France

Féminicide d’Inès Mecellem : Enquête sur le principal suspect.

Plus de deux semaines après le meurtre d’Inès Mecellem, son ancien conjoint, considéré comme le principal suspect, reste introuvable. La jeune femme avait déposé plusieurs plaintes pour harcèlement et menaces de mort dans les semaines précédant son assassinat.


Plus de deux semaines après le meurtre d’Inès Mecellem, poignardée à plusieurs reprises chez elle à Poitiers, son ex-conjoint – considéré comme le principal suspect – reste introuvable. La nature de ce crime suggère fortement un féminicide conjugal. En effet, un réfugié afghan de 36 ans a été aperçu par une voisine quittant rapidement l’appartement de la victime, un couteau ensanglanté à la main. Ce témoignage fait écho aux nombreuses plaintes pour harcèlement et menaces de mort déposées par la jeune femme dans les semaines précédant son assassinat.

Comment expliquer que le suspect échappe aux enquêteurs depuis le 8 septembre ? « Ce n’est pas parce qu’on a l’impression que l’enquête est au point mort qu’il ne se passe rien », déclare une source proche de l’enquête. D’après nos informations, cet homme, arrivé en France il y a environ dix ans, aurait d’abord été repéré dans la région niçoise. Toutefois, alors que les enquêteurs tentaient de l’interpeller, le suspect a de nouveau disparu. Selon une autre source, il aurait ensuite passé la frontière italienne. Bien qu’il ne fasse pas partie du milieu criminel organisé, il est considéré comme très mobile. « C’est comme pour Mohamed Amra : on l’arrêtera. La coopération internationale, c’est toujours plus long, mais ça fonctionne », ajoute cette source.

Dans ce genre d’affaire, l’analyse de la téléphonie est souvent déterminante. C’est grâce à ce procédé que les enquêteurs ont réussi, la première fois, à le localiser près de Nice. Parallèlement, un travail d’analyse de l’environnement du suspect est réalisé pour identifier les personnes vers lesquelles il pourrait se tourner, établissant ainsi une sorte de cartographie. A-t-il des liens en Italie ? Se dirige-t-il vers un autre pays ? « Ce n’est pas un voyou de grand chemin ; on peut aussi espérer qu’il commette des erreurs, qu’il laisse des traces, qu’il ne soit pas aussi méticuleux que certains criminels aguerris ou mieux entourés », précise cette source.

Une question demeure : comment le suspect a-t-il pu échapper aux policiers avant même le début de sa traque ? En parallèle de l’enquête judiciaire confiée à la division de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS), une enquête administrative est en cours pour examiner les dysfonctionnements survenus dans ce dossier.

Le suspect a été interpellé deux jours avant son acte violent, alors qu’il traquait et menaçait Inès Mecellem dans les rues de Poitiers. Pourquoi les policiers n’ont-ils pas décidé de le placer en garde à vue malgré les alertes répétées et sa dangerosité avérée ? Cette interrogation prend d’autant plus d’importance, sachant que, selon une source proche, « les policiers qui travaillent sur ce territoire ont pour instruction de demander un avis au parquet pour chaque interpellation liée à des violences intrafamiliales ». Ce protocole n’a pas été respecté dans ce cas.

Le 10 juillet, Inès Mecellem avait pour la première fois porté plainte au commissariat de Poitiers contre son ancien compagnon, qu’elle avait quitté au début de l’été après un an et demi de relation. La jeune femme rapportait subir un harcèlement constant et des menaces de mort. Elle se disait espionnée, suivie, insultée. Inès Mecellem retournera au commissariat à quatre reprises – les 17 juillet, 13, 19 et 28 août – pour préciser sa plainte, selon le parquet de Poitiers.

La situation était telle qu’on lui avait remis « un téléphone grave danger », permettant aux victimes de violences conjugales de prévenir rapidement les autorités en cas de danger imminent. Inès Mecellem a utilisé ce téléphone une fois, le 19 août, après avoir reçu un SMS la menaçant de mort. Ses proches ont déclaré au *Monde* qu’elle aurait tenté de l’activer une seconde fois le jour où elle a été suivie dans Poitiers. Elle n’a apparemment pas eu le temps de l’utiliser le jour de sa mort. La famille d’Inès Mecellem a déposé une plainte pour non-assistance à personne en danger contre le commissariat de Poitiers.