France

Que deviennent les dizaines de tonnes d’obus déterrés chaque année ?

Un homme de 70 ans est mort jeudi près de Cambrai dans l’explosion d’une tête d’obus de la Seconde Guerre mondiale qu’il manipulait dans son garage. Selon un chef d’équipe du centre de déminage d’Arras, « ils arrêtent de travailler autour, nous contactent et nous envoient une photo qui nous permet de déterminer le caractère d’urgence ».


Jeudi, près de Cambrai dans le Nord, un homme de 70 ans a perdu la vie suite à l’explosion d’une tête d’obus de la Seconde Guerre mondiale qu’il manipulait dans son garage. Ce drame est très rare dans cette région, où le sous-sol est rempli de munitions non explosées, datant parfois de bien avant le XXe siècle. Ces vestiges sont à la fois dangereux et encombrants, et leur gestion est confiée aux équipes de la Sécurité civile du centre de déminage d’Arras.

« D’habitude, les gens d’ici savent ce qu’il faut faire lorsqu’ils trouvent une munition », déclare à *20 Minutes* un responsable d’équipe du centre de déminage qui souhaite rester anonyme. « L’homme qui est décédé n’était pas un collectionneur, il a probablement tenté de découper la tête de l’obus pour récupérer le laiton, et cela a explosé », ajoute-t-il. Il existe pourtant des procédures à suivre lors de la découverte d’une munition.

Les ouvriers du bâtiment et les agriculteurs sont souvent concernés, « à hauteur de plusieurs dizaines de tonnes de munitions par an », indique le démineur. Ces professionnels connaissent la procédure : « Ils cessent de travailler autour, nous contactent et nous envoient une photo qui nous aide à évaluer l’urgence », précise-t-il. Selon la nature de la munition et son état, la Sécurité civile peut intervenir immédiatement ou recommander de sécuriser le site jusqu’à une intervention planifiée dans les jours suivants.

La procédure habituelle consiste à contacter la mairie pour fournir les détails nécessaires, comme une photo et la localisation exacte de l’engin. La mairie transmet ensuite l’information à la préfecture, qui safournit aux services de déminage. Selon le responsable d’équipe, plusieurs options s’offrent aux démineurs : « Soit la munition est trop sensible pour être déplacée, et nous devons la traiter sur place, soit nous pouvons la transporter en toute sécurité. » Les munitions pouvant être déplacées sont alors envoyées au centre de stockage de Vimy, le plus grand de France, et sont conditionnées en caisses.

Cependant, ce n’est pas au centre de Vimy qu’elles seront détruites en grande quantité. « À Vimy, nous pouvons détruire des munitions isolées ou en petites quantités », précise le démineur. Compte tenu du nombre d’obus découverts chaque année, des convois vers des centres spécialisés, « à Sissonne ou à Cléry », sont régulièrement organisés pour procéder à des destructions massives.

Il est particulièrement complexe d’estimer le nombre d’obus encore enfouis sous les pieds des habitants des Hauts-de-France. « En fonction du tonnage que nous traitons chaque année, nous savons qu’il nous reste environ 300 ou 400 ans de travail », évalue le responsable d’équipe. En tenant compte des munitions tirées et non explosées, des munitions partiellement explosées et des stocks enfouis, si le rythme de 100 tonnes de munitions découvertes par an se maintient, plus de 40.000 tonnes d’obus pourraient encore être enterrées.

De plus, cela n’inclut pas les munitions régulièrement retrouvées sous le sable des plages ou en mer. Le traitement de ces munitions, comme les mines marines et les bombes aériennes, est pris en charge par la marine nationale. Pour l’année 2024, les plongeurs démineurs de la marine ont déjà détruit 200 engins, représentant « 8.346 kg d’équivalent TNT », d’après la préfecture maritime.