France

Robert Badinter au Panthéon : derniers condamnés à mort, Ranucci, Djandoubi…

Robert Badinter, qui fait son entrée au Panthéon ce jeudi, a été le grand artisan de l’abolition de la peine de mort en France. Hamida Djandoubi a été le dernier à subir le couperet de la guillotine le 10 septembre 1977, reconnu coupable du viol, de la torture et du meurtre de son ex-compagne, Élisabeth Bousquet.


Eux, Robert Badinter n’a pas pu les sauver. Ce jeudi, il fait son entrée au Panthéon, ayant été l’un des principaux acteurs de l’abolition de la peine de mort en France. Toutefois, avant le 9 octobre 1981, plusieurs condamnés à la peine capitale ont perdu la vie. Qui étaient-ils ?

**Christian Ranucci, malgré les doutes**

Le nom de Christian Ranucci est familier à ceux qui s’intéressent aux affaires judiciaires notoires. Guillotiné à la prison des Baumettes à Marseille le 28 juillet 1976, Ranucci a depuis été sujet à de nombreuses émissions de télévision, films et un livre. *Le Pull-over rouge*, écrit par Gilles Perrault, évoque l’enquête ayant conduit à sa condamnation, en suggérant une possible erreur judiciaire. Ces arguments ont été rejetés par le système judiciaire, qui a toujours refusé de réexaminer son procès. L’accusation s’est appuyée sur les aveux de Ranucci, qui avait reconnu avoir tué Marie-Dolorès Rambla, une enfant de huit ans, au printemps 1974. Le corps de l’enfant avait été découvert mutilé et frappé à la tête, près de Marseille. Christian Ranucci, âgé de 20 ans à l’époque, avait ensuite nié toute responsabilité en matière d’enlèvement et de meurtre lors de son procès, sans succès. Il avait été condamné à mort tant par la cour d’assises des Bouches-du-Rhône que par la Cour de cassation, la grâce demandée auprès du président de la République, Valéry Giscard d’Estaing, étant refusée. En 2010 sur France 2, l’ancien président avait réaffirmé sa position : « Je ne regrette pas ma décision, parce qu’à la lecture des dossiers […] et des procès qui avaient eu lieu, il était coupable. »

**Hamida Djandoubi, le dernier à avoir subi la peine de mort**

Quatre ans environ avant l’abolition de la peine de mort, Hamida Djandoubi a été le dernier à être guillotiné, le 10 septembre 1977, à Marseille. Né à Tunis, il a été reconnu coupable du viol, de la torture et du meurtre de son ex-compagne, Élisabeth Bousquet. En 1973, elle l’avait dénoncé pour lui avoir forcé des relations sexuelles tarifées avec d’autres hommes. Libéré après une peine pour proxénétisme, il l’avait retrouvée pour se venger, la soumettant à une nuit de supplice sous les yeux de deux jeunes filles qu’il prostituait, avant de l’achever dans un cabanon à environ quarante kilomètres de Marseille. L’une des adolescentes présentes avait témoigné, menant à la condamnation de Djandoubi à la peine de mort en 1977. À cette époque, le débat sur l’abolition de la peine de mort était déjà vif, soutenu par Robert Badinter, mais François Mitterrand n’était pas encore au pouvoir.

**Carrein, Benyanès, Bontemps, des cas rares**

Avant 1981, les exécutions étaient relativement rares en France, notamment depuis la seconde moitié du XXe siècle. Pendant les présidences de Georges Pompidou et Valéry Giscard d’Estaing, six hommes ont été exécutés. Parmi eux, Ranucci, Djandoubi mais aussi Claude Buffet et Roger Bontems en 1972, Ali Benyanès en 1973, et enfin Jérôme Carrein en 1977. En revanche, au 15 juillet dernier, les États-Unis avaient déjà pratiqué 26 exécutions par injection létale depuis le début de l’année, avec plus de trente de prévues en 2025. En 2024, plus de 1.500 personnes avaient été exécutées dans les quinze pays qui continuent d’appliquer la peine de mort, selon Amnesty International, estimations incomplètes compte tenu de l’absence de données provenant de la Chine, de la Corée du Nord et du Viêt Nam.

**Philippe Maurice, sauvé de justesse**

Philippe Maurice peut remercier Robert Badinter et François Mitterrand. Il a été gracié en 1981 par le président de la République. Quatre jours après son investiture, le 25 mai, le socialiste respectait ainsi l’une de ses promesses de campagne. Moins de cinq mois plus tard, la peine de mort était abolie. Aujourd’hui, Philippe Maurice défend cette avancée à travers le monde, comme il l’a fait récemment devant le Conseil constitutionnel. Condamné pour le meurtre d’un vigile et d’un policier lors d’une fusillade à Paris en 1979, ce sexagénaire aujourd’hui âgé de 69 ans est également devenu historien.