« Mes souvenirs d’enfance sont là-bas » : la maison de famille échappe aux critiques.
En France, environ 10 % des habitations sont des résidences secondaires, dont près de la moitié se situent sur les zones littorales. En Bretagne, près de la moitié des propriétaires de résidences secondaires sont des Bretons.
En France, environ 10 % des logements sont des résidences secondaires, dont près de la moitié se trouvent sur des zones côtières. Dans les communes où le pourcentage de résidences secondaires dépasse 80 %, de nombreux volets restent fermés une grande partie de l’année. Cette situation est bien établie en Bretagne, en Normandie ou dans le Pays basque, mais elle touche également des régions plus rurales comme le Lot ou la Dordogne.
Lorsque certaines personnes rencontrent des difficultés pour se loger alors que d’autres possèdent plusieurs maisons, les critiques peuvent être acerbes. Cependant, il semblerait que les maisons de famille échappent à cette critique. Souvent, elles ne sont pas bien isolées, plutôt conçues pour l’été et peu adaptées à une occupation annuelle. Cela pourrait expliquer pourquoi elles sont moins visées par la contestation concernant les résidences secondaires, même si ce n’est pas la seule raison.
Pour beaucoup, ces petites maisons représentent bien plus qu’un simple logement. Pour ceux qui ont la chance d’y passer du temps, elles sont le siège de souvenirs précieux, souvent d’enfance. Ces lieux sont parfois des points de rassemblement familial qui rassemblent des générations. Un témoignage de Nicolas illustre cela : « Quand j’étais petit, mes parents n’avaient pas beaucoup de moyens pour nous emmener en vacances. Je passais mes étés avec ma sœur dans la maison secondaire de mes grands-parents. C’est là-bas que j’ai appris à faire du bateau, à pêcher. Il y avait d’autres enfants comme moi autour, on faisait du vélo, on jouait. J’en garde énormément de bons souvenirs, c’est un endroit formidable. »
Il y a quelques années, Nicolas a décidé avec sa mère de racheter la maison de son grand-père à Moëlan-sur-Mer, dans le Sud Finistère. « Ma mère hésitait. Je lui ai dit que j’avais envie que mes enfants viennent ici en vacances, comme moi je l’avais fait quand j’étais petit. » Bien qu’il n’était pas encore père à l’époque, depuis la naissance de son aîné, il a vu se reproduire la même histoire. « Il va là-bas avec mes parents l’été. Ensuite, on se retrouve tous, mon grand-père vient. On mange ensemble. C’est devenu un petit rituel. » D’autres familles à travers le pays vivent des situations similaires. « C’est fascinant de voir l’attachement qu’ont les gens. Certains sont plus liés à leur petite maison au bord de mer qu’à leur résidence principale. Peut-être parce qu’ils gardent seulement les souvenirs agréables de l’été », explique Benjamin Keltz.
L’auteur du livre *Bretagne secondaire* a exploré cette problématique des communes aux volets clos. « C’est facile de taper sur les spéculateurs qui ont investi pour en tirer profit. Mais en réalité, beaucoup de résidences secondaires appartiennent à des habitants locaux. Des Rennais achètent à Saint-Malo, des Quimpérois à Penmarc’h. À une époque, avoir un pied-à-terre ailleurs était considéré comme un accomplissement culturel. Mais la société a changé et la question du logement est devenue tendue », poursuit l’auteur.
Ces maisons, souvent héritées, peuvent entraîner des tensions familiales intenses lors de leur transmission. « J’ai vu des gens tirer à pile ou face pour savoir qui garderait le bien », confie Nicolas Bosquet. Pour le porte-parole de la chambre des notaires de la cour d’appel de Rennes, ces résidences sont avant tout des lieux de retrouvailles. « On entend parfois parler d’un envahissement parisien. En réalité, ceux qui souhaitent acheter ont souvent des liens avec la région. Beaucoup de personnes achètent vers 50 ans, anticipant leur retraite. Ils ont généralement de la famille locale ou se souviennent d’y avoir passé leurs vacances dans leur enfance. Ils aspirent à y retourner, à accueillir leurs petits-enfants », raconte le notaire basé à Binic-Etables-sur-Mer (Côtes-d’Armor).
Un doux rêve partagé par de nombreux Français consiste à envisager des journées paisibles à la campagne, près de la mer ou à la montagne une fois le travail terminé. « Ce sont souvent des maisons ouvertes le week-end, utilisées quatre, cinq ou six mois par an. C’est un sujet délicat, car cela contribue à l’économie locale, mais cela complique l’accès au logement pour ceux qui souhaitent y vivre à l’année », ajoute Benjamin Keltz.
« Je ne nie pas la problématique, surtout que ce type de clientèle peut faire grimper les prix. Il est anormal qu’un couple travaillant n’ait pas les moyens d’acheter. Toutefois, les résidences secondaires apportent beaucoup à nos territoires, en les vivant régulièrement. Souvent, elles deviendront leur résidence principale à la retraite », conclut le notaire des Côtes-d’Armor, tout en précisant : « Ils ne sont pas responsables de la crise du logement. »

