désarmer le Hezbollah, conformément à l’accord de cessez-le-feu qui a été établi il y a un an. Des Casques bleus de l’ONU ont indiqué avoir découvert « plus de 360 caches d’armes » depuis le cessez-le-feu, qui ont été transférées à l’armée libanaise.
L’armée libanaise, responsable de la tâche délicate de désarmer le Hezbollah, subit d’importantes pressions venant d’Israël et des États-Unis, ce qui a entraîné l’annulation d’une visite de son chef aux États-Unis cette semaine, a déclaré un responsable militaire à l’AFP.
Depuis le cessez-le-feu qui a mis fin, il y a un an, à un conflit sanglant entre Israël et le mouvement pro-iranien, l’armée a renforcé sa présence dans le sud du Liban, ayant déployé jusqu’à présent 9.000 militaires, selon cette source.
Conformément à l’accord de cessez-le-feu, elle doit démanteler le dispositif militaire du Hezbollah situé entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, qui se trouve à une trentaine de kilomètres plus au nord.
L’armée a soumis un plan au gouvernement, s’engageant à accomplir cette tâche titanesque d’ici la fin de l’année, avant de procéder progressivement au reste du territoire libanais.
Cependant, bien qu’elle ait déjà réquisitionné des armes et découvert des tunnels, elle refuse de fouiller des maisons, comme l’exige Israël. « Nous respectons l’échéance approuvée par le gouvernement et agréée par toutes les parties, dont les Américains », souligne ce responsable, qui a requis l’anonymat en raison de la sensibilité du sujet.
« Mais ce qu’ils demandent, le désarmement dans tout le Liban d’ici la fin de l’année, est impossible », ajoute-t-il, exprimant sa crainte que « les pressions américaines et israéliennes n’ouvrent la voie à une escalade » de la part d’Israël.
« Le désarmement du Hezbollah ne se réalisera sans doute pas. Israël pense qu’après avoir été contraint par Washington sur Gaza, il aura les coudées franches pour s’attaquer au Hezbollah », renchérit une source militaire occidentale. Washington exerce une forte pression sur Beyrouth pour que le Hezbollah remette ses armes à l’armée, ce qu’il refuse.
Israël, de son côté, a intensifié ses attaques malgré le cessez-le-feu et continue d’occuper cinq points frontaliers au Liban, bien qu’il était censé se retirer selon l’accord. L’armée israélienne a de nouveau accusé mercredi le Hezbollah de reconstruire ses capacités militaires près de la frontière et a mené plusieurs frappes, affirmant viser le mouvement, qui prétend respecter la trêve.
Composée d’environ 80.000 membres, l’armée libanaise, qui dépend grandement de l’aide américaine, est un pilier de la stabilité dans un pays en proie à de nombreuses crises. Son ancien commandant, Joseph Aoun, a été élu président en janvier dernier avec le soutien de la communauté internationale.
Cependant, l’annulation de dernière minute cette semaine d’une visite de son successeur, Rodolphe Haykal, aux États-Unis, a mis en lumière la première crise d’une telle ampleur entre les deux parties. Le général Haykal a renoncé à son voyage après que ses rencontres avec des responsables politiques et militaires américains ont été annulées, précise la source militaire.
Parmi ces responsables figurait l’influent sénateur républicain Lindsey Graham, qui a reproché à l’armée d’avoir qualifié Israël, dans un communiqué récent, d' »ennemi », déplorant « son effort faible, presque inexistant, pour désarmer le Hezbollah ». Le Liban et Israël sont toujours techniquement en état de guerre. La trêve est surveillée par un comité réunissant les États-Unis, la France, l’ONU, le Liban et Israël.
D’après le responsable militaire, ce comité exerce également des pressions sur l’armée libanaise et lui a demandé « d’effectuer des fouilles de maisons dans les villages » du sud, à la recherche d’armes ou de tunnels creusés sous les habitations par le Hezbollah, ce qu’elle a refusé. « On demande à l’armée libanaise de faire ce que l’armée israélienne n’a pas pu accomplir pendant la guerre avec ses missiles, ses avions et sa technologie », proteste ce responsable.
Il ajoute que l’armée « ne dispose pas des capacités techniques ni des effectifs suffisants pour inspecter une aussi vaste région », et qu’elle souhaite éviter tout conflit avec la population locale, majoritairement acquise au Hezbollah.
Jeudi, les Casques bleus de l’ONU ont indiqué avoir découvert depuis le cessez-le-feu « plus de 360 caches d’armes », qui ont ensuite été transférées à l’armée. Le responsable signale également qu’une conférence d’aide financière promise à l’armée par les donateurs internationaux ne s’est pas encore concrétisée.
Interrogé par l’AFP, un responsable militaire israélien a affirmé que le mécanisme de surveillance du cessez-le-feu « fonctionne, mais pas aussi rapidement que souhaité, et pas dans les zones qu’on souhaiterait ». « Le Hezbollah est en train de se reconstruire (…) Nous ne laisserons pas ces menaces croître », a-t-il soutenu. Selon lui, le Hezbollah possède toujours « des missiles de longue portée » et conserve « entre 20 et 30 % » de ses capacités militaires.
« On ne peut jamais atteindre zéro. Ce n’est pas possible (…) Pour atteindre zéro, il faudrait fouiller maison par maison partout au Liban, ce que nous attendons que l’armée libanaise fasse, car nous ne pouvons pas le faire nous-mêmes », a-t-il ajouté.

