« Ici le monde » : une école chinoise crée des robots pour contrer le déclin démographique
Le bâtiment dédié à l’éducation des robots s’étend sur 4600 mètres carrés et comprend plusieurs espaces, tels qu’un espace usine et un espace informatique. Selon le groupe Economist Intelligence Unit, d’ici 2035, les personnes âgées de plus de 60 ans représenteront près du tiers de la population chinoise.
« Ce n’est pas tout à fait une école comme on se l’imagine avec des salles et des professeurs. C’est un grand bâtiment qui s’étend sur 4600 mètres carrés », explique Eudeline Boishult, la correspondante de la RTBF sur place. « Il est compartimenté en plusieurs espaces. Il y a un espace usine, un espace informatique, et aussi un espace chambre. Il y a une centaine de robots humanoïdes qui apprennent chaque jour à effectuer des tâches. Par exemple, dans la chambre à coucher, ils apprennent à plier des pantalons ou à organiser le bureau. Et dans l’espace usine, ils font de la soudure ».
Dans la cuisine, on leur apprend à préparer des repas et à faire la vaisselle ; dans le salon, ils nettoient et rangent.
Les robots n’apprennent pas seuls. Chaque machine est accompagnée d’un professeur, d’un tuteur en chair et en os. Un homme équipé d’un casque de réalité virtuelle et de manettes. Avec cet équipement, il effectue un geste qu’il montre à distance au robot afin qu’il puisse le reproduire.
« Par exemple, l’humain va attraper un objet et le robot va pouvoir rééffectuer ce geste », ajoute Eudeline Boishult. « Tous ces gestes, il faut les répéter inlassablement, 200 fois avant que le robot ne puisse réellement acquérir la compétence. Et l’objectif avec cet entraînement est de permettre au robot d’interagir avec son environnement de manière complètement autonome, sans besoin de l’aide d’un humain ».
L’école pour robots : une course technologique
La Chine veut gagner en performance et remédier à son problème démographique. Le développement des robots est donc devenu un axe essentiel de sa politique. Pendant des années, les États-Unis et le Japon ont été les pionniers. Aujourd’hui, Pékin met les bouchées doubles pour s’imposer.
Un argument confirmé et complété par Eudeline Boishult : « La Chine souhaite d’une part moderniser son industrie et, d’autre part, elle veut réduire sa dépendance aux technologies étrangères, notamment américaines. Et donc le gouvernement chinois a investi des centaines de milliards d’euros pour propulser la Chine comme un leader sur ce marché ».
Pour l’instant, la robotique humanoïde est en phase de développement. La plupart des robots présentés dans les conventions, dans les grandes foires et dans les grands événements ne sont pas des robots en service, parce qu’ils ne sont pas assez performants. Le problème vient surtout de la batterie. Elle a une autonomie d’une heure à quelques heures. Les experts estiment qu’il faut attendre encore entre 5 à 10 ans pour voir les premiers robots humanoïdes remplacer certains humains dans les usines.
« Ça peut paraître encore loin », ajoute la correspondante de la RTBF, « mais certains gouvernements et investisseurs ont compris que le marché était très prometteur. Et donc, on assiste à une véritable course mondiale pour développer ces robots humanoïdes. Et en ce qui concerne la Chine, elle a opté pour une stratégie industrielle qui se distingue de ses concurrents américains et japonais. Elle fabrique en masse des robots peu chers, peu coûteux et surtout polyvalents ».
Des robots pour assister les personnes âgées en Chine
Par ailleurs, la population chinoise souffre de problématiques démographiques. D’ici 2035, les personnes âgées de plus de 60 ans représenteront près d’un tiers de la population, selon le groupe Economist Intelligence Unit.
Pour Eudeline Boishult, la Chine ne s’est pas préparée au vieillissement de sa population : « Les plus de 65 ans représentent déjà 15 % de la population chinoise aujourd’hui. Il y a très peu de maisons de retraite et la tradition de garder ses parents à domicile se délite petit à petit. Les jeunes chinois préfèrent s’occuper de leur vie plutôt que de leurs aînés ».
La Chine envisage donc les robots comme une solution potentielle pour assister ces dizaines de millions de personnes âgées.
L’industrie l’a compris. Les investissements dans ce qu’on appelle l’économie des seniors sont nombreux. L’entreprise Unix AI, par exemple, a lancé en 2024 un robot à roulettes capable d’effectuer des tâches simples comme nettoyer le sol, jeter les ordures et remplir le lave-vaisselle. La machine est destinée aux personnes âgées qui auraient des difficultés à accomplir ces tâches. À terme, et cela peut faire peur, le robot pourrait apprendre à tester la tension artérielle ou encore préparer les médicaments d’un senior.
Un budget colossal
Les investissements se chiffreraient en millions d’euros. Mais le gouvernement chinois et les entreprises privées souhaitent garder le secret industriel autour de ces robots.
Cela s’explique selon la correspondante de la RTBF : « Pendant que le tuteur enseigne le geste à effectuer au robot, il y a des opérateurs derrière qui récupèrent des données et qui les analysent pour comprendre et corriger le comportement des robots. Pour vous donner une idée, il a fallu pas moins de 40 personnes et des centaines d’heures pour collecter les données nécessaires afin qu’Optimus, le robot humanoïde de Tesla, puisse effectuer le simple geste de mettre une batterie dans une boîte ».
Actuellement, ces robots n’ont pas une formation optimale ni parfaite. Ils ne savent pas réagir face à des scènes ou à des objets inconnus et ils ne parviennent pas encore à enchaîner plusieurs actions. « Cette école a aussi pour objectif de récolter environ 10 millions de données d’ici la fin de 2020 », ajoute encore Eudeline Boishult. « A terme, les autorités souhaiteraient que les données récoltées dans ce centre de formation puissent servir aux entreprises privées. Cela réduirait aussi le coût de l’école et de la formation des robots, tout en permettant de diffuser toutes les données collectées ».
Le marché chinois des robots humanoïdes représentait déjà 350 millions d’euros en 2024 et devrait atteindre 2,1 milliards d’euros dès 2025. Et même 11,35 milliards d’euros en 2030.
Ici le monde vous emmènera aussi en Ukraine, sur le front, dans la ville de Kherson, où des hommes se battent et où la résistance est organisée.
L’émission reviendra également sur les propos de la Corée du Nord en marge de la conférence des Nations-Unies qui affirme que Pyongyang n’abandonnera jamais le nucléaire.
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