France

La pollution ne s’arrête pas au 15 septembre : observer la qualité des eaux de baignade en hiver ?

L’association Eau et rivières de Bretagne effectue des prélèvements d’eau de mer sur une dizaine de plages bretonnes, avec des analyses qui viennent compléter celles réalisées chaque été par l’Agence régionale de santé. Sur les neuf plages contrôlées, le spot de surf du Minou, à Plouzané (Finistère), affiche 100 % de résultats conformes, tandis que la plage voisine du Lerret ne présente que 11 % d’analyses jugées « bonnes ».


Deux prélèvements en temps ensoleillé et un après la pluie. Depuis plusieurs mois, l’association Eau et rivières de Bretagne réalise des prélèvements d’eau de mer sur une dizaine de plages en Bretagne. Ces analyses complètent celles effectuées chaque été par l’Agence régionale de santé (ARS) pour s’assurer de la sécurité des baignades. Cependant, les prélèvements de l’ARS se limitent à la période estivale, lorsque les plages accueillent le plus de monde, ce qui semble logique.

Néanmoins, « la pollution ne s’arrête pas au 15 septembre », comme le souligne Eau et rivières de Bretagne. Par ailleurs, de plus en plus de personnes se baignent presque toute l’année, comme les adeptes du longe-côte ou du surf, qui ne sont pas informés de la qualité des eaux dans lesquelles ils évoluent. C’est une problématique à prendre en compte dans une région très agricole où l’épandage de lisier, l’utilisation d’engrais et le recours aux pesticides polluent fréquemment les cours d’eau, surtout après de fortes pluies.

Sur les neuf plages surveillées, les résultats varient. Par exemple, le spot de surf du Minou à Plouzané (Finistère) affiche 100 % de résultats conformes, tandis que d’autres plages montrent des concentrations élevées en bactéries E. coli et en entérocoques intestinaux. Pourquoi cette disparité ? « Lorsqu’il pleut, les bactéries présentes dans les sols sont entraînées par ruissellement vers les cours d’eau avant de gagner la mer. Les touristes ne sont pas responsables de cela », précise Eau et rivières de Bretagne, qui met en cause les épandages agricoles ainsi que les dysfonctionnements des stations d’épuration. Le lessivage des sols peut également contribuer à cette pollution, un phénomène qui ne prend pas fin après l’été.

C’est pourquoi l’association demande que les analyses continuent au-delà de la saison estivale. « Oui, ce serait une bonne idée. Cela pourrait être d’utilité publique, car la pratique ne s’arrête pas à la fin de l’été. Cela pourrait rassurer les pratiquants de sports nautiques, les pêcheurs à pied, et pas seulement les touristes en été. On observe une augmentation des baigneurs près de toute l’année, la pratique se développe significativement », témoigne Anthony Démon.

Ce Finistérien de 42 ans, avec vingt-cinq ans de pratique du surf, dirige la Pagan Surf School et emmène adultes et enfants sur le spot de Boutrouilles à Kerlouan. « Nous n’avons pas de problème de pollution sur cette plage. L’eau est même d’excellente qualité, car il n’y a pas de rivière qui débouche dessus. » C’est vrai, car à la plage voisine du Lerret, seulement 11 % des analyses sont jugées « bonnes ». Toutefois, les surfeurs du Finistère ne semblent pas découragés par la qualité de l’eau. « Nous avons toujours plus ou moins nagé là-dedans. Personnellement, cela ne m’a jamais freiné dans ma pratique. Des otites, tout le monde en a eu. Il arrive d’avoir des rougeurs ou des démangeaisons cutanées. » À la sortie de l’eau, Anthony se rince soigneusement. Les membres du club de marche aquatique des Vénètes suivent également cette précaution.

Cette association, forte de 220 adhérents à Damgan (Morbihan), suit attentivement les résultats des analyses envoyées par l’ARS. Cependant, depuis un mois, elle fonctionne à l’aveugle, les prélèvements étant interrompus. « Certains de nos membres se posent des questions. Oui, il serait bénéfique d’étendre la surveillance au moins d’avril à octobre », admet Christine Guyot.

Malgré les résultats peu rassurants des analyses d’Eau et rivières, la présidente du club refuse de céder au catastrophisme. « Lundi, l’eau était tellement claire qu’on pouvait voir nos pieds. Cela fait plus de douze ans que je dirige l’association et je n’ai jamais entendu parler d’un adhérent tombé malade. Nous ne mettons pas la tête sous l’eau, le risque est très faible. » Cependant, les encadrants sont beaucoup plus attentifs aux plaies que pourraient présenter leurs pratiquants. « Nous communiquons clairement à tous nos adhérents. Si nous remarquons une blessure, nous pouvons leur interdire d’entrer dans l’eau. Les gens comprennent très bien », assure Christine Guyot.

Certaines plages ont une « réputation » qui peut effrayer. À Landunvez, le club de surf Sweet Spot a souffert des articles de presse dénonçant la pollution régulière de la rivière, mise en avant par des habitants locaux. « Il faudrait diviser les zones. Dans la zone de surf, nous n’avons jamais de problème. Il suffit d’éviter certains secteurs. Mais la communication est trop alarmiste », affirme Grégory Closier, qui dirige l’école. En plus des cours de surf, il a constaté une baisse de fréquentation sur la plage de Penfoul ces dernières années. « Nous avons des personnes qui sont très inquiètes, craignant de tomber malades en touchant l’eau. Il ne faut pas ignorer le problème, mais il est essentiel de rester lucide sur les risques. » Il soutient également l’idée d’une surveillance annuelle de la qualité de l’eau. « Quand il n’y a pas de contrôle, certains font n’importe quoi », résume le surfeur.

Pour protéger et informer la population sur la qualité des eaux de baignade, Eau et rivières de Bretagne préconise de maintenir une surveillance sanitaire tous les ans « pour trois ou quatre plages » par secteur, en ciblant celles les plus fréquentées par les surfeurs et les adeptes du longe-côte. Bien que cette démarche soit sensée, elle implique des coûts. La ville de Douarnenez indique que « maintenir un suivi sur l’année est difficilement envisageable, compte tenu des coûts et de la mobilisation des agents nécessaires ». La municipalité, qui a opté pour des analyses internes en raison « des mauvais résultats bactériologiques récurrents », précise qu’il est impératif de distinguer les différentes zones de la plage. Une zone de baignade, où les résultats sont bons, et une embouchure, où la qualité de l’eau est « régulièrement mauvaise ». Des panneaux d’affichage ont été installés pour alerter la population, déconseillant la baignade dans certaines zones, un minimum nécessaire.