France

Municipales 2026 à Paris : Une campagne électorale « sale » ?

La campagne pour l’élection municipale de 2026 à Paris est marquée par des accusations et des affrontements entre candidats, notamment entre Rachida Dati et ses adversaires. Plusieurs candidats, dont David Belliard, Ian Brossat et Emmanuel Grégoire, issus de la majorité municipale, se positionnent dans un contexte préélectoral où les affaires de corruption et de frais de mandat sont au cœur des débats.


Quelle politique pour Paris à partir de 2026 ? Aujourd’hui, bien que la majorité des candidats aux élections municipales de l’année prochaine dans la capitale soient connus, il reste difficile d’évaluer clairement les programmes et orientations de chacun. Alors que plusieurs candidats avancent leurs propositions depuis plusieurs semaines, ces dernières semblent étouffées par des échanges d’invectives et d’accusations entre les différents camps.

L’ambiance au Conseil de Paris a souvent été électrique, voire pesante ces dernières années. On aurait pu penser que l’absence d’Anne Hidalgo allégerait l’atmosphère des débats, souvent tendus, avec Rachida Dati. Cependant, ces derniers mois ont montré que la conquête de l’Hôtel de ville pourrait donner lieu à une campagne « sale ».

Tous les ingrédients pour une campagne explosive sont présents. Le contexte national et international, chargé et angoissant, laisse peu de place à la vie politique locale dans l’esprit des Parisiens, un constat partagé par tous les camps. Seules émergent les affaires et les « boules puantes ». Des enquêtes pour corruption visant Francis Szpiner en avril, des signalements au parquet de Paris concernant les « bijoux cachés » de Rachida Dati en juin, la révélation des frais de représentation d’Anne Hidalgo en septembre, suivie de ceux d’Eric Lejoindre et de l’annonce des dates du procès de Rachida Dati pour corruption à la fin du mois… Les dossiers s’enchaînent, chaque rival réagit et s’en donne à cœur joie.

Selon un élu parisien chevronné, cette période préélectorale ne serait qu’un prolongement de l’ambiance du Conseil de Paris depuis 2020. Rachida Dati aurait choisi une stratégie d’agressivité sur tous les sujets et envers tout le monde. David Alphand, co-président du groupe Changer Paris, admet que depuis 2020, l’opposition a décidé d’incarner une « opposition tonique » mais a peu de pouvoir, si ce n’est celui de la parole.

Le retrait d’Anne Hidalgo, selon cet élu qui préfère rester anonyme, n’a pas calmé les esprits. Au contraire, il a enflé les débats : « Avec son départ, beaucoup voient une opportunité. De plus, les déboires judiciaires de Rachida Dati et la remise en question de sa candidature chez les macronistes l’affaiblissent et rebattent les cartes. De nouveaux candidats ambitieux s’attaquent donc à la favorite, blessée et plus agressive que jamais. »

La maire du 7e arrondissement de Paris a opté pour un discours « anti-Hidalgo ». Les trois candidats déclarés à gauche (David Belliard, Ian Brossat et Emmanuel Grégoire) sont issus de la majorité municipale. Écartée de la compétition par l’ancienne maire, Rachida Dati applique la même méthode à ses rivaux, qu’elle considère responsables de son bilan.

David Alphand n’hésite pas à associer directement (Eric Lejoindre, maire du 18e arrondissement et directeur de campagne d’Emmanuel Grégoire) ou indirectement, les trois candidats aux affaires concernant les frais de mandat, critiquant « les mauvaises habitudes prises lorsque l’on reste trop longtemps au pouvoir ».

Malgré son agressivité, les opposants à Rachida Dati continuent de se battre. Emmanuel Grégoire exprime que « le comportement du camp Dati n’est pas une surprise. La stratégie de ventiler les affaires est pour elle un moyen de tout mélanger et de faire croire que, globalement, tout le monde est corrompu ». L’ancien premier adjoint d’Anne Hidalgo pense que « cela continuera jusqu’à la fin de la campagne ».

David Alphand rejette cette idée, accusant David Belliard et Emmanuel Grégoire de n’avoir que peu de résonance avec leurs propositions et de s’attaquer à Rachida Dati pour faire parler d’eux. Il souligne la différence d’engagement sur les réseaux sociaux, où les attaques contre Rachida Dati génèrent bien plus d’intérêt que leurs programmes.

L’arrivée de La France Insoumise (LFI) ne va pas apaiser les tensions. La candidature potentielle de Sophia Chikirou pour LFI en 2026 pourrait intensifier la concurrence, comme le souligne un vétéran de la politique municipale, qui considère qu’elle est sur le même terrain que Rachida Dati, ayant aussi une mise en examen.

Emmanuel Grégoire, unique candidat de gauche à refuser une alliance avec le parti de Jean-Luc Mélenchon, compte sur cette opposition. Le porte-parole du PS à l’Assemblée nationale prépare également les esprits à une confrontation : « Une confrontation et des attaques contre moi ? Elles offriront un cadre de visibilité médiatique. J’y aspire. »

D’autres candidats pourraient également tirer parti de ces échanges. Le Rassemblement National, bien que discret pour l’instant, observe la situation de près. Thierry Mariani, qui vient de participer à une législative partielle, travaille sur son programme et les listes qu’il souhaite présenter avant la fin de l’année. Son parti se dit conscient de la dynamique actuelle, mais ne veut pas s’engager dans ce type de bataille.

Pierre-Yves Bournazel (Horizons), plus avancé dans sa campagne, affirme qu’il ne participera pas à la dispute actuelle. Se présentant comme un « candidat anti-pagaille », il voit dans les difficultés de Rachida Dati et les divisions à gauche une occasion de se démarquer. « Les enjeux éthiques sont cruciaux, mais ils doivent se fonder sur des propositions et des engagements, pas sur des règlements de comptes », déclare-t-il, insistant sur une approche apaisante et constructive.