Belgique

Plan d’économies en FWB : experts affirment « On n’a pas du tout envie de rouvrir une guerre scolaire »

La Fédération Wallonie-Bruxelles, qui a observé un déficit de 11% en 2024, ne peut pas agir sur ses recettes alors que ses dépenses continuent d’augmenter. Les experts mandatés par Élisabeth Degryse ont souligné qu’il était urgent d’agir, tout en indiquant que l’objectif fixé pour 2029 ne serait pas suffisant pour éviter un emballement de la dette.


Il va falloir se serrer la ceinture. Tous les niveaux de pouvoir sont concernés et aucun secteur ne sera épargné. Cette semaine se tient le conclave budgétaire, alors que les finances de la Fédération Wallonie-Bruxelles sont dans le rouge. Pire, la dette à ce niveau de pouvoir s’est considérablement accrue ces dernières années.

Le problème de la FWB réside dans le manque de leviers sur ses recettes, alors qu’elle doit faire face à de nombreuses dépenses. L’argent dont elle dispose provient en grande partie du fédéral, basé sur les recettes de la TVA et de l’impôt des personnes physiques. Ces montants sont déterminés selon une répartition précise, négociée lors des dernières réformes de l’État. Ainsi, la FWB ne peut pas modifier ses recettes alors que ses dépenses continuent d’augmenter. Pour 2024, un déficit de un milliard et demi d’euros a été observé par rapport aux 13 milliards de recettes, soit 11% de déficit. Une somme colossale qu’il faut impérativement rétablir pour éviter l’effet boule de neige : payer des intérêts pour rembourser les déficits accroît davantage la dette, d’autant plus que les taux d’intérêt auprès des créanciers augmentent, ce qui plongerait la Fédération dans une spirale infernale.

Le comité d’experts mandaté par Élisabeth Degryse, présidente de la FWB, par l’intermédiaire de Magali Verdonck, est formel : « On a pointé que c’était urgent, mais que l’effort que le gouvernement de la Fédération avait imaginé n’était pas suffisant, qu’il fallait aller encore plus loin […] Même l’objectif à l’horizon 2029 ne sera pas suffisant pour éviter l’emballement ». Dans ce contexte, les experts ont examiné tous les postes concernés, y compris ceux qui ont déjà consenti à de gros efforts. Marie Göransson assure qu’autour de la table, tous les experts souhaitaient « préserver un maximum les missions de la Fédération Wallonie-Bruxelles, que tous jugent totalement essentielles ».

L’enseignement représente la plus grande partie des dépenses, soit 70% du budget de la FWB et même 54% rien que pour l’enseignement obligatoire. Les experts ont donc retenu plusieurs pistes pour assainir les finances de ce secteur, malgré les vives désapprobations des syndicats.

Élément peu abordé dans les médias selon Marie Göransson, leur rapport incite à ne surtout pas revenir sur l’allongement du tronc commun, contrairement à ce qu’envisageait le gouvernement : « Il a évidemment une portée d’équité, mais au-delà, ça a aussi une portée budgétaire ».

Autre cible d’économie, l’enseignement qualifiant, où l’on observe parfois trois ou quatre élèves par classe en raison de l’extrême fragmentation des options. Pour les experts, il est nécessaire de rationaliser la dispersion des élèves. « Par exemple, il y a des infrastructures sportives techniques qui pourraient être partagées », souligne Magali Verdonck. Certains réseaux pourraient fusionner, peut-être dans les zones moins densément peuplées car ils coûtent davantage que dans les grandes villes, précise la spécialiste du fédéralisme fiscal de l’ULB.

« On n’a pas du tout envie de rouvrir une guerre scolaire (comme celles connues par la Belgique de 1879 à 1884 et de 1950 à 1959 entre le réseau libre et officiel, ndlr). Ce n’était pas le point », ajoute sa consœur. « Et d’ailleurs, c’était aussi un des éléments que ne voulait pas ouvrir le Pacte pour un enseignement d’excellence, mais réfléchir sur ce qu’on a appelé des bassins, donc des façons d’organiser l’enseignement par zones géographiques pour pouvoir ouvrir ces discussions ». Les experts affirment ainsi ne pas vouloir remettre en cause les réseaux, mais signaler que leur réorganisation garantirait des économies à certains établissements.

Les deux heures de cours supplémentaires pour les enseignants du secondaire supérieur ont également suscité le débat. Toutefois, il s’agit seulement d’une piste résultant d’une observation comparative, souligne Marie Göransson : « Si on compare par rapport à d’autres pays, on voit que la charge horaire est plutôt dans les tranches basses en ce qui nous concerne. Et on constate aussi qu’il y a cette iniquité qui existe entre un prof du français du secondaire inférieur et un prof de français du secondaire supérieur ».

En d’autres termes, ce rapport critiqué par tous les secteurs visés ne sert que de base de travail au gouvernement, défend Magali Verdonck : « Si par exemple déjà en Fédération, le nombre d’heures prestées par les professeurs était le plus élevé par comparaison internationale, bien sûr, on n’aurait pas été dans cette direction-là. Donc on a à chaque fois objectivé au maximum ». Ce rapport est d’ailleurs consultable et même réfutable, concède-t-elle. C’est maintenant au gouvernement de prendre ses responsabilités pour déterminer quelles économies supplémentaires devront être réalisées. Certaines observations scientifiques découlent de choix politiques… qui eux aussi peuvent être contestés ou approuvés.