Belgique

PFAS : 12 des 24 ministres européens, dont Jean-Luc Crucke, contaminés au-dessus des seuils sanitaires

En juillet dernier, 24 ministres de l’environnement et du climat se sont soumis à un test sanguin afin de détecter la présence de PFAS, et la moitié d’entre eux présentaient une contamination supérieure aux niveaux au-delà desquels des effets sur la santé ne peuvent être exclus. Un rapport du Conseil nordique des ministres de 2019 estime qu’en Europe, les impacts sanitaires de la pollution aux PFAS coûteraient entre 52 et 84 milliards d’euros par an.


En juillet dernier, 24 ministres de l’Environnement et du Climat ont subi un test sanguin pour détecter la présence de PFAS. Les résultats révèlent qu’ils sont tous contaminés par ces « polluants éternels ». La moitié d’entre eux affichait des niveaux de contamination dépassant les seuils au-delà desquels des effets sur la santé ne peuvent être exclus.

Invités par le ministre danois de l’environnement dans le cadre de la présidence tournante de l’Union européenne (UE), ces dirigeants ont souhaité sensibiliser à la pollution engendrée par ces substances ultra-persistantes, qui ne se dégradent pas naturellement sans intervention humaine.

Parmi les participants figuraient la commissaire européenne à l’environnement Jessika Roswall, le ministre danois de l’environnement Magnus Heunicke, et Jean-Luc Crucke, ministre fédéral du Climat et de la Transition environnementale.

Concernant ces résultats, ce dernier a déclaré : « Il est dramatique de constater que, malgré les interdictions existantes, les PFAS sont toujours présents dans notre sang. Cela montre que ces ‘polluants éternels’ ne sont pas seulement un héritage du passé, mais une menace permanente pour notre santé et notre environnement. La Belgique soutient pleinement l’ambition de l’Union européenne d’éliminer progressivement les PFAS, mais nous pensons que le processus doit être accéléré. Nous devons à nos citoyens d’agir plus rapidement, de combler les lacunes et de veiller à ce que les pollueurs soient tenus responsables. Plus nous attendons, plus les coûts seront élevés et plus les risques pour les générations futures seront importants. »

### Au-dessus des seuils sanitaires

Ces résultats indiquent qu’entre trois et huit substances chimiques PFAS – sur les 13 testées – ont été détectées dans le sang de tous les fonctionnaires européens. Parmi ces molécules, le PFOS, réglementé depuis 2008, est le plus présent.

La moitié des personnes testées a affiché des niveaux de PFAS supérieurs à la valeur de référence sanitaire de 6,9 ng/ml établie par le projet HBM4EU, coordonné par l’Agence allemande de l’environnement, pour l’exposition combinée au PFOA, au PFNA, au PFHxS et au PFOS. Toutes les personnes testées ont montré un niveau total d’exposition aux PFAS supérieur à 2 ng/ml, seuil à partir duquel un suivi médical spécifique est recommandé par les Académies nationales américaines.

### Miser sur la réglementation

Cette initiative, menée en collaboration avec le Bureau européen de l’environnement (BEE) et ChemSec, met en lumière, selon leur communiqué, la contamination généralisée par les PFAS. D’après Patrick ten Brink, secrétaire général du BEE : « Le coût humain et économique de l’inaction face à la pollution par les PFAS est déjà stupéfiant, et il augmente de jour en jour. Les décideurs doivent de toute urgence fermer le robinet, tenir les pollueurs pour responsables et mettre fin à ce cycle de dommages. Les gens doivent pouvoir retrouver confiance dans l’eau qu’ils boivent et les aliments qu’ils mangent. »

Actuellement, on estime que l’exposition aux PFAS est liée à une douzaine de maladies, telles que les cancers du rein et des testicules, l’hypertension artérielle, la pré-éclampsie ou des maladies thyroïdiennes. Ces molécules contaminent désormais presque tous les Européens, y compris les enfants, les femmes enceintes et les adolescents.

> « La contamination par les PFAS n’épargne personne, et la réglementation fonctionne », a affirmé Anne-Sofie Bäckar, directrice exécutive de ChemSec. « Ces résultats prouvent deux choses : la contamination par les PFAS n’épargne personne, et la réglementation fonctionne. Là où des interdictions sont en place, les niveaux commencent à baisser, ce qui prouve clairement que des lois strictes protègent les populations. Nous avons maintenant besoin que les dirigeants de l’UE achèvent le travail en interdisant de manière universelle tous les PFAS, et pas seulement dans les produits de consommation, avant qu’une autre génération ne paie le prix du retard pris par l’industrie. »

Les conclusions des deux organisations soulignent aussi bien « l’urgence que l’opportunité qui s’offrent aux décideurs politiques européens. Alors que les restrictions existantes sur les PFAS commencent à réduire l’exposition, les nouveaux PFAS et les PFAS de substitution (PFDA, PFHpS, PFHxS, PFUnDA) continuent de s’accumuler dans le sang des personnes, avec des concentrations de certains composés en forte augmentation. »

De plus, elles plaident pour la mise en place de « restrictions larges et collectives afin d’éviter des substitutions regrettables, où les entreprises remplacent un produit chimique nocif réglementé par une autre alternative non réglementée (et potentiellement tout aussi nocive). »

En janvier dernier, la RTBF et ses partenaires du consortium européen de journalisme, le Forever Lobbying Project, ont révélé une vaste campagne de lobbying visant à édulcorer, voire à enterrer la proposition de restriction universelle des PFAS en présentant des arguments scientifiques, technologiques et économiques souvent imprécis, parfois faux, voire tout simplement trompeurs, régulièrement cités sans réserve par les décideurs politiques.

Un rapport du Conseil nordique des ministres de 2019 estime qu’en Europe, les impacts sanitaires de la pollution aux PFAS, « le coût de l’inaction », s’élèveraient entre 52 et 84 milliards d’euros par an, alors que les profits de l’industrie chimique s’élèvent à 4 milliards d’euros chaque année.