Tunisie

Projet de loi de Finances 2026 : Début du débat

Le projet de loi de finances déposé à l’Assemblée des représentants du peuple le 15 octobre prévoit des recettes de l’État à hauteur de 52,56 milliards de dinars contre des dépenses fixées à 63,375 milliards de dinars, établissant le déficit budgétaire à 11,015 milliards de dinars. L’article 50 introduit un impôt sur la fortune dont le taux sera de 0,5 % pour les patrimoines compris entre 3 et 5 millions de dinars, et de 1 % pour les patrimoines supérieurs à 5 millions, s’appliquant aux biens immobiliers, hors résidence principale, à partir du 1er janvier 2026.

Budget 2026

Augmentations de salaires, impôt sur la fortune, et nouvelles mesures fiscales pour renflouer les caisses sociales… Le projet de loi de finances, déposé à l’Assemblée des représentants du peuple le 15 octobre, suscite un large débat entre partisans d’un budget social et critiques qui le considèrent comme un simple exercice comptable.

La Presse — Intégralement soumis à l’Assemblée des représentants du peuple le mercredi 15 octobre, le projet de loi de finances 2026 provoque déjà de vives discussions. Les opinions se divisent entre ceux qui saluent des mesures sociales audacieuses et ceux dénonçant « une simple feuille de calcul ». Dans tous les cas, l’examen d’un projet de loi de finances soulève toujours des critiques. Les débats au sein des deux chambres parlementaires devraient se poursuivre dans les semaines à venir, pour aboutir à une version finale à adopter avant le 10 décembre de cette année.

Dans son introduction, le PLF 2026 indique que son but est de renforcer le rôle social de l’État, principalement par la réduction du chômage et le soutien à la paix sociale. Il prévoit des augmentations salariales pour les secteurs public et privé ainsi que pour les pensions de retraite sur les années 2026, 2027, et 2028.

Selon le document, l’État continuera d’intervenir dans des secteurs prioritaires comme la santé, le logement, le transport, et l’éducation. L’amélioration des systèmes de sécurité sociale et l’instauration d’un impôt sur la fortune, en respect avec le principe de progressivité de l’impôt, apparaissent aussi comme des éléments majeurs. 

Le PLF 2026 anticipe des recettes pour l’État évaluées à 52,56 milliards de dinars, alors que les dépenses s’élèvent à 63,375 milliards, ce qui pose un déficit budgétaire de 11,015 milliards de dinars. Les ressources de financement sont de 27,064 milliards de dinars, dont 6,808 milliards proviennent de financements extérieurs, 19,056 milliards de financements intérieurs, et 1,2 milliard de ressources de trésorerie à court terme. De plus, le texte permet à la Banque centrale d’accorder des facilités à la Trésorerie générale jusqu’à 11 milliards de dinars.

Mesures sociales

Le projet présente plusieurs mesures visant à stimuler l’emploi et à renforcer la paix sociale. L’article 13 prévoit que l’État prendra en charge la cotisation patronale de sécurité sociale à 100 % durant la première année, 80 % la deuxième, 60 % la troisième, 40 % la quatrième, et 20 % la cinquième année.

Le texte propose également des augmentations salariales pour le secteur public et privé, ainsi que pour les pensions de retraite pour 2026, 2027, et 2028. Ces augmentations seront fixées par décret et visent à améliorer le pouvoir d’achat des citoyens. Par ailleurs, le champ d’intervention du Fonds national pour l’emploi sera élargi pour inclure les chômeurs de longue durée.

Le nombre de fonctionnaires dans l’administration et les entreprises publiques augmentera par rapport à celui autorisé par la loi de finances 2025, atteignant un total de 687 000 agents.

Dans le domaine de la santé, le PLF propose une exonération de la TVA sur les achats locaux d’équipements médicaux nécessaires pour le contrôle des médicaments effectué par l’Agence nationale des médicaments et des produits de la santé. En outre, il envisage de créer un fonds pour les personnes en situation de handicap, financé par un prélèvement de 1 % sur les indemnités remboursées par les compagnies d’assurance lors d’accidents de la route ou du travail.

Mesures en faveur des entreprises publiques

Le PLF 2026 offre également des avantages fiscaux aux entreprises publiques. La Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) bénéficierait d’une exonération des droits de douane et de la TVA sur ses achats, qu’ils soient importés ou locaux. L’article 42 stipule que le ministre des Finances sera autorisé à renoncer aux créances de l’État détenues par l’OCT, y compris les droits de douane et les pénalités de retard pour des opérations d’importation effectuées avant le 1er janvier 2025. De plus, les dettes fiscales de la Société tunisienne du sucre, estimées à plus de 2,757 milliards de dinars, devraient également être annulées.

Principales mesures fiscales

L’article 50 introduit une progressivité pour l’impôt sur la fortune, avec un taux de 0,5 % pour les patrimoines compris entre 3 et 5 millions de dinars, et de 1 % pour ceux supérieurs à 5 millions. Cet impôt, qui entrera en vigueur à partir du 1er janvier 2026, concerne les biens immobiliers, à l’exception de la résidence principale, ainsi que les fonds de commerce exploités et les biens professionnels, y compris les dépôts bancaires et les capitaux financiers.

Il s’appliquera aux personnes physiques, y compris pour les biens détenus au nom de leurs enfants mineurs. Le projet prévoit également de renforcer la digitalisation de l’administration fiscale, notamment à travers l’élargissement de l’utilisation de la facture électronique. Le PLF 2026 comprend, par ailleurs, des mesures fiscales visant à générer des financements supplémentaires pour les caisses sociales.

Ainsi, il prévoit d’augmenter les droits d’enregistrement sur les biens immobiliers et les timbres fiscaux, ainsi qu’un montant additionnel de 100 millimes sur chaque opération de recharge téléphonique, en plus d’une contribution de 4 % sur les bénéfices imposables des banques, des sociétés financières, d’assurances et des opérateurs télécoms, avec un minimum fixé à 10 000 dinars.

Pour accélérer la transition énergétique

Selon le document, l’article 46 stipule que l’État couvrira 3 % de l’écart entre le TMM et le taux d’intérêt appliqué aux prêts destinés aux investissements dans l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables, ainsi qu’aux crédits accordés par la BTS pour l’acquisition de voitures électriques destinées aux taxis et auto-écoles.

Le PLF propose également de réduire les droits de douane à 15 % pour les panneaux photovoltaïques et à 7 % pour les intrants nécessaires à la fabrication de batteries au lithium. Les véhicules hybrides et électriques bénéficieront, quant à eux, d’avantages fiscaux, notamment l’exonération du droit de consommation.

Premières réactions

Comme c’est souvent le cas, la publication du PLF a suscité de vives discussions. L’économiste Aram Belhadj a déclaré dans les médias que ce texte ne diffère fondamentalement pas des précédents, qui n’ont ni augmenté la croissance ni amélioré le pouvoir d’achat. Il a critiqué l’introduction de nouveaux droits de consommation et le recours au financement par la BCT, appelant les députés à modifier ce projet de loi.

De son côté, Issam Chouchen, député et vice-président de la commission des finances à l’ARP, a noté qu’avec un déficit budgétaire en augmentation de 12 %, des recettes fiscales en hausse de 5 %, mais sans mesures concrètes à l’avantage direct des citoyens, ce PLF ne répond pas aux attentes.