Pourquoi certains médias américains ne cèdent-ils pas aux menaces de Donald Trump ?
Donald Trump a attaqué la liberté de la presse à plusieurs reprises depuis son premier mandat, notamment en souhaitant réduire le visa des journalistes étrangers. Jean-Paul Marthoz constate un changement d’ambiance dans le paysage médiatique américain, avec une polarisation et des médias ayant fait un pas de côté face à la critique de Donald Trump.
Dès son premier mandat, Donald Trump a plusieurs fois remis en question la liberté de la presse. Il souhaitait également modifier les conditions de travail des journalistes, ayant proposé de réduire le visa des journalistes étrangers, une décision annulée par Joe Biden par la suite. Cependant, Jean-Paul Marthoz note un véritable changement dans le paysage médiatique américain depuis ce second mandat : « Il y a une forme de polarisation de la presse américaine, en ce sens qu’un certain nombre de médias qui s’étaient montrés très critiques et très audacieux lors de la première présidence, osant critiquer ou se moquer de Donald Trump, ont fait un pas de côté. »
La peur des coupes budgétaires pour les médias américains est palpable. Pour exercer une pression sur les médias, Donald Trump dispose de divers moyens. Peu après son investiture, le département d’État a demandé à toutes les ambassades et consulats américains de se désabonner de plusieurs journaux, tel que le New York Times, The Economist et l’agence Associated Press. Cette action a entraîné une perte de milliers d’abonnements, entraînant une perte conséquente de revenus pour ces médias.
Les médias audiovisuels publics voient également leurs budgets directement réduits. Donald Trump souhaite réduire de 1,1 milliard de dollars les subventions étatiques pour ces services, qui ne coûtent pourtant que 1,6 dollar par Américain par an. Jean-Paul Marthoz explique : « Elles sont en général qualifiées de centre-gauche, libéral comme on dit aux États-Unis, ce qui signifie plutôt progressistes. Et donc elles sont la première cible de l’administration Trump, parce que ce sont vraiment des radios qui ont une influence considérable à la fois sur le monde politique, mais aussi elles bénéficient d’une confiance d’une partie importante de la population. (…) C’est vraiment du journalisme de qualité. »
Plusieurs médias, pour préserver leur rentabilité et éviter des mesures ciblées de l’administration, ont donc cédé face au président. Le collaborateur du Committee to Protect Journalists constate : « Si je prends, par exemple, une chaîne comme CBS qui est en train de négocier un énorme accord de rachat par un groupe médiatique, il est clair que lorsqu’elle a été poursuivie par le président Trump à propos d’une interview de Kamala Harris, sur laquelle elle avait pratiqué un journalisme absolument légitime, elle a cédé. Elle a cédé parce que les intérêts des actionnaires étaient de ne pas se fâcher avec une administration qui dispose d’un réel pouvoir sur le monde des médias. »
La politisation des organismes de contrôle avec Donald Trump est également préoccupante. Ce pouvoir de l’administration sur le paysage médiatique s’exerce notamment à travers la Commission fédérale des communications, qui devrait être indépendante et objective. Cependant, la nomination de Brendon Carr, proche de Donald Trump, à sa tête, pose question. Ce dernier a contacté la chaîne ABC après que Jimmy Kimmel ait évoqué dans son émission la récupération politique de l’assassinat de Charlie Kirk par les soutiens de Donald Trump, menaçant de retirer sa licence de diffusion si Jimmy Kimmel n’était pas écarté. Le présentateur a été retiré de l’antenne pendant quelques jours.
Jean-Paul Marthoz y voit un danger majeur pour les médias américains, comparant la situation au modèle hongrois sous Viktor Orban : « Dès l’instant où l’État se mêle des médias (…), je pense que c’est là l’une des plus grandes menaces contre la liberté de la presse aux États-Unis aujourd’hui. »
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