Baisse des prix : les betteraviers belges inquiets pour l’avenir du sucre.
La Confédération des Betteraviers Belges (CBB) a déclaré que, selon la Raffinerie Tirlemontoise, une réduction de 25% des surfaces cultivées sera recommandée aux producteurs de betteraves en 2026. L’OCDE et la FAO prévoient que « au cours de la prochaine décennie, la consommation mondiale de sucre devrait poursuivre sa progression, au rythme d’environ 1,2% par an pour atteindre 202 millions de tonnes en 2034 ».
La Confédération des Betteraviers Belges (CBB) exprime ses inquiétudes. Ses principaux clients conseillent aux producteurs de betteraves de réduire leurs surfaces de culture pour 2026 : d’après la CBB, la Raffinerie Tirlemontoise – le leader du secteur en Belgique – « propose une réduction de 25% des surfaces cultivées, tandis qu’Iscal Sugar [le numéro 2 belge, ndlr] préconise des “semis raisonnés” afin d’éviter une surproduction de sucre ».
Cette situation est un coup dur pour une filière qui réunit environ 5 500 exploitations. La Belgique se classe au cinquième rang des producteurs de sucre en Europe. Ce secteur a toutefois connu un déclin… « Depuis 2004, déplore la CBB, deux tiers des betteraviers belges ont cessé leur activité. La superficie [ne représentera plus que] 45 000 hectares en 2026 alors qu’elle atteignait encore 91 000 hectares en 2004 ».
La CCB tient pour responsable la Commission européenne, qui, selon elle, « continue de privilégier les accords de libre-échange, comme ceux signés avec les pays du Mercosur et l’Ukraine », tandis que, selon le président de la CCB, Hendrick Vandamme, « d’autres pays comme le Brésil ou la Thaïlande protègent leur industrie sucrière ». Les betteraviers craignent que « le sucre européen soit de plus en plus remplacé par du sucre importé de régions aux normes de production moins strictes ».
### Le prix du sucre en baisse marquée sur les marchés internationaux
Le contexte économique actuel n’est pas en faveur de l’industrie sucrière, en raison d’une baisse significative des prix du sucre ces dernières années. Dans son rapport annuel 2024-2025, la société belge Finasucre – maison-mère d’Iscal Sugar – a récemment souligné « la forte baisse du prix du sucre sur le marché européen, qui est passé d’une moyenne de 844 €/tonne en mars 2024 à 550 €/tonne en mars 2025, avec une diminution marquée à partir de septembre 2024. Dans ces conditions, une partie importante du sucre produit au cours de la campagne a été stockée dans le nouveau silo de 80 000 tonnes installé en 2023, ce qui a permis de retarder la commercialisation d’une partie de la production, dans l’attente de conditions de marché plus favorables. »
Cependant, l’amélioration espérée n’est pas encore arrivée. « Le marché mondial du sucre brut connaît actuellement un ralentissement important », écrivait récemment un analyste spécialisé dans les matières premières, « les prix ayant chuté à des niveaux jamais vus depuis cinq ans. La semaine dernière, le prix du sucre brut a atteint son plus bas niveau en cinq ans, atteignant 14 cents US la livre ».
### Un marché mondial saturé de sucre
Il convient de noter que les récoltes sont attendues exceptionnelles. Pour la saison en cours, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, la FAO, prévoit une production mondiale de sucre de 185,3 millions de tonnes, soit une hausse de 5,5 % par rapport à la saison précédente 2024/2025.
Dans les principaux pays producteurs, la conjoncture est très favorable, notamment au Brésil, premier producteur et exportateur mondial de sucre. « La production [de sucre brésilien] devrait augmenter d’environ 4 % par rapport à l’année précédente », résume le site Marchés – Décrypter les prix agricoles. Le pays pourrait retrouver son dynamisme après les baisses causées par les conditions météorologiques de 2024/25. De même, la production devrait aussi augmenter en Thaïlande, deuxième exportateur mondial de sucre, soutenue par des conditions de croissance favorables malgré des épidémies localisées. Une forte reprise est également anticipée en Inde, en raison de bonnes pluies et de l’extension des superficies cultivées. Des augmentations de production sont également prévues en Chine, en Indonésie et au Mexique par rapport aux niveaux de 2024/2025.
Une autre variable à prendre en compte est le prix du pétrole, qui a fortement reculé ces derniers mois (-17 % depuis le 1er janvier dernier pour le baril de WTI coté à New York).
Il existe un lien entre le sucre et le pétrole, particulièrement au Brésil. « Le Brésil représente à lui seul plus de 30 % des exportations mondiales, indique le site des betteraviers wallons. C’est donc un acteur majeur dans la formation des prix sur le marché. La spécificité du Brésil est qu’il peut choisir facilement entre produire du sucre ou du bioéthanol. Lorsque les cours du pétrole sont élevés, le Brésil a tendance à produire davantage de bioéthanol, ce qui réduit les stocks de sucre et fait grimper les prix sur le marché. » Mais lorsque les prix du pétrole baissent, comme c’est le cas actuellement, la situation est bien différente.
### Et la consommation dans tout ça ?
Reste la question : la consommation de sucre va-t-elle augmenter dans le monde ? Si l’on en croit les projections décennales de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) et de la FAO, la réponse est oui. Dans leurs dernières Perspectives agricoles 2025/2034, les deux organisations affirment que « au cours de la prochaine décennie, la consommation mondiale de sucre devrait poursuivre sa progression, au rythme d’environ 1,2 % par an pour atteindre 202 millions de tonnes en 2034, soutenue par la croissance démographique et l’augmentation des revenus ».
Selon l’OCDE et la FAO, c’est essentiellement en Asie et en Afrique que l’augmentation de la demande sera la plus forte, car c’est là que la croissance démographique et des revenus sera la plus significative.
Quant à l’Europe ? Les deux organisations signalent qu' »au cours des dix prochaines années, de toutes les régions examinées dans les Perspectives, l’Europe sera celle qui connaîtra la plus forte baisse de la consommation. Bien que la consommation de sucre par habitant de l’Union européenne reste la plus élevée de la région, elle devrait continuer à enregistrer une baisse continue au cours des dix prochaines années, mais à un rythme plus lent que durant la décennie précédente, une tendance également observée au Royaume-Uni et en Suisse. »

