France

Procès du meurtre de Lola : La perpétuité incompressible pour Dahbia Benkired ?

L’avocat général a requis une peine de perpétuité « incompressible » à l’encontre de Dahbia Benkired, 27 ans, jugée pour avoir violé, torturé et tué Lola, 12 ans, en octobre 2022. La période de sûreté est d’au moins trente ans et la cour peut recourir à cette peine seulement pour des meurtres d’enfants de moins de 15 ans précédés de viols ou de tortures.

« À la hauteur de la cruauté » du crime. L’avocat général a demandé une peine de réclusion à perpétuité « incompressible » contre Dahbia Benkired, âgée de 27 ans, jugée pour avoir violé, torturé et tué Lola, 12 ans, en octobre 2022. Il s’agit de la peine la plus sévère prévue par le Code pénal français, qui n’a jamais été prononcée à l’encontre d’une femme jusqu’à présent, mais qui doit permettre d’« assurer la protection de la société », selon les propos de l’avocat général. Que signifie exactement cette perpétuité incompressible ? Signifie-t-elle que Dahbia Benkired ne sortira jamais de prison ?

Au moins 30 ans derrière les barreaux

Depuis 1994, suite au meurtre d’une enfant de 8 ans à Perpignan, une cour d’assises peut décider de condamner un accusé à une peine de « perpétuité incompressible ». Pour les condamnés à perpétuité non incompressible, il est possible de demander un aménagement de peine après 18 ou 22 ans (en cas de récidive), ce qui n’est pas le cas ici. La période de sûreté est d’au moins trente ans.

Cette décision spéciale peut être adoptée seulement si la cour statue sur des meurtres d’enfants de moins de 15 ans, précédés de viols, de tortures ou d’actes de barbarie (ce qui est le cas du meurtre de Lola), ainsi que sur les meurtres de personnes dépositaires de l’autorité publique (magistrats, forces de l’ordre, surveillants de prison, etc.) depuis 2010, et sur les crimes relevant de la législation antiterroriste, depuis 2016.

Un très mince espoir de sortie

Concernant la légalité, telle qu’évaluée notamment par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), les peines ne peuvent pas être totalement perpétuelles. La loi stipule qu’après 30 ans d’incarcération, le juge d’application des peines peut « saisir un collège de trois experts médicaux désignés par le bureau de la Cour de cassation sur la liste des experts agréés, qui se prononce sur l’état de dangerosité du condamné ». Une commission de cinq magistrats de la Cour de cassation détermine, « au vu de l’avis de ce collège, s’il y a lieu de mettre fin à l’application de la décision de la cour d’assises ».

Ce très faible espoir de libération a permis en 2014 la validation du dispositif par la CEDH, qui avait été saisie par le tueur en série Pierre Bodein, alias Pierrot le fou, le premier à pouvoir initier ce processus en 2034, à 86 ans. Il avait été le premier à écoper de cette peine.

Les personnes déjà condamnées

La justice a imposé cette peine en 2008 à Michel Fourniret, surnommé l’« ogre des Ardennes », décédé en 2021. Plus récemment, Nicolas Blondiau (2015) et Yannick Luende Bothelo (2016) ont été condamnés pour des viols et des meurtres d’enfants, accompagnés de tortures.

En matière de terrorisme, cette peine a été prononcée cette année contre deux islamistes radicaux : Brahim Aouissaoui, accusé d’avoir tué trois personnes en 2020 dans la basilique de Nice, et Michaël Chiolo, pour avoir gravement blessé au couteau deux surveillants à la prison de Condé-sur-Sarthe (Orne) en 2019. Tous deux ont fait appel de leur condamnation. Avant eux, en 2022, Salah Abdeslam, le seul membre des commandos des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis (130 morts) encore vivant, a également été condamné à cette peine par la cour d’assises spéciale.

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Si Dahbia Benkired est condamnée à cette peine, elle deviendrait la première femme à en faire l’objet.