Maria Corina Machado, symbole de l’opposition au Venezuela
Maria Corina Machado, cheffe de l’opposition au Venezuela, vit dans la clandestinité depuis la présidentielle contestée de juillet 2024. Le président Nicolas Maduro, au pouvoir depuis 2013, a été proclamé vainqueur par l’autorité électorale, mais l’opposition revendique la victoire pour son candidat, Edmundo Gonzalez Urrutia.
Récompensée par le prix Nobel de la Paix, Maria Corina Machado, la cheffe de l’opposition au Venezuela, 58 ans, surnommée la « libératrice » par ses partisans, vit dans la clandestinité depuis la présidentielle contestée de juillet 2024, mais demeure l’âme de l’opposition vénézuélienne. « Très juste reconnaissance pour la longue lutte d’une femme et de tout un peuple pour notre liberté et notre démocratie », a déclaré le candidat de l’opposition à la présidentielle, Edmundo Gonzalez Urrutia. Bien que le président Nicolas Maduro, au pouvoir depuis 2013, ait été proclamé vainqueur par l’autorité électorale considérée comme étant sous contrôle, l’opposition conteste cette victoire pour son candidat.
Machado, déclarée inéligible, n’a pas pu se présenter, mais a dirigé la campagne pour un candidat alors peu connu, parvenant à rassembler des foules. Elle a demandé à ses partisans de recueillir les procès-verbaux de chaque bureau de vote pour « prouver » la victoire de l’opposition. Le gouvernement vénézuélien, qui n’a pas encore publié les résultats complets du scrutin, a sévèrement réprimé les troubles post-électoraux et intensifié la répression politique selon une mission d’experts de l’ONU.
Machado a choisi de rester dans son pays, tandis que M. Gonzalez Urrutia, ciblé par un mandat d’arrêt et harcelé verbalement par le pouvoir, a dû s’exiler en septembre. Fin septembre 2024, lors d’un entretien avec l’AFP, elle a expliqué vivre parfois « des semaines sans contact humain » : « Je suis là où je me sens le plus utile pour la lutte ». Réfugiée à un endroit secret, elle continue d’affronter la situation. « Si quelque chose m’arrive, la consigne est très claire (…), personne ne négociera la liberté du Venezuela contre ma liberté », a-t-elle déclaré lors d’une interview par appel vidéo avec l’AFP. Depuis la présidentielle, elle donne des interviews virtuelles et participe à des débats en ligne, choisissant toujours un fond neutre pour éviter d’être identifiée.
La notoriété de Mme Machado a explosé lors des primaires de l’opposition en octobre 2023 où elle a recueilli plus de 90% des voix, avec 3 millions de participants, démontrant une forte mobilisation. Elle est rapidement devenue la favorite des sondages, étant surnommée la « libertadora », en référence au « libertador » Simon Bolivar.
Réputée pour sa franchise, des traits de personnalité qui, selon les experts, ont contribué à sa popularité, Mme Machado ne cessait de répéter le slogan de sa campagne : « Jusqu’au bout ». Bien que son nom ne figurait pas sur les bulletins, son visage et son engagement incarnaient l’opposition. Elle a parcouru le pays en voiture, en raison de son interdiction de vol, suscitant cris, pleurs et bousculades à chaque apparition. Mme Machado promettait alors un « changement » pour le Venezuela, dirigé depuis 1999 par le président Hugo Chavez, puis par son héritier Nicolas Maduro.
Ce dernier a été proclamé vainqueur de la dernière présidentielle avec 52% des voix selon le Conseil national électoral, jugé proche du pouvoir. Les résultats détaillés des votes n’ont pas été publiés, le gouvernement évoquant un piratage informatique. L’opposition, qui a diffusé des procès-verbaux des bureaux de vote, affirme que M. Gonzalez Urrutia a remporté les élections avec plus de 67% des voix, tandis que le pouvoir qualifie ces procès-verbaux de « faux ».
C’est Mme Machado qui avait incité ses partisans à organiser la collecte des procès-verbaux, ce qui lui a apporté un fort soutien international, les États-Unis, l’Europe et de nombreux pays d’Amérique latine ne reconnaissant pas la réélection de M. Maduro. Couronnée du prix Sakharov en 2024, Mme Machado avait déclaré qu’il s’agissait d’une « reconnaissance pour chaque prisonnier politique, demandeur d’asile, exilé et chaque citoyen de notre pays qui se bat pour ce qu’il pense ».
Libérale, elle plaide pour une économie de marché et a proposé de privatiser le géant public pétrolier Petroleos de Venezuela (PDVSA), qui constitue la principale source de revenus du pays, dont la production a chuté en raison de la mauvaise gestion et de la corruption. « Nous allons libérer notre pays et ramener nos enfants à la maison », affirmait-elle en référence aux 7 millions de Vénézuéliens qui, selon l’ONU, ont fui le pays en proie à une crise économique prolongée.
La perspective d’accueillir la diaspora touche particulièrement Mme Machado, car ses trois enfants – Ana Corina, Henrique et Ricardo – vivent à l’étranger. Ingénieure de profession, elle a entamé sa carrière politique en 2002 par la création de l’association Sumate, qui appelait à un référendum pour révoquer le président Chavez.
Accusée de trahison en raison des financements en provenance des États-Unis pour Sumate et recevant des menaces de mort, elle avait alors envoyé ses enfants, alors en bas âge, vivre aux États-Unis, mais elle jure régulièrement, comme son slogan de campagne, qu’elle ira « jusqu’au bout ». Soutenant le déploiement de navires de guerre américains dans les Caraïbes, elle a récemment déclaré sur les réseaux sociaux : « Il ne nous reste que très peu de temps avant que les Vénézuéliens ne récupèrent leur souveraineté et leur démocratie. Nous sommes prêts à prendre les rênes du nouveau gouvernement ».

