Mehmet, l’épicier qui offre des fruits aux sans-abris : « Je n’ai pas envie d’apporter un peu de bonheur »
Il est 10h du matin au cœur du quartier Saint-Léonard, à Liège, où se trouve l’épicerie de Mehmet. L’idée des « fruits suspendus » a été proposée à Mehmet par Philippe Mercenier, membre fondateur de l’association « Sortir du Bois ».
Il est 10h du matin dans le quartier Saint-Léonard à Liège. La vitrine de l’épicerie de Mehmet est ordinaire, avec melons, tomates et raisins abrités sous trois parasols colorés et un auvent usé.
À l’intérieur, les odeurs de menthe fraîche, de cumin et d’ail se mélangent. Mehmet unloads sa voiture et organise des melons récemment arrivés dans ses étals. Son épouse, Emine, nettoie les réfrigérateurs avant d’aller chercher les enfants à l’école.
Mehmet a un petit mot pour chacune de ses clientes et de ses clients. Il est une figure emblématique du quartier. Les clients ne viennent pas seulement pour faire leurs courses. Une cliente nous confie qu’elle vient aussi parce que « le patron est sympathique ». Une autre mentionne qu’elle se rend là tous les jours.
« Moi, j’ai envie d’apporter un peu de bonheur, que les gens soient contents », raconte Mehmet. C’est dans cette boutique de proximité qu’a émergé l’idée des « fruits suspendus ».
### Une idée née d’une rencontre
L’idée a vu le jour lorsque Philippe Mercenier, membre fondateur de l’association « Sortir du Bois », a demandé à Mehmet s’il serait d’accord pour mettre en place le concept de « fruits suspendus » dans son épicerie.
Ce concept s’inspire du « caffè sospeso », une tradition napolitaine consistant à payer un café pour soi et un autre pour une personne dans le besoin. En Belgique, le principe a été adapté à des cafés suspendus, des repas suspendus, des frites suspendues et même des coupes de cheveux suspendues.
### « Des clientes et des clients comme les autres »
Tandis que Mehmet explique cette initiative derrière son comptoir, il continue de servir ses clients fidèles. Une cliente laisse sa monnaie en précisant : « Pour les fruits suspendus ». Mehmet sourit, range l’argent dans la caisse et note le montant dans un carnet.
Cet argent sera utilisé dans quelques heures, quelques jours ou semaines, pour une autre cliente ou un autre client, sans toit ou sans papiers, qui pourra repartir avec un sac de fruits sans avoir à les payer. « Ce qui compte, c’est qu’ils et elles restent des clients et des clientes comme les autres », insiste Mehmet.
### Une chaîne de solidarité
Quelques jours plus tard, Laure, active dans une association d’aide aux sans-abris, entre dans le magasin : « Bonjour Mehmet, qu’est-ce que tu aurais pour nous aujourd’hui ? »
Mehmet lui propose de beaux melons. Laure ira les distribuer sur les Coteaux de la Citadelle, où des sans-abris ont installé leurs tentes.
### Conclusion
À Saint-Léonard, l’épicerie de Mehmet est devenue un symbole discret. Aucune grande campagne de communication, pas de mécènes. Juste un commerçant, des étals de fruits et des clients qui acceptent de partager un peu.

