High-tech

Essai d’une voiture électrique Huawei en Chine : expérience bluffante et sans les mains

Le Luxeed R7 est long de 4,98 m pour 1,98 m de large et 1,65 m de haut, et il est vendu à partir de 249 800 yuans en Chine (environ 30 200 euros). La voiture propose une autonomie allant jusqu’à 802 km selon les normes chinoises CLTC via une batterie de 100 kWh, soit environ 705 km en norme européenne WLTP.

Nous avons eu l’occasion de passer un après-midi à bord d’une Luxeed R7, une voiture électrique chinoise développée par Chery et Huawei… mais sans la conduire : elle était majoritairement en conduite autonome. Voici le récit de cette expérience.
Luxeed R7 // Source : Jean-Baptiste Passieux – Frandroid

Plus de 100 marques composent actuellement le marché automobile chinois. Ce chiffre impressionnant, qui pourrait être amené à diminuer dans les années à venir, témoigne néanmoins de la vitalité du marché local.

De plus en plus de marques songent à s’installer sur le marché européen. Dernière annonce en date : l’entrée du géant Chery en France via sa marque Omoda Jaecoo, qui a saisi l’occasion de nous convier en Chine pour nous faire découvrir sa gamme de produits.

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Parmi ces marques, nous retrouvons Luxeed, résultat d’une collaboration entre Chery et… Huawei. Cette marque se positionne clairement dans le segment premium et high-tech, et nous avons eu l’occasion d’en découvrir un modèle, son usine, ainsi que son système de conduite autonome au cours d’une escapade en périphérie de Wuhu, où se trouve le siège de Chery.

Le discret empire de Huawei dans l’automobile

HIMA : quatre lettres qui résument la stratégie de Huawei dans le secteur automobile. Contrairement à Xiaomi, qui commercialise ses voitures électriques sous sa propre marque (les modèles SU7 et YU7), Huawei a opté pour une approche moins directe, privilégiant les coentreprises.

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La gamme HIMA // Source : HIMA

C’est ainsi qu’est née HIMA, un acronyme pour Harmony Intelligent Mobility Alliance. Cinq marques y sont actuellement associées :

  • Aito, avec Seres ;
  • Stelato, avec BAIC ;
  • Maextro, avec JAC ;
  • Saic, avec… SAIC ;
  • et enfin Luxeed avec Chery.

Apparemment, Huawei ne se limite qu’à fournir le logiciel des tableaux de bord (fonctionnant sous HarmonyOS) ainsi que le matériel et le logiciel nécessaires à la conduite autonome, mais son implication va bien au-delà.

Effectivement, l’entreprise s’implique dans le développement des véhicules, en apportant son aide dans des domaines tels que la planification, la conception, le design, le marketing et même le contrôle qualité. En retour, les voitures portant le sigle HIMA peuvent être vendues dans les magasins Huawei en Chine.

Notons également que d’autres marques peuvent bénéficier du savoir-faire de Huawei, mais à un degré moindre : Avatr (qui est une coentreprise entre Changan et CATL, le leader mondial des batteries), par exemple, reçoit des services logiciels, matériels et de conception de Huawei, sans pour autant bénéficier de ventes dans ses boutiques. Il n’est pas toujours facile de s’y retrouver.

La Luxeed R7, une voiture électrique « tout en un »

Revenons à Luxeed. La marque propose deux voitures électriques : la S7, une grande berline, et le R7, un SUV que nous avons testé aujourd’hui.

Mesurant 4,98 m de long, 1,98 m de large et 1,65 m de haut, le Luxeed R7 est un véhicule imposant, au design cependant assez neutre. On y retrouve des inspirations de Tesla Model Y, de Xpeng G6 et de Porsche Cayenne Coupé : le R7 n’est pas particulièrement innovant, mais il n’est pas non plus inesthétique.

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Luxeed R7 // Source : Luxeed

En revanche, l’habitacle est impressionnant. Le tableau de bord attire l’attention avec son petit volant ovale, surmonté d’un écran d’instrumentation de 12,3 pouces (évoquant le i-Cockpit de Peugeot), tandis que l’écran central affiche une taille de 16,1 pouces.

Les passagers arrière bénéficient d’un confort exceptionnel : comme c’est souvent le cas avec les voitures chinoises, l’espace pour les jambes est généreux, et les sièges sont non seulement chauffants, mais également massants et ventilés. On retrouve également une climatisation indépendante, des prises USB-C capables de recharger à 66 watts… et le traditionnel réfrigérateur.

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Luxeed R7 // Source : Luxeed

Comme souvent dans la gamme HIMA, le R7 est proposé en version 100 % électrique (offrant jusqu’à 802 km d’autonomie selon les normes chinoises CLTC grâce à une batterie de 100 kWh, soit environ 705 km selon la norme européenne WLTP) et en version à prolongateur d’autonomie, où un petit moteur à essence sert de générateur pour recharger la batterie.

Nous parlons ici d’un moteur à essence de 1,5 L alimentant une batterie de 37 ou 53,4 kWh. Dans le meilleur des cas, l’autonomie combinée atteint 1 673 km en CLTC (environ 1 500 km en WLTP).

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Luxeed R7 // Source : Luxeed

Proposé à partir de 249 800 yuans en Chine (environ 30 200 euros), le Luxeed R7 se positionne dans la catégorie des SUV électriques, se mesurant aux Zeekr 7X, Nio ES6, IM LS6, sans oublier la très présente Tesla Model Y.

Une conduite (semi-)autonome plutôt agréable

Concernant les aides à la conduite, le Luxeed R7 est bien équipé en capteurs. Contrairement à Tesla et Xpeng qui reposent principalement sur des systèmes de caméras, il intègre deux LiDAR (un à l’avant et un à l’arrière), cinq radars millimétriques, 12 radars à ultrasons et pas moins de 11 caméras tout autour de la voiture.

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Luxeed R7 // Source : Luxeed

Le R7 est en mesure de réaliser de nombreuses manœuvres : en plus des aides à la conduite couramment disponibles en Europe (freinage d’urgence, détection des angles morts, maintien de voie, régulateur de vitesse adaptatif), il est équipé du Highway NCA (Navigation Cruise Assistance), capable de prendre les commandes sur autoroute (y compris pour les dépassements automatiques) et du City NCA, conçu pour naviguer en ville et détecter les feux rouges, les carrefours et le trafic, le tout sans avoir besoin d’une cartographie précise. Cela se rapproche de ce que propose le FSD (full self-driving) de Tesla, déjà en service en Chine et aux États-Unis.

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Le bandeau bleu turquoise indique l’activation de la conduite semi-autonome // Source : Luxeed

Notre parcours nous a emmenés sur les larges boulevards (désespérément vides) de Wuhu, puis sur des routes à deux voies dans sa périphérie et à la campagne environnante. Un détail intéressant : une fois le NCA activé, des lumières bleu turquoise s’allument de chaque côté de la voiture, informant les autres usagers que la Luxeed roule de manière autonome. Cependant, le conducteur doit garder les mains sur le volant.

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Luxeed R7 // Source : Jean-Baptiste Passieux – Frandroid

L’expérience s’est révélée dans l’ensemble concluante. Même si le système n’a pas eu à gérer des situations très complexes (comme des carrefours encombrés, des travaux sur la route, ou des changements de direction), la Luxeed a circulé de façon fluide, prenant des décisions judicieuses (notamment lorsqu’un véhicule plus lent se trouvait devant elle).

La communication avec le conducteur est omniprésente, avec un schéma détaillant ce que perçoivent les capteurs et plusieurs notifications expliquant en temps réel les actions de la voiture (ou les facteurs limitants, tels qu’une limitation de vitesse lorsque la route était humide).

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Luxeed R7 // Source : Jean-Baptiste Passieux – Frandroid

Au niveau du confort, il est de très bonne qualité : notre modèle d’essai était équipé de suspensions pneumatiques qui atténuaient les imperfections de la chaussée, tandis que le double vitrage intégral garantissait un habitacle extrêmement silencieux, perturbé uniquement par le très bon système audio, signé Huawei.

Une usine paradoxale

Notre balade nous a conduits jusqu’à l’immense usine Luxeed, construite par Chery spécifiquement pour les deux modèles de la gamme.

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Usine Luxeed // Source : Luxeed

Cette usine flambant neuve s’étend sur 930 000 m², étant capable de produire une voiture par minute, avec des porte-paroles fiers d’annoncer l’automatisation complète de l’emboutissage et du soudage, sans oublier un contrôle qualité assuré par une intelligence artificielle.

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Usine Luxeed // Source : Luxeed

Lors de notre visite, nous avons pu constater cette automatisation lors des étapes mentionnées… mais aussi l’assemblage principalement manuel. À chaque poste, plusieurs opérateurs (j’en ai compté jusqu’à neuf), sans équipements de protection, s’affairaient autour des voitures, faisant ressortir un contraste assez étonnant.

Une marque par la Chine, pour la Chine

Des prix compétitifs, des technologies de pointe, un confort haut de gamme et une présentation soignée : ces éléments pourraient préfigurer un certain succès, a minima en matière d’estime, pour ce Luxeed R7 en Europe.

Cependant, bien que Chery étende sa présence en Europe (et fasse son entrée en France), Luxeed devrait demeurer en Chine : Chery n’affiche pas d’ambitions, du moins à court ou moyen terme, d’exporter cette marque.

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Luxeed R7 // Source : Luxeed

L’écosystème Huawei pourrait être l’une des raisons ; nous avons vu que les Aito destinées à l’export – qui devraient arriver en Europe en 2026 – ont un logiciel et des systèmes d’aide à la conduite entièrement développés par Seres.

En ce qui concerne les aides à la conduite, Tesla n’a toujours pas réussi à faire homologuer son FSD. Initialement prévu pour le premier trimestre 2025 et malgré plusieurs essais de prototypes en conditions réelles, nous manquons d’informations concernant son déploiement.

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Luxeed R7 // Source : Jean-Baptiste Passieux – Frandroid

Les systèmes les plus avancés, notamment chez Ford ou BMW, permettent de lâcher les mains du volant sur autoroute, tant que le conducteur reste attentif – une avancée qui pourrait revendiquer un niveau « 2+ », toutefois, l’échéance pour atteindre le niveau 3, où le conducteur peut lire un livre ou dormir, semble encore lointaine.