France

Le dîner de Pascal Praud avec Nicolas Sarkozy avant sa condamnation.

Pascal Praud a dîné avec Nicolas Sarkozy au Peninsula, avenue Kléber, la veille de la condamnation de ce dernier à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs dans le cadre de « l’affaire lybienne ». Les journalistes Patrick Cohen et Thomas Legrand ont été filmés à leur insu en train de discuter avec des membres du Parti socialiste, ce qui a conduit Pascal Praud à les accuser de « collusion idéologique ».


Il y a une certaine ironie dans cette situation. Après avoir passé des jours à critiquer les journalistes Patrick Cohen et Thomas Legrand, qu’il affirmait avoir été « pris la main dans le sac » suite à une vidéo les montrant en conversation avec des membres influents du Parti Socialiste dans un restaurant, Pascal Praud, éditorialiste sur CNews, se retrouve lui-même dans une position délicate. Il a dîné avec Nicolas Sarkozy dans un grand hôtel parisien, la veille de sa condamnation, comme le révèle Le Canard enchaîné. « Le petit gueuleton s’est tenu avenue Kléber, au Peninsula, en présence de trois couples », indique le journal.

Pour un journaliste, il n’est pas inhabituel de rencontrer des personnalités politiques. Cependant, cet échange soulève des questions, surtout compte tenu de l’admiration constante que Pascal Praud exprime à l’antenne pour Nicolas Sarkozy, ainsi que la défense qu’il a récemment articulée en faveur de l’ancien président, condamné à cinq ans d’emprisonnement pour association de malfaiteurs dans le cadre de « l’affaire libyenne ».

Pascal Praud a même établi une comparaison entre Nicolas Sarkozy et Alfred Dreyfus, officier juif injustement condamné au XIXe siècle dans une France antisémite. « La justice condamne qui elle veut », a-t-il déclaré, lors d’une virulente critique des juges, qu’il accuse de « tuer la République ». « La dignité avec laquelle il a reçu un jugement qui l’envoie durant cinq ans en prison force le respect sinon l’admiration », a également affirmé l’éditorialiste, expliquant le lendemain comment l’ancien président avait été applaudi en entrant dans un restaurant après l’annonce du jugement.

Cette admiration pour Sarkozy est de longue date. Comme le rappelle Le Canard enchaîné, il a même signé il y a deux ans un éditorial intitulé « Sarkozy forever ! », où il déclarait « aimer beaucoup » l’ancien chef d’État : « J’aime beaucoup Nicolas Sarkozy. Je parle ici de l’homme politique. Ce qu’il dit ; ce qu’il fait. Je le trouve intelligent (très), courageux (très), sensible (très). »

Il n’est donc pas surprenant de retrouver Pascal Praud en compagnie de Nicolas Sarkozy. Toutefois, cette information prend une tournure amusante au regard de l’acharnement avec lequel l’éditorialiste a critiqué le café partagé par Patrick Cohen et Thomas Legrand, qui travaillent pour France Inter et Libération, pour l’un, et pour France Inter et France 5 (France Télévisions), pour l’autre.

Ces derniers avaient été filmés à leur insu par le média d’extrême droite L’Incorrect, attablés dans un restaurant parisien avec Pierre Jouvet, le secrétaire général du Parti socialiste, et Luc Broussy, le président du conseil national du PS. Au moment de parler de la candidature de Rachida Dati à la mairie de Paris, Thomas Legrand avait déclaré « faire ce qu’il faut pour Dati ». Après la diffusion de cette phrase, il a été suspendu à titre conservatoire et a défendu son propos en affirmant qu’il assumait de « s’occuper journalistiquement » des « mensonges de Madame Dati ».

Pascal Praud a ensuite abordé plusieurs fois cette rencontre dans ses émissions, accusant notamment les deux journalistes, le 8 septembre, de « collusion idéologique », les qualifiant d’« attachés de presse au service du PS » ou de « Bouvard et Pécuchet du service public », et qualifiant cet événement de « forfaiture ». Dix jours plus tard, il a réutilisé l’étiquette « d’attachés de presse de la gauche » dans un contexte de pression médiatique sur cette affaire, comme l’a récemment rapporté une étude de la revue des médias.

Pascal Praud acceptera-t-il désormais d’être désigné comme un « attaché de presse de la droite » ou comme un représentant public de Nicolas Sarkozy ? Depuis mardi soir et la révélation de ce dîner avec l’ancien président, une pluie de critiques s’est abattue sur les réseaux sociaux. « Heureusement que Pascal Praud n’est pas journaliste ! » a par exemple ironisé l’humoriste Charline Vanhoenacker.

Il est vrai que cette affaire semble affecter CNews moins qu’elle n’a dérangé France Inter et France Télévisions, tant la première paraît avoir renoncé à toute forme d’impartialité journalistique. Cette dernière est régulièrement critiquée par l’Arcom pour son absence de traitement rigoureux et honnête des faits.