« Sauver nos aciéries » : L’UE ne doit pas esquiver l’augmentation des droits de douane face à la Chine.
En 2024, 18.000 emplois directs ont été supprimés dans la sidérurgie européenne, selon Stéphane Séjourné. Bruxelles prévoit de réduire de 47 % les volumes d’acier étrangers pouvant entrer au sein de l’Union européenne sans droit de douane, suivant ainsi un quota de 18,3 millions de tonnes.
Face à une concurrence chinoise jugée écrasante et déloyale, la Commission européenne a présenté ce mardi un ensemble de mesures inédites pour protéger son industrie sidérurgique : réduction significative des quotas d’importation, doublement des droits de douane et nouvelles obligations de traçabilité. L’objectif est clair : stopper la dérive et sauver une industrie en difficulté.
« En 2024, 18 000 emplois directs ont été supprimés dans la sidérurgie, c’est trop et cela devait cesser », a déclaré le vice-président de la Commission, Stéphane Séjourné, lors de la présentation des mesures à la presse.
Bruxelles prévoit de diminuer de 47 % les volumes d’acier étrangers pouvant entrer dans l’Union européenne sans droit de douane. Ces quotas passeront à 18,3 millions de tonnes, atteignant ainsi le niveau de 2013, avant que la surproduction mondiale, notamment en provenance de Chine, ne perturbe le marché. « Les surcapacités mondiales sont cinq fois plus importantes que la consommation d’acier annuelle de l’UE », a rappelé le commissaire au Commerce, Maros Sefcovic.
Désormais, les importations dépassant ces quotas seront taxées à 50 %, contre 25 % actuellement. Ces niveaux de taxation seront équivalents à ceux appliqués aux États-Unis et au Canada, selon les propositions de la Commission, qui doivent encore être approuvées par les 27 États membres et le Parlement européen. Par ailleurs, il sera désormais exigé des importateurs de déclarer le pays où l’acier a été « fondu et coulé », afin d’éviter que les droits de douane ne soient contournés par des circuits de transformation.
Le plan, décrit par Stéphane Séjourné comme une stratégie pour « sauver » les « aciéries et les emplois européens », remplacera en 2026 la « clause de sauvegarde » instaurée en 2019. « L’industrie sidérurgique européenne était au bord de l’effondrement. Nous la protégerons pour qu’elle puisse investir, décarboner et ainsi redevenir compétitive », a-t-il insisté.
Les industriels voient ces annonces comme un signal crucial. « Au nom de tous les salariés d’ArcelorMittal en Europe, je suis sincèrement soulagé », a réagi Aditya Mittal, le responsable du groupe, remerciant l’UE « d’avoir compris la gravité de la situation et d’avoir agi de manière ferme et appropriée ». L’organisation professionnelle du secteur, Eurofer, a également salué « une bouée de sauvetage pour les sidérurgistes et les ouvriers ».
La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, appelle à présent à accélérer le calendrier. « Nous devons agir maintenant », a-t-elle affirmé, pressant les Vingt-sept et les eurodéputés d’adopter « rapidement » le dispositif.
En parallèle, Bruxelles poursuit ses échanges avec Washington pour obtenir une exemption des droits sur l’acier européen afin de créer un front commun contre Pékin. La Chine demeure, de loin, la principale puissance sidérurgique mondiale, avec plus d’un milliard de tonnes produites en 2024, représentant plus de la moitié de la production mondiale. À titre de comparaison, l’Inde n’a produit que 149 millions de tonnes, le Japon 84 millions, les États-Unis 79 millions et la France moins de 11 millions. L’Allemagne, principal producteur européen, atteint 37 millions de tonnes. Les industriels européens, déjà affaiblis par la hausse des coûts et la pression asiatique, poursuivent les restructurations : Thyssenkrupp envisage de céder sa division acier à l’Indien Jindal Steel, tandis qu’en France, ArcelorMittal vient de supprimer 600 postes et menace de suspendre la décarbonation de ses hauts-fourneaux à Dunkerque.

