Une plainte déposée contre l’exposition à l’amiante dans les écoles.
Nathalie Laclau, présidente de l’Association des victimes de l’amiante dans les locaux de l’Education des Bouches-du-Rhône, a déposé une plainte contre X auprès du Pôle santé publique du tribunal judiciaire de Marseille pour « mise en danger de la vie d’autrui » en raison de l’exposition à l’amiante dans des établissements scolaires. Huit écoles, un collège et un lycée du département sont visés par cette plainte qui souligne les défaillances des collectivités territoriales et de l’Education nationale concernant la gestion de l’amiante.

« Nous espérons que cette plainte suscite des réactions. » Nathalie Laclau, enseignante durant trois décennies, est présidente de l’Association des victimes de l’amiante dans les locaux de l’Éducation des Bouches-du-Rhône (Avalé 13), fondée en 2019. Mercredi, elle a rejoint d’autres associations, sept organisations syndicales, une organisation de parents d’élèves, et quarante individus pour déposer une plainte contre X auprès du Pôle santé publique du tribunal judiciaire de Marseille pour « mise en danger de la vie d’autrui » en raison de l’exposition à l’amiante dans des établissements scolaires.
Bien que l’amiante ait été interdit en 1997, ce matériau, largement utilisé dans la construction, demeure présent dans de nombreux bâtiments âgés de plus de trente ans, y compris dans les écoles. « Plafonds, murs, dalles et revêtements de sols, fenêtres, tuyauterie… Il est de notoriété publique que bon nombre de ces établissements n’ont jamais été désamiantés », est-il précisé dans le document envoyé au procureur, déposé ce mercredi. Huit écoles, un collège et un lycée du département sont concernés.
Dysfonctionnements et non-respect de la loi
« Lors de notre saisie, nous avons réfléchi à une plainte englobant un maximum de situations afin de répondre à des faits signalés depuis de nombreuses années », déclare à 20 Minutes l’avocate en charge du dossier, Me Julie Andreu du cabinet spécialisé TTLA, faisant état d’une situation « catastrophique » qui pourrait encore se détériorer. « Les établissements où se trouvent élèves et enseignants sont vétustes et se dégradent rapidement. S’ils n’étaient pas exposés auparavant, ils le sont peut-être maintenant », souligne-t-elle.
Cette plainte vise à mettre en lumière les manquements des collectivités territoriales, propriétaires des locaux, et de l’Éducation nationale, employeur. Elle dénonce un manque d’information pour le personnel et les élèves, des Dossier Techniques Amiante (DTA) incomplets ou absents alors qu’ils sont obligatoires, ainsi qu’une absence de protections lors des travaux. « Nous souhaitions mettre en avant une mise en danger qui semblait significative et préoccupante, explique Me Julie Andreu. Des alertes et des droits de retrait existent depuis des années dans ces établissements. Nous voulons une reconnaissance juste de cette exposition, sans minimiser ou occulter ce sujet. »
Me Andreu cite l’exemple de l’école maternelle de Clair Soleil, située dans le 14e arrondissement. Dans cet établissement vétuste, un plafond amianté de la salle de repos des enfants a été endommagé. Plusieurs signalements ont été effectués auprès de la mairie, avant la fermeture du dortoir. « Dans les écoles, il existe un problème qui est systématiquement nié, mais lorsqu’il est mis en lumière, on évacue, on exclut, on bâche. Mais imaginez l’inquiétude des parents, se demandant combien de siestes leur enfant a pu faire dans cette pièce ? », dénonce Me Julie Andreu.
« Catastrophe sanitaire silencieuse »
Nathalie Laclau constate un véritable silence sur le sujet. L’Avalé 13, membre du réseau national de l’Andeva (Association nationale de défense des victimes de l’amiante et autres maladies professionnelles), reçoit régulièrement des enseignants s’interrogeant sur les risques d’exposition au sein de leurs établissements. « Nous faisons face à la même problématique : l’inaction de notre employeur, l’Éducation nationale, qui est davantage hostile que coopératif, et l’inaction des collectivités territoriales », déplore-t-elle. L’association aide aussi les victimes dans leurs démarches de reconnaissance de maladie professionnelle ou pour adhérer au Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante (Fiva). Sur une dizaine de personnes accompagnées depuis la création de l’association, trois sont décédées. « Et ce n’est qu’une petite partie de l’iceberg, assure-t-elle. La majorité des gens ignorent qu’ils sont exposés. »
La période de latence entre l’exposition à l’amiante et l’apparition d’une maladie peut varier de quinze à quarante ans. « Il existe un risque de catastrophe sanitaire silencieuse », ajoute Monia Haddaoui, de la CGT Educ’action 13, qui soutient la plainte. Le syndicat, très actif sur ce dossier, notamment dans les instances territoriales, espère que cette action judiciaire exigera un respect de la loi et des actions concrètes à l’échelle locale. Une prise de conscience plus large est également attendue. « Nous demandons un plan national de désamiantage car les collectivités territoriales ne seront pas en mesure de le gérer seules », fait savoir la représentante syndicale.
« Cette plainte est la conséquence de notre incapacité à protéger les personnels de l’Éducation nationale, mais aussi l’ensemble des travailleurs qui évoluent dans les locaux scolaires », souligne-t-elle. « C’est une étape », ajoute Nathalie Laclau, espérant enfin provoquer un changement significatif.

