France : un Premier ministre fragilisé dans la formation d’un gouvernement
Le président de la République Emmanuel Macron a reconduit vendredi Sébastien Lecornu à Matignon, alors que ce dernier avait annoncé sa démission lundi dernier. Le Parti socialiste a déclaré qu’il censurerait le gouvernement si aucune confirmation n’était faite concernant l’abandon du 49-3 et des mesures pour protéger le pouvoir d’achat des Français.
Contre l’avis général, le président de la République, Emmanuel Macron, a reconduit vendredi son fidèle lieutenant à Matignon.
« J’ai démissionné lundi dernier parce que les conditions n’étaient plus remplies. Si elles n’étaient plus remplies de nouveau, je partirai, je ne ferai pas n’importe quoi », a promis le Premier ministre dans une interview à La Tribune dimanche, annonçant la formation d’un nouveau gouvernement lundi ou mardi et une déclaration de politique générale mardi ou mercredi.
La tâche s’annonce particulièrement difficile.
Réuni en bureau politique, le parti Les Républicains, jusqu’alors membre de la fragile coalition au pouvoir depuis la dissolution de l’Assemblée nationale à l’été 2024, a décidé samedi de quitter le gouvernement tout en promettant un « soutien texte par texte » à l’exécutif.
Le président du Sénat, Gérard Larcher, a expliqué lors d’une réunion avec les parlementaires LR que le PS « va faire du chantage à la censure et le prochain gouvernement devra renoncer à tout : le sérieux budgétaire, le régalien, la défense du travail ». Il a également exprimé son opposition à toute participation gouvernementale, à l’instar de Bruno Retailleau, qui a confirmé qu’il ne resterait pas au ministère de l’Intérieur. Sébastien Lecornu a affirmé « respecter » cette décision.
La pression s’est intensifiée sur Sébastien Lecornu, cible de promesses de censure de La France insoumise, des Écologistes, des communistes, ainsi que du Rassemblement national et de son allié Éric Ciotti.
Rappelant qu’il n’avait « pas d’autre ambition » que de permettre l’adoption d’un budget et « pas d’agenda » personnel, il a souhaité, lors de son premier déplacement samedi dans un commissariat, que son gouvernement soit « libre » et inclue des personnalités « pas emprisonnées par les partis ».
« Je n’ai pas le sentiment qu’il y avait beaucoup de candidats, pour être complètement transparent », a-t-il ironisé face aux critiques à sa reconduction à Matignon.
À l’issue d’une semaine tumultueuse débutée par sa démission et celle de son premier gouvernement, qui n’a duré que 14 heures, l’équipe de Sébastien Lecornu est attendue avec impatience alors que le temps presse pour présenter au Parlement un projet de budget, lequel doit bénéficier des 70 jours requis par la Constitution pour son examen avant le 31 décembre.
Le texte devrait être transmis au début de la semaine au Parlement, après un passage en Conseil des ministres.
Il est peu probable que cela se fasse lundi, Emmanuel Macron ayant annoncé qu’il se rendrait en Égypte pour soutenir le plan de Donald Trump visant à mettre fin à la guerre à Gaza.
Sébastien Lecornu a prévenu que le futur gouvernement devrait « incarner le renouvellement et la diversité des compétences », demandant aux futurs ministres de « s’engager à se déconnecter des ambitions présidentielles pour 2027 ».
Au sein du camp présidentiel, le désarroi a prévalu ces derniers jours, tandis qu’une reconduction de Sébastien Lecornu se profilait. Cependant, samedi, Gabriel Attal, chef du parti macroniste Renaissance, a affirmé que « le seul enjeu qui vaille désormais, c’est de doter la France d’un budget ».
Le parti Horizons de l’ex-Premier ministre Édouard Philippe, également réuni samedi, envisage pour la première fois un soutien sans participation au gouvernement, à condition que ce dernier touche au « cœur » de la réforme des retraites de 2023.
Or, le Premier ministre a rappelé que, concernant cette réforme, « tous les débats sont possibles, dès lors qu’ils sont dans un cadre réel et réaliste, y compris sur les questions budgétaires ».
Le Parti socialiste, que l’exécutif voudrait convaincre d’un accord de non-censure, attend la déclaration de politique générale du Premier ministre prévue la semaine prochaine.
Cependant, il a averti qu’en l’absence d’une confirmation « de l’abandon du 49-3, des mesures pour protéger et renforcer le pouvoir d’achat des Français et une suspension immédiate et complète de la réforme des retraites, nous le censurerons ».
Concernant Lecornu 2, la cheffe des députés écologistes, Cyrielle Chatelain, a déclaré : « C’est pire qu’une provocation, ça a vraiment un côté de négation totale des votes. Finalement, il (Macron) dit un peu aux Français : + je vous emmerde, je fais ce que je veux + ».
« Un nouveau bras d’honneur aux Français d’un irresponsable ivre de son pouvoir », a commenté Manuel Bompard, coordinateur de LFI, annonçant que son mouvement déposerait aussi « une nouvelle motion de destitution du président de la République ».
Dans un registre similaire, Jordan Bardella, président du Rassemblement national, a déclaré que son parti « censurera bien sûr immédiatement cet attelage sans avenir », dénonçant « une mauvaise plaisanterie ».

