Maroc

La colère froide de Sa Majesté

Sa Majesté le Roi Mohammed VI a ouvert la nouvelle année législative par un discours soulignant l’importance de la responsabilité, de la justice sociale et de l’efficacité dans l’action publique. Le Souverain a affirmé que « les lenteurs administratives et blocages politiques ne sont plus tolérables » et a appelé à une gouvernance tenant compte des réalités locales.


Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, a inauguré la nouvelle année législative par un discours qui marque un tournant. Le contexte s’y prête : les récentes mobilisations des jeunes, notamment de la génération Z, ont mis en lumière un profond malaise face aux lenteurs de l’action publique et au désengagement de l’État dans ses missions régaliennes.

Le Souverain n’a pas manqué de le souligner : derrière un ton mesuré, se cache une colère froide, celle d’un Roi fatigué des promesses sans lendemain et des calculs partisans.

Le message royal est sans équivoque : l’heure d’agir est venue. « Responsabilité, justice sociale et efficacité doivent redevenir les piliers de l’action publique », a-t-il déclaré. En rappelant les principes de responsabilité, d’efficacité et de cohésion nationale, SM le Roi a lancé un avertissement clair : le temps des bilans approche, celui des excuses est révolu. Son propos est limpide : il faut replacer le citoyen au cœur de l’action publique et transformer les réformes en résultats concrets.

La responsabilité, a-t-il souligné, se mesure désormais aux actes, pas aux discours. La crédibilité des institutions repose sur la capacité des responsables à rendre des comptes et à respecter leurs engagements. Dans un environnement politique dominé par la communication et les rivalités, cette mise en garde prend tout son sens : la confiance des citoyens ne se décrète pas, elle se mérite.

Cette « colère froide » se manifeste par la fermeté du ton. Sans désigner quiconque, le message vise l’ensemble de la classe politique et en premier lieu le gouvernement Akhannouch : les promesses doivent se concrétiser par des politiques tangibles. Le temps des engagements vagues est révolu. SM le Roi réaffirme son intention de faire de l’État un acteur de résultats, et non de simples intentions. Cela exige une méthode et une vision claires : il ne s’agit plus d’accumuler les stratégies, mais de produire un impact réel sur la vie quotidienne des citoyens.

À la lumière des récentes mobilisations, le discours royal marque également une évolution importante dans la lecture des enjeux sociaux. Le Souverain souligne l’importance politique et économique de la jeunesse. Il a entendu les frustrations d’une génération connectée, critique, mais profondément attachée aux bases du Royaume. Ces jeunes ne demandent pas de privilèges, mais une écoute véritable, des perspectives d’avenir et de la confiance. SM le Roi appelle à les réconcilier avec la vie publique, en améliorant l’éducation, en offrant un système de santé digne du Maroc du XXIe siècle, en mettant en œuvre des politiques d’emploi efficaces et en favorisant une participation citoyenne accrue.

Ignorer cette jeunesse entraînerait la fragilisation de la cohésion nationale. Elle n’est plus un simple sujet de discours, mais un acteur du changement. Ce passage témoigne de la volonté royale de renouveler le contrat social, en s’appuyant sur les forces vives du pays plutôt que sur des structures partisanes figées.

Le message s’adresse également aux institutions intermédiaires – partis, syndicats, collectivités – invitées à se réinventer et à redevenir des espaces d’écoute, de médiation et d’innovation.

La cohésion sociale et territoriale constitue un autre axe fort du discours. SM le Roi souligne la nécessité d’une gouvernance prenant en compte les réalités locales et les inégalités persistantes. Ce message vise à rompre avec une centralisation excessive et à donner un contenu concret aux réformes sociales en cours. Dans la continuité de ses grands chantiers — protection sociale, investissements productifs, développement équilibré — le Souverain adopte un ton plus ferme : les lenteurs administratives et les blocages politiques ne sont plus acceptables. L’État doit agir avec équité et efficacité.

Au-delà du constat, le discours ouvre une perspective : celle d’un Maroc de la performance et de la dignité, où chaque institution doit rendre des comptes et où chaque citoyen doit ressentir l’impact des politiques publiques. SM le Roi ne se contente plus d’appeler à la réforme; il exige sa mise en pratique, dans les délais et avec des résultats mesurables.

Ainsi, au-delà des protocoles, le discours royal est un signe fort. L’heure n’est plus aux querelles partisanes ni aux justifications institutionnelles : le débat politique doit se concentrer sur des résultats concrets. SM le Roi rappelle que servir le peuple marocain n’est pas un slogan, mais une obligation morale et politique. Trop souvent, les intérêts personnels ont prévalu sur l’intérêt général; le Maroc ne peut plus avancer avec des promesses repoussées.

Le message royal est clair : il faut agir, et agir maintenant. Responsabilité, justice sociale et efficacité doivent redevenir les fondements de l’action publique. Ceux qui négligeront cet appel risquent de se retrouver à l’écart d’un Maroc rénové — celui de la reddition des comptes, de la confiance retrouvée et du véritable service au citoyen. C’est la promesse d’un État de résultats, où l’autorité se mesure non plus au statut, mais à l’utilité et à l’exemplarité.

Le discours de Sa Majesté n’est pas seulement un rappel à l’ordre : c’est une feuille de route, une vision pour un Maroc lucide, exigeant et tourné vers l’avenir.

Par Mohamed Lmoubariki