Tennis : Arthur Rinderknech, du « burn-out » à « l’histoire de rêve » en trois mois
Arthur Rinderknech s’est qualifié pour les demi-finales du Masters 1000 de Shanghai, où il a éliminé quatre têtes de série, dont trois top 20. Après cette semaine en Chine, il passera au minimum 37e à l’ATP, et pourrait affronter en finale son cousin Valentin Vacherot, classé au-delà de la 200e place mondiale avant le tournoi.

Bien que l’arbre généalogique d’Arthur Rinderknech n’ait pas été étudié, il ne serait pas surprenant de découvrir que ses ancêtres, au 18e siècle, aient été responsables de la décapitation de quelques têtes couronnées. Le Breton est en tout cas en train d’assurer brillamment sa relève. Au Masters 1000 de Shanghai (Chine), où il s’est qualifié pour les demi-finales ce vendredi, le Français a déjà éliminé quatre têtes de série, dont trois du top 20 : Alexander Zverev, Jiri Lehecka et Félix Auger-Aliassime.
En quart de finale, le premier à ce niveau pour Rinderknech, le Canadien a été la dernière victime de sa guillotine française. Un score de 6-3, 6-4, avec seulement 8 fautes directes, et 5 points consécutifs pour revenir d’un 0-40 sur son service comme seule frayeur… Un match bien mené, à la surprise de son père, abasourdi par les performances de son fils.
« Il a eu un petit burn-out »
« Il n’y a vraiment aucune explication, aucune explication rationnelle, raconte Pascal Rinderknech. Là, j’avoue que je suis quand même bluffé. Il y a cinq mois, il était dans un trou noir, il a même dit deux ou trois fois qu’il pensait peut-être arrêter sa carrière. Bon, peut-être pas en le pensant vraiment, mais quand on commence à le dire, ce n’est jamais bon signe. C’est un joueur sérieux, qui s’entraîne toujours à fond. Donc, à un moment, on peut dire que ça doit payer. Mais pourquoi ça ne payait pas en janvier, février, mars, avril, voire début mai ? »
Ça ne payait tellement pas que le trentenaire a fini par mettre la raquette de côté pendant plus de treize jours après le tournoi de Rome en mai, reconnaissant un « petit burn-out ». Il en a profité pour préparer son mariage, qui serait pour beaucoup une des raisons de son renouveau, avant de retrouver progressivement les courts de tennis, avec Tanguy Crestel, un préparateur physique qui l’avait accompagné durant plusieurs années :
« On s’est revus sur une petite séance de karting pour s’amuser, pour prendre du plaisir. Ça s’est refait un peu naturellement, l’envie de repartir avec des gens qu’on aime. On s’est vus un peu tous les jours sur la semaine pour ne serait-ce que repasser du temps ensemble, faire quelques séances. Après, il est reparti sur le circuit pour pouvoir retaper, rematcher et surtout reprendre le plaisir. Je pense que cette période-là lui a fait du bien. »
L’arrivée de Lucas Pouille, le vrai déclic
Arthur Rinderknech arrive alors à Roland-Garros sans pression face à Jannik Sinner, le n°1 mondial. Même s’il s’incline en trois sets, le Français parvient à bousculer par moments l’Italien et apparaît surtout comme transcendé comme jamais sur le court. « Lui, il est plutôt introverti, il ne montre rien. Et là, il n’a pas eu la même attitude, il a eu l’impression de s’amuser, se souvient Pascal. Il a fait des points incroyables, il a rigolé, il a joué avec le public. »
La fin de Roland-Garros marque également un tournant avec l’arrivée de Lucas Pouille comme entraîneur. Pour son père et le préparateur physique, le Nordiste a été un réel atout pour le joueur, alors classé 70e mondial. Les résultats de cette collaboration sont rapidement visibles. Shapovalov est mis hors jeu à Stuttgart, Shelton est éliminé à Majorque, avant que Zverev ne tombe également face à ce nouveau Rinderknech dès le premier tour de Wimbledon.
« Je pense que Lucas lui apporte beaucoup de sérénité, de confiance aussi au vu de son expérience, analyse Tanguy Crestel. La saison sur gazon a tout déclenché. Il jouait déjà bien, mais là, il le fait encore mieux et avec plus de confiance. Il est plus agressif et donc plus dangereux face à des joueurs du top 20. » « Lucas lui a montré quelle attitude il fallait avoir pour battre des très forts joueurs, ajoute le père. Et ça, je pense qu’à la limite, ça a peut-être plus joué que le mariage. »
Une finale en famille à Shanghai ?
Derrière le 70e rang mondial, Arthur Rinderknech va passer au moins 37e à l’ATP après cette semaine incroyable en Chine, où il pourrait retrouver en finale Valentin Vacherot… son cousin, pourtant classé au-delà de la 200e place mondiale avant le tournoi. « C’est tout juste incroyable, hallucinant, une histoire de rêve, sourit Pascal Rinderknech. Je ne sais pas, j’aurais dû jouer au Loto, il y avait une chance sur un milliard que dans un tel tournoi, cela se passe ainsi. Valentin n’aurait jamais dû participer et Arthur n’a jamais passé plus de deux ou trois tours dans un Masters 1000. Et maintenant, ils sont tous deux en demi-finale, sans s’être affrontés auparavant. »
Proches depuis toujours, « plus que de simples cousins », selon Pascal, les deux joueurs ont même passé deux ans ensemble dans une université au Texas. À Shanghai, ils s’entraînent ensemble et assistent aux matchs de l’autre. « J’ai tellement stressé en le regardant jouer dans la box, a commenté Arthur après son quart de finale. J’essayais de rien montrer pour ne pas lui donner cette impression de stress. C’était plus simple pour moi d’être sur le court. »
Selon Tanguy Crestel, la présence du petit cousin inciterait Arthur Rinderknech à aller encore plus loin. « L’effet famille, ça aide beaucoup, assure le préparateur physique. Je pense qu’il y a une émulation, ils se tirent un peu la bourre tous les deux pour aller le plus loin possible. Et c’est ce qui se passe actuellement. Il prend vraiment beaucoup de plaisir, car il y a une belle ambiance. »
Cette ambiance sera encore plus festive si les deux parviennent à se qualifier en finale, bien que Valentin Vacherot doive affronter Novak Djokovic. Resté en France, Pascal s’interdit de consulter le prix des billets d’avion pour rejoindre Shanghai avant une éventuelle finale. Mais ce serait dommage de manquer une belle fête de famille. On pourrait l’ajouter sur l’arbre généalogique.

