Fact-checking du discours de Donald Trump à l’ONU : climat, guerres et charia.
Le président américain Donald Trump a déclaré que le changement climatique était « la plus grande escroquerie jamais perpétrée au monde » lors de son discours devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 23 septembre. Il a également affirmé que « les Européens achètent du pétrole et du gaz à la Russie », bien que les importations d’énergies fossiles russes aient chuté de manière significative depuis l’invasion de l’Ukraine en février 2022.

Lors de l’Assemblée générale des Nations Unies le 23 septembre, le président américain Donald Trump a prononcé un « discours virulent sur ce qu’il considère comme les échecs du mondialisme et sur sa vision de la puissance américaine à l’étranger« , selon la chaîne pro-Trump Fox News.
« Trump avait raison sur tout« , a notamment déclaré le président républicain en parlant de lui à la troisième personne, avant d’ajouter : « Je ne dis pas cela pour me vanter, mais c’est vrai. J’ai eu raison sur tout.«
Cependant, tout au long de son discours d’une heure, plusieurs affirmations fausses ou simplistes ont été avancées. Nous avons vérifié cinq d’entre elles.
Le changement climatique, « la plus grande escroquerie »
Dans son discours, Donald Trump a également qualifié le changement climatique de « la plus grande escroquerie jamais perpétrée au monde. » Il a ajouté : « Toutes ces prédictions faites par les Nations Unies et d’autres, souvent pour de mauvaises raisons, se sont révélées fausses. »
Selon lui, cette « escroquerie » serait due au fait, sans preuve, que les climatologues utilisent désormais plus l’expression « changement climatique » que « réchauffement climatique ».
Il a mentionné que dans les années 1920, « on disait que le refroidissement climatique allait détruire la planète« , puis « on a dit que le réchauffement climatique allait détruire la planète« , mais il a ensuite affirmé que « il a commencé à faire plus frais« . Il a conclu son argument en disant que « maintenant, on parle simplement de changement climatique, car ainsi, on ne peut pas se tromper. C’est le changement climatique, car que la température augmente ou diminue, quoi qu’il arrive, il y a un changement climatique.«
Cette affirmation est erronée. Les deux termes sont encore utilisés par les scientifiques, y compris ceux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Dans leur dernier rapport, ils soulignent que « les activités humaines, principalement par leurs émissions de gaz à effet de serre, sont la cause incontestable du réchauffement climatique, la température moyenne à la surface de la Terre ayant dépassé de 1,1 °C les niveaux de 1850-1900 entre 2011 et 2020. »
Les expressions « réchauffement climatique » et « changement climatique » désignent des enjeux distincts. La NASA précise que le « réchauffement climatique » fait référence à l’augmentation à long terme de la température de la planète, tandis que le « changement climatique » inclut le réchauffement climatique tout en englobant une gamme plus large de changements affectant notre planète, tels que l’élévation du niveau de la mer, le recul des glaciers et l’accélération de la fonte des glaces.
En résumé, l’affirmation de Donald Trump est donc incorrecte et sous-entend un complot, utilisant les mots « escroquerie » et « pour de mauvaises raisons« , pour lesquels il n’apporte aucune preuve.
Le maire de Londres « veut imposer la charia »
Le président américain a également affirmé devant l’ONU que Londres avait un « maire épouvantable, épouvantable, et la ville a tellement changé. Maintenant, il veut imposer la charia. »
Cette thèse selon laquelle le premier maire musulman de Londres, le travailliste Sadiq Khan, souhaiterait imposer la loi islamique ne date pas d’hier.
De fausses allégations sur l’application de la charia à Londres circulent depuis des années sur les réseaux sociaux, rappelle la BBC. Ainsi, lors de son premier mandat en 2020, plusieurs publications sur Facebook montraient une image de Sadiq Khan accompagnée d’une citation : « Nous testons actuellement la loi shakira [charia mal orthographiée, NDLR] dans trois arrondissements de Londres. Nous la déploierons ensuite dans les trente autres l’année prochaine. » Le maire avait alors démenti cette affirmation.
Dès les années 2000, l’idée que des zones « contrôlées » par les musulmans seraient dangereuses pour les Britanniques « blancs » a été relayée par certains politiciens de droite, comme l’indique un article du Guardian.
Selon Politifact, environ 85 « Sharia councils » (conseils de la charia) existaient au Royaume-Uni en 2009, selon les données d’un groupe de réflexion. Ces conseils se consacrent à l’arbitrage des mariages religieux et à des questions financières. En 2019, des parlementaires britanniques ont rappelé que « les conseils de la charia n’ont aucun rôle juridique ou constitutionnel officiel au Royaume-Uni » et que « les seuls organismes habilités à rendre des décisions juridiquement contraignantes sont les tribunaux, et les citoyens peuvent toujours saisir les tribunaux en cas de litige.«
Suite à la déclaration de Donald Trump à l’ONU, Emily Thornberry, présidente de la commission des affaires étrangères de la Chambre des communes, a rejoint des députés travaillistes pour condamner Trump. Elle a publié cela sur les réseaux sociaux : « Je connais Sadiq Khan depuis plus de 30 ans. C’est un féministe, un socialiste et un allié de la communauté LGBTQ+. Je suis très fière qu’il soit le maire de Londres. Pour information, il est aussi intéressé que moi par l’introduction de la charia à Londres, c’est-à-dire 0%. Ceux qui suggèrent le contraire se trompent ou ont des intentions sinistres.«
En conclusion, les propos de Donald Trump sur l’imposition de la charia à Londres sont inexactes.
La Chine « possède peu de parcs éoliens »
Sur le sujet des énergies renouvelables, Donald Trump a déclaré que la Chine « possède très peu de parcs éoliens« . Il s’est ensuite demandé : « alors pourquoi en construit-elle et les envoie-t-elle partout dans le monde, sans les utiliser à grand-peine ? Vous savez quoi, elle utilise du charbon, du gaz, presque tout, mais elle n’aime pas l’éolien, et pourtant, elle adore vendre des éoliennes.«
Or, la Chine a plus de parcs éoliens et de capacités éoliennes que tout autre pays et prévoit d’en construire encore, selon un rapport du New York Times.
En se référant à des données du Global Energy Monitor, une ONG basée en Californie, la Chine exploite près d’un tiers des parcs éoliens du monde, soit 5400 sur 17.000 en activité, et représente 44% de la production d’énergie éolienne mondiale. En février 2025, elle comptait plus de 444.000 mégawatts d’énergie éolienne en fonctionnement, presque le triple des 151.000 mégawatts en activité aux États-Unis, qui se classent en deuxième position.
Un rapport de Global Energy Monitor de 2024 indique que « si la production d’énergie éolienne et solaire continue d’augmenter de 200 GW par an, comme prévu par les autorités pour 2024, la capacité de production d’énergie renouvelable devrait tripler d’ici fin 2030 (par rapport à la capacité de 934 GW en 2020)« .
Selon l’Administration chinoise de l’énergie, la capacité installée d’énergie éolienne a augmenté de 18% en 2024, avec l’installation de 80 GW d’énergie éolienne l’année précédente, selon les autorités chinoises.
En conclusion, l’affirmation de Donald Trump selon laquelle la Chine possède très peu de parcs éoliens est fausse.
Trump a « mis fin à sept guerres »
Plus tôt dans son discours, Donald Trump a évoqué le fait que « [s]on administration a négocié une série d’accords commerciaux historiques, notamment avec le Royaume-Uni, l’Union européenne, le Japon, la Corée du Sud, le Vietnam, l’Indonésie, les Philippines, la Malaisie et bien d’autres pays encore. » Il a aussi ajouté que « en l’espace de sept mois seulement, [il a] mis fin à sept guerres interminables.«
Depuis l’investiture de Donald Trump en janvier 2025, les États-Unis ont placé ou négocié une réduction de tensions dans sept conflits (Israël/Iran, Inde/Pakistan, RDC/Rwanda, Cambodge/Thaïlande, Arménie/Azerbaïdjan, Égypte/Éthiopie et Serbie/Kosovo). Toutefois, en profondeur, à l’exception du cas de la guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, les différends persistent et les conflits continuent.
Pour le conflit Israel/Iran, le 24 juin, Trump a déclaré sur Truth Social que la République islamique d’Iran et l’État d’Israël avaient convenu d’un cessez-le-feu « complet et total » de 12 heures. Cependant, il a ajouté que cela « va durer éternellement« . Une assertion jugée audacieuse, étant donné la volatile situation au Moyen-Orient, comme le note Libération, où « le storytelling des présidents américains a rarement résisté à l’épreuve du temps« . Plusieurs analystes, cités par The Guardian, ont exprimé des doutes quant à la résolution du conflit concernant les ambitions nucléaires iraniennes, prévenant que les hostilités pouvaient reprendre.
Concernant le conflit entre l’Inde et le Pakistan au printemps dernier, bien qu’Islamabad loue l’implication de Washington (jusqu’à proposer Trump pour le Prix Nobel de la paix) dans la cessation des hostilités, le Premier ministre indien, Narendra Modi, a affirmé qu’il n’y avait eu aucune médiation des États-Unis dans l’établissement du cessez-le-feu, selon Le Figaro.
Pour ce qui est des tensions entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda, bien que Trump se félicite d’avoir facilité la signature d’un traité de paix le 27 juin dernier, les combats continuent de faire rage dans la province du Sud-Kivu. Clémentine de Montjoye, chercheuse senior à Human Rights Watch, a récemment déclaré : « La détérioration de la situation au Sud-Kivu reflète une dangereuse combinaison de défaillances de gouvernance, de méfiance entre les forces armées et les groupes armés qui leur sont alliés, ainsi que des tensions ethniques croissantes« .
Entre l’Égypte et l’Éthiopie, les tensions actuelles sont dues à l’inauguration par Addis-Abeba d’un des plus grands barrages du monde sur un affluent du Nil, ce que Le Caire craint qu’il ne réduise considérablement son approvisionnement en eau. Cependant, comme l’indique CNN, « ce n’est pas une guerre, doncTrump ne peut pas prétendre l’avoir stoppée« . Trump a réprimandé les États-Unis, affirmant qu’ils avaient « stupidement financé » le barrage, ajoutant qu’il réduit « considérablement » le débit d’eau du Nil, rejoignant ainsi les préoccupations égyptiennes, un allié influent des États-Unis. L’Éthiopie a rejeté ces allégations comme étant « fausses« , insistant sur le fait que le barrage a été autofinancé, selon la BBC.
Enfin, pour le conflit entre la Serbie et le Kosovo, Politifact souligne que « rien n’indique qu’une guerre potentielle se prépare« .
En ce qui concerne la guerre entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, les dirigeants de ces pays ont rencontré Trump à la Maison Blanche le 8 août 2025 pour signer une déclaration de paix après près de 40 ans de conflit. Cet accord, négocié par Trump, n’est pas un accord de paix définitif, mais représente une avancée, selon des experts en politique étrangère.
En conclusion, l’argument de Trump selon lequel il serait un « faiseur de paix » pour sept conflits ne reflète pas les réalités géopolitiques complexes. Selon Le Figaro, la liste des guerres qu’il aurait résolues est « un bilan pléthorique et largement fantasmé« .
« Les Européens achètent du pétrole et du gaz à la Russie »
Concernant la guerre en Ukraine, Donald Trump a déclaré que l’Europe « devrait se joindre [aux États-Unis] pour adopter exactement les mêmes mesures [les droits de douane sur la Russie] si la guerre continuait. » Pour lui, elle « doit intensifier ses efforts. [Les Européens] ne peuvent pas continuer comme ils le font. Ils achètent du pétrole et du gaz à la Russie !«
Avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, l’UE était en effet très dépendante de Moscou pour ses approvisionnements en charbon, pétrole et gaz, mais depuis, les importations d’énergies fossiles russes ont chuté de manière significative.
Selon la Commission européenne, les mesures prises jusqu’à présent ont permis de réduire les volumes de gaz russe importés de 150 milliards de m³ en 2021 à 52 milliards de m³ en 2024, ce qui fait que la part des importations de gaz russe est passée de 45% à 19%.
Pour diversifier son approvisionnement, l’UE a eu recours au gaz naturel liquéfié (GNL) américain, transporté par voie maritime. Entre 2021 et 2024, les importations de gaz en provenance des États-Unis ont augmenté, passant de 18,9 milliards de mètres cubes à 45,1 milliards de mètres cubes, selon les chiffres du Conseil de l’UE.
La Commission européenne a également interdit les importations de pétrole brut et de produits pétroliers transportés par voie maritime en provenance de Russie. Actuellement, le pétrole russe arrive principalement via l’oléoduc Droujba, dont l’importation a chuté, passant de 27% début 2022 à 3% aujourd’hui.
Seuls deux pays européens continuent d’importer du brut russe : la Slovaquie et la Hongrie. Ce 24 septembre, la Commission européenne a annoncé qu’elle proposerait d’augmenter les droits de douane sur le pétrole russe que ces deux pays de l’UE continuent d’importer.
Outre cela, le Premier ministre hongrois, Viktor Orbán, connu pour être « un admirateur notoire de Trump« , a confirmé cette semaine que son pays continuerait d’accepter l’énergie russe. Néanmoins, il a également annoncé la signature d’un contrat à long terme pour l’achat de gaz naturel avec le fournisseur occidental Shell, qui porte sur deux milliards de mètres cubes de gaz naturel sur dix ans, à partir de 2026.
En somme, bien que l’Union européenne continue d’importer du gaz et du pétrole russes, Donald Trump omet de mentionner que les 27 pays ont considérablement réduit ces importations et souhaitent les diminuer encore davantage dans les années à venir. Son affirmation est donc simpliste.

