Géorgie : des dizaines de milliers manifestent contre l’invasion du palais présidentiel.
Le parti au pouvoir, le Rêve géorgien, a fait face à son premier test électoral depuis les législatives d’octobre 2024, dont le résultat est contesté par l’opposition. Selon un sondage de l’Institut d’études et d’analyse sociales, la cote de popularité de ce parti est évaluée à environ 36%, tandis que l’opposition bénéficie de 54% des faveurs des Géorgiens.
Le parti au pouvoir, le Rêve géorgien, a affronté ce week-end son premier test électoral depuis les élections législatives d’octobre 2024, qu’il a remportées mais dont les résultats sont contestés par l’opposition.
Dans ce contexte, les élections locales de samedi, habituellement peu suivies, ont acquis une importance considérable. L’opposition a appelé à des manifestations contre un pouvoir accusé de dérive autoritaire, tandis que ce dernier a mis en garde contre toute tentative d’organiser une « révolution ».
Après la fermeture des bureaux de vote à 16H00 GMT, le Rêve géorgien a déclaré sur Facebook avoir « gagné les élections dans toutes les municipalités sans exception ». Les résultats officiels devaient être annoncés tard dans la soirée.
En début de soirée, des manifestants se sont rassemblés dans le centre de Tbilissi, brandissant des drapeaux géorgiens et européens. « Nous sommes ici pour protéger notre démocratie, que le Rêve géorgien est en train de détruire », a déclaré à l’AFP Natela Gvakharia, 77 ans.
Un autre manifestant, Aleko Samniachvili, un étudiant de 20 ans, a exprimé son inquiétude, estimant que l’ambition de la Géorgie de rejoindre l’UE serait compromise tant que le Rêve géorgien resterait au pouvoir. « C’est en le chassant que nous sauverons le pays », croit-il.
### « Dernière chance »
Suite à des débordements devant le palais présidentiel, le ministère de l’Intérieur a averti que le rassemblement avait « dépassé les limites imposées par la loi », soulevant des craintes de répression imminente.
Plusieurs partis d’opposition, dont le Mouvement national uni (MNU) de l’ex-président emprisonné Mikheïl Saakachvili, boycottent ces élections. Celui-ci a incité ses partisans à manifester, les qualifiant de « dernière chance » pour sauver la démocratie géorgienne. « Il y a des moments où il faut agir ici et maintenant », a-t-il écrit sur Facebook jeudi.
Faute d’une démonstration de force face au pouvoir, « beaucoup plus de personnes seront arrêtées et les autres chassées. Le désespoir total s’installera et l’Occident finira par nous abandonner », a averti M. Saakachvili, purgissant une peine de 12 ans et demi de prison pour abus de pouvoir et autres accusations.
Le Premier ministre Irakli Kobakhidzé a promis une réponse policière stricte en cas de débordements en Géorgie, cherchant à contrecarrer les ambitions « révolutionnaires » de ceux qui appellent à manifester.
Les précédentes élections, les législatives de 2024, avaient plongé cette ancienne république soviétique du Caucase dans une crise politique, entraînant des mois de manifestations de l’opposition, dont certaines avaient été réprimées par la police. De petites actions de protestation se poursuivaient depuis.
### « Graves représailles »
Environ soixante personnes, dont des dirigeants de l’opposition, des journalistes et des militants, ont été arrêtées en un an selon les ONG de défense des droits humains, qui estiment que les enjeux de samedi vont bien au-delà du simple renouvellement des élus locaux.
Amnesty International a déclaré dans un communiqué que les élections se déroulaient « dans un contexte de graves représailles politiques contre les figures de l’opposition et la société civile ».
Au pouvoir depuis 2012, le Rêve géorgien s’était d’abord présenté comme une alternative libérale face à Mikheïl Saakachvili, un réformiste pro-européen ayant dirigé le pays presque dix ans à partir de 2004 avant de s’exiler en Ukraine après sa chute.
Cependant, depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, ce parti est accusé de dérive autoritaire et de vouloir se rapprocher de Moscou. Il a adopté des mesures anti-LGBT et une loi sur les « agents de l’étranger », critiquée par l’Union européenne. Le processus d’adhésion de la Géorgie à l’UE a été suspendu.
Le Rêve géorgien se présente comme un promoteur de la « stabilité », accusant l’opposition de vouloir s’emparer du pouvoir par la force et les Occidentaux de chercher à utiliser le pays pour ouvrir un second front contre Moscou.
Dans un récent sondage, l’Institut d’études et d’analyse sociales évalue la popularité de ce parti à environ 36%, tandis que l’opposition bénéficie du soutien de 54% des Géorgiens. Cependant, cette opposition est divisée. Alors que le parti de M. Saakachvili a boycotté les élections locales en appelant à manifester, d’autres formations comme Lelo et For Georgia ont apporté leur soutien à des candidats.

