« Jad » de Jamil Najjar : Ne plus mourir en silence sur nos écrans
« Jad », le premier long métrage de Jamil Najjar, a été projeté au Théâtre de l’Opéra de Tunis et a remporté le Prix du public au festival international du film de Annaba 2025. Le film présente le personnel de l’hôpital comme une association de malfaiteurs sans scrupule où les malades sont les derniers de leurs soucis, et Jamil Najjar dresse un tableau sombre et désespéré sur la situation des hôpitaux en Tunisie.

Lors d’une projection spéciale au Théâtre de l’Opéra de Tunis, « Jad », le premier long métrage de Jamil Najjar, a été présenté avec éclat. Ce film a remporté le Prix du public au festival international du film de Annaba 2025.
De nombreux spectateurs étaient présents pour assister à cette première, le film étant actuellement diffusé dans les salles. Jamil Najjar a annoncé que « Les recettes seront versées aux hôpitaux publics » lors de la présentation de son œuvre.
La Presse — Produit par la société « Ameur production » et distribué par le groupement Goubantini, « Jad » plonge les spectateurs dans un drame social, mettant en lumière les défaillances du système de santé tunisien, notamment des hôpitaux publics, avec des problèmes tels que la surcharge des urgences, le manque de personnel, l’absence d’hygiène et les tensions entre soignants et patients.

Dans ce contexte chaotique, la mort est banalisée, réduite à un simple constat. Ahmed (Mohamed Mrad), dont le frère Nour a été grièvement blessé dans un accident de la route et amené aux urgences, doit faire face avec ses parents à une réalité implacable. La famille semble unie et représente une force vitale.
L’histoire est inspirée d’un fait divers réel vécu par un père, qui est aussi le producteur du film. Ce dernier a été particulièrement affecté par la mort de son fils, décédé par négligence dans un hôpital, ce qui l’a poussé à créer une société de production pour réaliser ce film en mémoire de son fils et pour dénoncer les insuffisances du système de santé corrompu.
« Jad » met en scène deux familles : l’une aisée, dont le fils est victime d’un accident de la route, et l’autre démunie, dont le fils, maçon, est blessé lors d’une chute sur un chantier. Moncef (Abdelkarim Bennani), un agent d’accueil corrompu, exploite ces familles vulnérables pour leur extorquer de l’argent, avec la complicité des infirmières et même du pharmacien.
Seul le chirurgien (Mohamed Ali Ben Jemaâ) semble épargné. Ahmed souhaite être aux côtés de son frère et le sauver, même si sa femme accouche dans une clinique. Il veut le transférer dans une clinique privée, mais son état ne le permet pas selon le médecin. Malgré ses efforts, Ahmed se retrouve impuissant face à ce désordre.
Le film dépeint le personnel hospitalier comme une bande de malfaiteurs insensibles, où les patients sont les derniers de leurs préoccupations : trafics de médicaments, conditions d’hygiène déplorables, déchets accumulés. Ce panorama inquiétant de l’hôpital public contraste avec la propreté et le calme des cliniques privées. Jamil Najjar dresse un tableau sombre et désespérant de la situation des hôpitaux en Tunisie.
Cependant, le film souffre de son réalisme brut, jouant sur les émotions du public. Le sujet est traité en surface. La naissance du bébé d’Ahmed prévient déjà d’un dénouement tragique. En parallèle, la description de l’hôpital, et la quête de profit du personnel qui profite des patients, est une réalité connue de tous. Le film a le mérite de le dénoncer.

Toutefois, la seule dénonciation ne suffit pas ; la lutte intérieure d’Ahmed manque de profondeur. Mohamed Mrad incarne avec intensité cet homme tiraillé entre consternation et humanité, donnant de l’argent à Moncef pour aider la famille du maçon à se loger.
Certaines longueurs viennent perturber le rythme du film, dont le scénario, assez superficiel et sans rebondissements, fait défaut. Les acteurs Amel Hedhili (la mère), Souhir Ben Amara (l’épouse d’Ahmed), Fathi M’selmani (le père), Sondes Belhassen (la mère du maçon), Yasmine Dimassi (la sœur du maçon), Saoussen Maâlej (infirmière en chef), Jamel Sassi (chef de service), Mohamed Ali Ben Jemaâ (chirurgien) et Abdelkarim Bennani (agent d’accueil) ont tenté de sauver les meubles en interprétant leurs rôles avec plus ou moins de justesse, sans trop sombrer dans la caricature. Cependant, l’approche linéaire adoptée par le réalisateur, qui est aussi l’auteur du scénario, se rapproche plus d’un téléfilm.

