Deux femmes recherchent d’autres victimes de leur médecin accusé de viols.
Sandy et Mathilde, âgées respectivement de 46 et 52 ans, ont déjà récolté 32 témoignages concernant des agressions sexuelles ou des viols commis lors de consultations avec un médecin généraliste de Loroux-Bottereau (Loire-Atlantique). En septembre 2025, le tribunal a informé les deux femmes qu’elles ne seraient pas tenues informées de l’avancée de la procédure en raison de la prescription des faits.
Les faits sont prescrits, mais la détermination demeure. Sandy et Mathilde, deux femmes de 46 et 52 ans, recherchent d’autres victimes d’un médecin généraliste à Loroux-Bottereau, près de Nantes, en Loire-Atlantique. Grâce à un collectif créé sur Facebook en octobre, elles ont déjà recueilli 32 témoignages d’agressions sexuelles ou de viols commis lors de consultations, ainsi que des difficultés rencontrées pour dénoncer ces actes venant d’un professionnel de santé.
En 2004, Mathilde et Sandy avaient déjà signalé le praticien à l’Ordre des médecins de Loire-Atlantique. « J’ai été convoquée devant plusieurs professionnels, dont mon agresseur », se souvient Mathilde. On lui a indiqué que ce médecin avait des pratiques particulières en raison des nombreuses conférences de sexologie qu’il suivait. Malgré son signalement, un médecin aurait conseillé à Mathilde de ne pas porter plainte, une décision dont elle subit encore les conséquences aujourd’hui.
Influencée par le mouvement MeToo, Mathilde réalise maintenant l’importance de sa voix : « À l’époque, j’avais conscience d’avoir été victime d’une pénétration non consentie. Mais aujourd’hui, le terme de viol me paraît d’autant plus évident. Si j’avais porté plainte, peut-être qu’une enquête aurait été ouverte. » En 2020, le médecin est mis en examen pour des motifs similaires. Sandy et Mathilde sont convoquées par la gendarmerie et apprennent qu’elles ne sont pas seules. Cependant, les faits qu’elles dénoncent étant prescrits, en septembre 2025, le tribunal les informe qu’elles ne seront pas tenues au courant de l’avancée de la procédure.
« Nous avons eu besoin de monter un collectif pour trouver d’autres victimes et recueillir ensemble leurs histoires », raconte Mathilde. Elles réussissent, à deux, à rassembler une trentaine de témoignages de mineurs, de femmes et de quelques hommes présumés victimes. « Certaines ont déjà porté plainte, d’autres prennent conscience de ce qui leur est arrivé et se sentent soulagées. » Mathilde se remémore le témoignage d’une femme adolescente à l’époque des faits, dont la mère lui avait dit qu’il n’était « pas possible de porter plainte contre un médecin ».
C’est cette difficulté que les deux femmes souhaitent mettre en lumière. « Nous nous sommes toutes rendues à un rendez-vous dans un état de vulnérabilité, mais surtout en toute confiance », souligne Mathilde. Il y a vingt et un ans, le généraliste lui aurait imposé ce qu’il qualifiait de « examen gynécologique ». « Il voulait vérifier mon clitoris et mon point G alors que j’avais un problème de rein », déplore Mathilde, qui s’était opposée à cette pratique. « Nombreuses sont les victimes qui partent du principe qu’un médecin détient le savoir médical et sont soumises à des agressions », ajoute-t-elle.
« Être victime d’agression dans un cabinet reste quelque chose de méconnu », insiste Mathilde, qui estime qu’il est crucial de dénoncer ces pratiques, afin que le conseil de l’Ordre et la justice agissent rapidement. Malgré les signalements, elle critique un cadre dans lequel les victimes ne sont pas protégées. Il y a trois ans, Sandy aurait échangé avec le médecin accusé par téléphone alors qu’elle appelait le 15 pour une urgence. « Malgré sa mise en examen en 2020, ce médecin continue d’exercer en téléconsultation et pour le SAMU », souligne-t-elle.
En Loire-Atlantique, plusieurs médecins ont été accusés de viols et d’agressions sexuelles au cours des dernières années. « Pour que ces personnes commettent des agressions pendant vingt ans, il leur faut des complices pour faire taire les victimes », affirme Mathilde, qui ne sait pas encore comment dénoncer le manque de protection et l’inaction de l’Ordre des Médecins du département.
Sandy et Mathilde se tiennent informées de la procédure judiciaire en cours grâce aux autres victimes. Elles espèrent être entendues dans le cadre de l’instruction. Contacté, l’Ordre des médecins n’a pas encore répondu à leurs demandes.

