Manifestation nationale : Thierry Bodson (FGTB) souligne la conscience des travailleurs face aux mesures négatives.
Le président de la FGTB, Thierry Bodson, affirme que « le temps joue pour nous » en faisant référence à la déclaration de politique générale présentée hier par le gouvernement fédéral. Selon le rapport du SPF Pensions, 66% des personnes qui prendront une retraite anticipée ne connaîtront pas d’impact, tandis que 33% auront un impact majeur sur leur retraite.
La manifestation nationale sert-elle de test pour le front commun syndical ? Selon Thierry Bodson, le nombre de participants est déjà un succès : « Je pense que l’on va atteindre la jauge des 100.000 (personnes) aujourd’hui », a-t-il déclaré ce mardi matin.
De son côté, le gouvernement fédéral affirme qu’il continuera à mettre en œuvre ses réformes. Face à cela, comment la mobilisation pourrait-elle influencer la situation ? « Nous, nous pensons que le gouvernement n’est pas aussi solide qu’il y paraît », a analysé le président de la FGTB. Il a cité à titre d’exemple la déclaration de politique générale présentée hier par le gouvernement et les discussions en cours sur le budget 2026, en concluant que « le temps joue pour nous, on le voit avec l’accord d’été ».
Il a également précisé : « Les mesures maintenant tombent de façon assez précise. Les mobilisations, les grèves et les manifestations que nous menons nous permettent d’expliquer aux gens, exemple après exemple, en quoi ils seront durement touchés financièrement par les mesures qui sont prises. »
Le mouvement est donc appelé à perdurer. « Le mouvement va durer, parce que je pense qu’aujourd’hui, de plus en plus de travailleurs prennent conscience qu’ils n’échapperont pas à au moins une partie des mesures négatives. »
### Revalorisation du travail
La revalorisation du travail et le pouvoir d’achat des travailleurs constituent l’axe principal des divers gouvernements. Que contestent donc les syndicats ? Pour Thierry Bodson, « il n’y a pas de revalorisation du travail, c’est totalement faux ».
Il cite plusieurs exemples : « Si vous travaillez la nuit ou en équipe, vous allez perdre de l’argent. Si vous travaillez dans la fonction publique, vous allez perdre de l’argent. Si vous êtes pensionné, c’est le SPF Pensions qui l’a dit : un tiers des pensionnés va perdre quelque chose de l’ordre de 300 euros… ».
Concernant le travail de nuit, il précise que la mesure ne s’applique qu’aux nouveaux contrats et non aux nouveaux travailleurs. « Il y a une grande nuance. » Il explique que ce qui est aujourd’hui en discussion est de savoir si un salarié travaillant de nuit avec un avenant sera considéré comme un nouveau contrat ou non. Cette mesure ne concerne que certains secteurs (commerce et logistique), comme le souligne le fait qu’une infirmière n’en est pas touchée.
À propos des pensions, le rapport du SPF Pensions mentionne des moyennes. 66 % des personnes prenant une retraite anticipée ne seront pas affectées. Thierry Bodson souhaite ajouter des nuances, expliquant que 33 % des personnes subiront un impact majeur sur leur retraite, et pour 70 % « on n’est pas certain qu’il y aura un impact ». « Et c’est vrai qu’à l’intérieur de ces 70 %, il n’y aura pas d’impact pour une partie et il y aura un impact minime pour une autre partie. »
Sur les tracts, les syndicats indiquent que 318 euros sont en moyenne perdus par les 30 % de pensionnés affectés. Thierry Bodson précise que parmi ces 30 %, trois quarts sont des femmes. « Et ce qui ne va pas, c’est que ce sont les femmes qui sont la cible et qu’on ne peut pas les punir deux ou trois fois ». Cela signifie les punir parce qu’il n’y a pas de garderie, parce qu’elles travaillent à temps partiel et parce qu’elles auront une pension moins importante.
### La difficulté d’y voir clair
Les nuances sont importantes. Les parcours de vie ne sont pas les mêmes pour tous, ce qui rend la situation difficile à appréhender. Thierry Bodson le reconnaît mais ajoute qu’il existe toutefois une constante : « si vous avez eu la chance durant votre carrière de travailler à temps plein, sans jamais avoir de problème et travailler au moins 42 ans, dans ce cas, il y aura peu ou pas de pertes. Mais dès que vous avez rencontré un gros problème de santé ou que vous avez travaillé à temps partiel, comme près de la moitié des femmes, vous subirez un impact négatif avec la réforme. »
### Le pouvoir d’achat
Concernant le pouvoir d’achat, la FGTB indique sur ses tracts que le « salaire (brut) restera bloqué les prochaines années ». Bien que la norme salariale ne soit pas modifiée, le gouvernement fédéral promet une revalorisation fiscale via la réforme fiscale. Ce point a été évoqué par le président du MR, Georges-Louis Bouchez, qui déclarait en juin dernier : « Tout travailleur aura, minimum, avec la baisse de la fiscalité, 120 euros de plus ».
Thierry Bodson souhaite donner des exemples pour illustrer le blocage salarial, mais aussi montrer que ce qui est distribué d’un côté sera repris de l’autre. Selon lui, la promesse d’augmentation du pouvoir d’achat pour les plus bas salaires équivaut à remplacer une mesure par une autre. En résumé, le salaire minimum devait augmenter en avril 2026, cela ne sera pas le cas « comme c’était prévu dans l’accord interprofessionnel ». Le gouvernement, de son côté, répond que « grâce à la réforme fiscale, le salaire minimum va finir par augmenter ».
De plus, il explique que le gouvernement n’est pas en mesure de proposer un budget équilibré. « La réforme qui va permettre d’augmenter le salaire net de 120 euros par mois coûtera entre 4 et 5 milliards. Je parie que dans 2 ou 3 ans, ils reviendront vers nous en disant ‘on va faire une partie du chemin, mais pas tout parce que ça coûte trop cher' ».
En outre, Thierry Bodson attire l’attention sur la promesse d’obtenir 100 à 120 euros supplémentaires d’ici 2029. « Les 5 milliards, il va falloir les trouver pour la réforme fiscale, mais en attendant, il y a déjà toute une série de mesures prises (travail de nuit et autres) qui diminuent le pouvoir d’achat ».
### La réforme des pensions est celle qui mobilise le plus
Lorsque l’on interroge le président de la FGTB sur la mesure sur laquelle il souhaite principalement faire pression sur le gouvernement fédéral, il répond : « Ce qui mobilise très fort aujourd’hui, ce sont les pensions ». Cela implique deux niveaux de préoccupation : « d’une part la perte de revenu éventuel, mais aussi l’insécurité qui est créée ».
Il déclare : « Le gros problème de la réforme, c’est que l’on change les règles du jeu en remontant 40 ans en arrière […] Ça crée un vrai problème par rapport à la confiance que les citoyens peuvent avoir dans un État qui change les règles du jeu en rétroagissant ».

