Première édition de Kotouf à Djerba : les littératures du Sud à l’honneur
Houmet Souk a lancé en octobre la première manifestation littéraire francophone, appelée Kotouf, consacrée aux littératures du Sud. Le vernissage de l’exposition «Berbérités, des origines aux influences» de Pierre Gassin a eu lieu le 16 octobre à l’Alliance Française de Djerba et se poursuivra jusqu’au 16 novembre 2025.
**Houmet Souk se transforme en octobre avec le lancement de la première manifestation littéraire francophone dédiée aux littératures du Sud.**
Sobrement nommée Kotouf, cette rencontre encourage la recherche de savoirs et des échanges enrichissants, réunissant une quinzaine d’écrivains francophones, tant internationaux que tunisiens.
**La Presse** — Il s’agit d’une édition pilote qui a nécessité plus de deux ans de préparation. Sous la direction d’un comité exclusivement féminin, soutenu par la volonté des Djerbiens, d’acteurs locaux, de journalistes francophones et d’écrivains de renommée internationale, Kotouf vise à insuffler une nouvelle dynamique culturelle dans la région. Ce projet inclusif a pour but de soutenir la pérennité de la francophonie, de promouvoir la langue française, et de mettre en lumière la richesse inestimable des Suds globaux, ainsi que leurs diverses langues et dialectes.
**Point de départ et d’ancrage**
Les organisatrices du festival ont jugé essentiel de décentraliser la pensée, en s’éloignant des grandes villes, des capitales et du nord. Djerba, une île à la culture millénaire, a été marquée par de nombreuses influences culturelles. Généralement perçue comme une destination balnéaire et touristique, célèbre pour son tourisme de masse, la richesse de cette destination récemment classée au patrimoine de l’Unesco mérite d’être mieux valorisée.
L’événement Kotouf cherche à promouvoir la culture locale, la gastronomie ainsi que l’histoire de l’île. Marielle Anselmo, enseignante, chercheuse, et poétesse, Sourour Barouni, professeure d’anglais et doctorante, Mounira Dhaou, agrégée en langue et littérature arabe, chercheuse et poétesse, ainsi que Fatma Dellegi Bouvet-de la Maisonneuve, écrivaine et médecin-psychiatre, ont œuvré assidûment pour réaliser cette initiative.
En parcourant le centre-ville, ses souks, jusqu’au Centre culturel méditerranéen, jeunes bénévoles, participants et invités se retrouvent pour dessiner leur programme. La littérature rime avec connaissance et connexion avec les élèves des établissements scolaires locaux. Une visite à l’école « Nouvelles générations », fondée en 2018, était indispensable. Enseignants et élèves échangent sur la question de l’écrit et de l’oralité, à travers l’utilisation de la langue française.
Les adolescents discutent des débouchés professionnels et des spécialités qui suscitent l’intérêt : Qu’est-ce qu’être journaliste spécialiste de la presse écrite ? Quelle influence ont la caricature, l’illustration, l’image, le dessin ? Que signifie faire de la radio en langue française en Tunisie ? Autant de questions qui enrichissent les échanges, notamment avec les professeurs présents.
Houda ben Yahia, pédopsychiatre, souligne l’importance de l’écriture et de l’oralité dans l’existence humaine. Le besoin de communiquer a toujours été présent, à travers différents canaux. La communication constitue le fondement du savoir civilisé, et elle continue d’évoluer.
« C’est une continuité de l’histoire. Laisser des traces à travers l’écriture, la littérature, les symboles, le dessin, c’est écrire l’histoire ! Et, plus récemment, à travers Kotouf, les organisatrices mettent l’accent sur le Sud global et sa littérature. Une édition qui, de surcroît, est orchestrée par des femmes écrivaines », rappelle la pédopsychiatre, mentionnant les femmes écrivaines longtemps passées sous silence pour avoir osé s’exprimer, souvent sous des pseudonymes masculins.
L’école travaille à sensibiliser les élèves à leur appartenance, à leur identité et à leurs cultures. Souvent, ils évoluent dans une double culture. L’enseignement leur est destiné pour les former, en éliminant les notions eurocentrées, un objectif en phase avec la vision du festival émergent.
**Focus ibadite et artistique**
Une visite à la mosquée Louta a eu lieu pour mettre en valeur le patrimoine historique de l’île. La mosquée Louta, également nommée « Jemaa Louta », est parmi les monuments historiques les plus emblématiques de l’île. Appelée la « Mosquée souterraine », elle se situe entre Gallala et El Kantara.
Cet édifice religieux historique daterait des XIIe ou XIIIe siècles. Partiellement enfouie, elle se caractérise par une architecture simple, construite avec deux coupoles émergeant du sol et accessible par un escalier escarpé. Appartenant à la tradition ibadite, la mosquée aurait été un lieu de culte secret ou de refuge en période de conflit. Bien que désaffectée aujourd’hui, elle a été restaurée en 1990 puis en 2019, et figure désormais au patrimoine mondial de l’Unesco.
Le vernissage événementiel à Djerba s’est tenu le 16 octobre à l’Alliance Française. « Berbérités, des origines aux influences » de Pierre Gassin est une exposition de 40 photographies qui retrace les cultures berbères du sud tunisien, leurs traditions, leur spiritualité, ainsi que l’évolution de ces héritages au fil du temps. Le photographe français, résident à Kerkennah, met en valeur, à travers ses œuvres, un patrimoine fait de symboles, de gestes quotidiens et de pratiques communautaires. L’exposition sera visible jusqu’au 16 novembre 2025.
**Photos de : Wided Zoghlami**
**Pierre Gassin**
**Groupe Scolaire Nouvelles Générations**

