France

Gouvernement Lecornu : Portrait de Roland Lescure, ministre de l’Économie.

Roland Lescure, ancien ministre de l’Industrie, a été nommé ministre de l’Economie et des Finances à 58 ans, remplaçant Eric Lombard. Il a travaillé à Bercy, à la Commission européenne et à l’Insee, et a été numéro 2 de la Caisse de dépôt et placement du Québec en 2009, avec un salaire de l’ordre du million d’euros.


Compagnon d’Emmanuel Macron, Roland Lescure, ancien ministre de l’Industrie et social-libéral devenu élu tardivement, revient à Bercy avec un portefeuille élargi en tant que ministre de l’Économie et des Finances, dans un contexte international et national incertain.

À 58 ans, ce fils d’un journaliste de L’Humanité et d’une syndicaliste CGT de la RATP, assume l’étiquette de « libéral » sur le plan économique, refusant d’« augmenter le coût du travail » comme tout bon macroniste. Cependant, il est paradoxalement classé à l’aile gauche de Renaissance. « C’est que le mouvement a bougé à droite », répond-il, passionné de PSG et ex-ministre de l’Industrie de juillet 2022 à septembre 2024, succédant à Eric Lombard.

En fin 2023, il s’oppose à la loi immigration adoptée au Parlement dans une version très à droite, au point d’être perçu comme un « frondeur » par certains, même s’il ne quitte pas le gouvernement. D’autres lui reprochent son opportunisme : « Le mec s’est toujours arrangé pour avoir un poste », lance un député. « Il ne se considérait pas du tout comme frondeur », nuance un membre de son groupe.

Ses positions laissent présager des discussions tendues avec Les Républicains, où l’on entendait en 2024 que « c’est un gros problème. Il porte la ligne inverse de Bruno Retailleau sur l’immigration ». Roland Lescure reproche à ce dernier de « fai (re) des poutous à Marine Le Pen ».

Vice-président de l’Assemblée, le Franco-Canadien n’a pas été rappelé au gouvernement Barnier, qu’il considérait trop à droite et dépendant du RN. Il voit l’ouverture d’usines comme « une arme anti-colère, anti-Rassemblement National » et ne manque pas d’attaquer le parti de Marine Le Pen, qu’il qualifiait de « Machiavel aux petits pieds » à l’époque.

Un haut responsable lepéniste déclare : « C’est la quintessence de la Macronie que l’on déteste. Il se croit le plus beau, le plus fort, le plus intelligent. » Une source syndicale le décrit comme ayant « une grande écoute avec les organisations syndicales ». L’ancien député PCF Sébastien Jumel, en 2022, le qualifiait de « pas tordu », spécifiant que c’était probablement grâce à des « parents communistes », tout en ajoutant que « pour le reste, il a mal tourné ».

Père de trois enfants et petit-fils de Pierre Lescure, fondateur des Éditions de Minuit, il a grandi dans un HLM de Montreuil (Seine-Saint-Denis). Demi-frère de l’ex-patron de Canal+ Pierre Lescure, il est diplômé de Polytechnique, de l’École nationale de statistique et de la London School of Economics. Il a travaillé à Bercy, à la Commission européenne et à l’Insee, avant d’évoluer dans la finance (Natixis, Groupama).

Après une expérience brève au PS en 2006, qu’il a quittée, il devient en 2009 numéro 2 de la Caisse de dépôt et placement du Québec, avec un salaire proche d’un million d’euros. En 2012, il rencontre Emmanuel Macron lors d’une réunion d’investisseurs étrangers. Quatre ans plus tard, face au Brexit et à l’élection de Donald Trump, il se lance en politique, séduit par la posture pro-européenne d’Emmanuel Macron. Il est élu en 2017 député des Français d’Amérique du Nord et préside la commission des Affaires économiques.

Il essuie également des revers, échappant à la présidence du groupe LREM ou à celle de l’Assemblée en 2022, bien que soutenu par Emmanuel Macron. Plus récemment, il a qualifié l’accord UE-USA sur les tarifs douaniers de « aveu de faiblesse historique […] Nous avons perdu la guerre commerciale avant même d’oser la mener ».

Il appelle à « protéger notre marché européen via une politique industrielle commune » et plaide pour un « accord anti-coercition permettant de taxer les GAFAM », ayant quitté en janvier le réseau social X, qu’il considère comme un « outil de propagande ». Par ailleurs, il s’oppose à la taxe Zucman tout en plaidant pour des concessions au PS à l’approche de débats budgétaires risqués.