Ursula von der Leyen ne sera pas destituée, Emmanuel Macron à la tête de l’UE ?
Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, doit faire face à une tentative de destitution, avec deux motions de censure soumises au vote du Parlement européen ce jeudi. Depuis 1999, aucune motion de censure n’a jamais été adoptée, malgré une dizaine de tentatives.

D’un côté, un président de la République dont les gouvernements se succèdent dans une instabilité manifeste. De l’autre, une présidente de la Commission européenne affaiblie, confrontée à un nombre croissant de motions de censure, dont deux seront soumises au vote du Parlement européen ce jeudi. Ces éléments ont suscité des spéculations sur les réseaux sociaux.
Certains internautes estiment qu’il est inéluctable qu’Ursula von der Leyen soit destituée, laissant son poste à la présidence de la Commission européenne vacant, une position que, selon eux, Emmanuel Macron convoite, compte tenu des événements récents. Est-ce une hypothèse plausible ou une pure spéculation ?
FAKE OFF
Le 9 octobre, Ursula von der Leyen se trouve confrontée à une nouvelle tentative de destitution, la seconde en quatre mois durant ses six ans de mandat, ayant été reconduite le 18 juillet 2024. Sous le feu des critiques depuis plusieurs mois, elle est accusée d’avoir favorisé Donald Trump en acceptant un accord commercial avec les États-Unis prévoyant 15 % de taxes sur les exportations européennes.
Deux motions de censure ont été déposées début septembre, l’une par l’eurodéputé RN, Jordan Bardella, soutenue par le groupe des Patriotes pour l’Europe qu’il dirige au Parlement européen, et l’autre par la LFI, Manon Aubry, coprésidente du groupe de La Gauche (GUE/NGL).
Cependant, bien que la situation soit exceptionnellement tendue par rapport aux dix dernières années, il est peu probable que la Commission européenne soit renversée. Depuis 1999, une dizaine de tentatives ont été entreprises, mais aucune motion n’a jamais été adoptée jusqu’à présent.
Une présence « plus forte » de l’extrême droite
« C’est pourtant du jamais vu dans l’histoire de l’Union Européenne, souligne Marie Toussaint, eurodéputée écologiste (Les Verts/ALE). Cela se manifeste tant par la rapidité, à peine un an après sa réélection, que par la récurrence, avec ces trois motions de censure depuis juillet ». Pour elle, cette situation est révélatrice d’une « instabilité croissante touchant de nombreux États européens, ainsi qu’un bouleversement politique important ». Tania Racho, docteure et enseignante en droit européen, explique que le timing est également dû à « une présence plus forte et mieux organisée de l’extrême droite au Parlement ».
Pour qu’une motion de censure soit déposée, elle doit être soutenue par au moins un dixième des députés européens, soit 72 sur les 720 membres du Parlement actuel. Ce seuil est atteint plus facilement par le groupe de Jordan Bardella, qui compte 85 eurodéputés, que par celui de Manon Aubry, limité à 46 membres. « Elle devait donc rassembler des signatures d’autres groupes politiques. Cela a nécessité la coopération de nombreux pays, avec des motivations également diverses », précise Marie Toussaint.
Une présidente aux soutiens solides
Si l’une des deux motions de censure venait à être adoptée, cela entraînerait la démission de la Commission européenne, y compris de sa présidente. À l’image de la démission d’un gouvernement en France, les anciens membres continueraient à gérer les affaires courantes jusqu’à la nomination d’une nouvelle Commission.
Néanmoins, ce scénario semble peu probable aujourd’hui. En effet, pour renverser la Commission, une motion de censure doit obtenir deux tiers des votes exprimés, représentant la majorité du Parlement européen. Ce chiffre est difficilement atteignable compte tenu du solide soutien dont bénéficie von der Leyen au sein des centristes. « De nombreuses tractations politiques ont lieu dans le Parlement, et une majorité du groupe PPE (Parti populaire européen) est prête à soutenir sa présidente », explique Tania Racho. « Même si aucune des deux motions n’a de chance de réussir, cela représente un signal fort », ajoute Marie Toussaint.
Le Conseil européen plutôt que le Parlement
La présidente de la Commission, d’origine allemande et de centre-droit, avait déjà échappé à une première tentative de destitution en juillet dernier. La motion de censure déposée par l’eurodéputé roumain d’extrême droite, Gheorghe Piperea, membre du groupe ECR (Conservateurs et réformistes européens), avait été largement rejetée par le Parlement lors d’un vote le 10 juillet.
Quant à la possibilité qu’Emmanuel Macron succède à Ursula von der Leyen, elle est quasiment nulle, car cette dernière a très peu de chances d’être destituée, et le chef de l’État n’a jamais évoqué un tel projet. De plus, même si rien n’impose de s’y opposer d’un point de vue institutionnel, « très souvent, les anciens présidents accèdent plutôt à la présidence du Conseil européen », précise Tania Racho.

