France

Chantage à la sextape : Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne, clame son innocence.

L’interrogatoire de Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne, commence à 18h20 lors de la deuxième journée du procès dit du « chantage à la sextape » au tribunal de Lyon. Mis en examen en avril 2023 pour chantage, association de malfaiteurs et détournement de fonds publics, il affirme n’avoir « jamais » utilisé la vidéo intime de son ex-premier adjoint comme moyen de pression.

« Qui ment ? » À 18h20, l’interrogatoire de Gaël Perdriau, maire de Saint-Étienne, débute. La seconde journée du procès dit du « chantage à la sextape » se termine dans une ambiance déjà pesante au tribunal de Lyon. Après les auditions de Gilles Rossary-Lenglet, présenté comme le « lanceur d’alerte », et de Pierre Gauttieri, ancien directeur de cabinet de l’élu, suspecté d’avoir orchestré le piège, c’est au tour de l’élu de s’expliquer.

Revêtu d’un costume gris et d’une cravate assortie, Gaël Perdriau rappelle qu’il a « consacré [sa] vie » à sa ville, déplorant avoir entendu « beaucoup de mensonges depuis deux jours ». « Qui ment ? », l’interroge la présidente Brigitte Vernay. En tentant une explication floue, il est repris par la présidente qui lui repose la question : « Qui ment ? ».

Gaël Perdriau se considère comme une « victime collatérale »

À la barre, Gaël Perdriau accuse successivement Samy Kéfi-Jérôme d’avoir réalisé la vidéo pour alimenter ses ambitions politiques, Gilles Rossary-Lenglet de vouloir « régler ses comptes personnels » avec son ancien compagnon, et Pierre Gauttieri, qui « entretenait des relations qui n’avaient rien à voir avec la politique », d’agir par ressentiment. « Finalement, je me sens victime collatérale de ces sujets qui n’ont rien à voir ni avec la ville de Saint-Étienne, ni avec la vie politique », déclare-t-il.

Mis en examen en avril 2023 pour chantage, association de malfaiteurs et détournement de fonds publics, il réaffirme qu’il n’a « jamais » utilisé la vidéo intime de son ex-premier adjoint comme moyen de pression. « Je n’en suis pas l’origine, je l’ai vue pour la première fois [lors du premier jour d’audience] et je ne l’ai jamais utilisée en chantage contre Gilles Artigues ou quiconque », insiste-t-il, ajoutant que c’est ce qu’il a toujours affirmé depuis les révélations de Mediapart en août 2022.

La présidente Brigitte Vernay insiste sur ses premières réactions, le lendemain de la publication de l’article, lorsque l’élu avait évoqué des termes tels que « gang bang » ou « partouze » en réponse aux journalistes. « J’ai mal maîtrisé mes mots face à la pression, je les regrette », se défend-il, insistant sur le fait qu’il n’y a « pas de haine » entre lui et la victime qu’il connaît « depuis trente et un ans ». Pour la présidente, ces propos insinuent qu’il connaissait le contenu des images.

« Tout ça, c’est faux »

À quel moment a-t-il été informé de l’existence de cette vidéo ? Face à la pression sur la chronologie, l’ancien maire admet avoir été informé fin 2015 ou début 2016 par son directeur de cabinet de l’époque. « Samy Kéfi-Jérôme lui aurait montré la vidéo qu’ils avaient réalisée ensemble lors d’une soirée », explique-t-il. « J’ai pris acte, gêné. Pour moi, c’était un moment de vie privée, consensuel. Je n’ai rien dénoncé parce que je ne voulais pas l’exposer. » Il n’aurait de nouveau entendu parler de cette vidéo qu’en 2017.

À plusieurs reprises, Gaël Perdriau évoque ses liens politiques avec Gilles Artigues, prenant le temps d’« rappeler le contexte ». Il souligne avoir « toujours soutenu » son ex-premier adjoint lors de ses campagnes en 2012, 2015 et 2017. « Je n’ai jamais cherché à [le] tenir », insiste-t-il encore une fois. Lorsque la présidente évoque la possibilité d’un « kompromat », il rejette toute responsabilité sur Pierre Gauttieri : « Tout ça, c’est faux. Ça s’est fait sans moi. Jamais, je ne me serais abaissé à de telles pratiques. »

Gaël Perdriau estime que Gilles Artigues l’a « piégé »

« Et si on n’avait pas eu ces vidéos, est-ce que vous auriez parlé ? », interroge alors la présidente, faisant référence à des enregistrements réalisés par Gilles Artigues à l’insu du maire. « Non, parce que je n’en ai aucun souvenir », répond-il, accusant l’ancien conseiller municipal de chercher à le « piéger ». « Nous avons effectué 196 réunions, il choisit d’envoyer 31 enregistrements à la police, dont neuf en tête-à-tête avec moi. C’est lui qui maîtrise l’entretien en évoquant la vidéo à chaque fois, où il m’accuse d’être le commanditaire, il me menace à sa façon et pourtant, il bluffe. Cela fait cinq ans que Gilles Artigues cherche à me piéger à mon insu », assène l’élu.

Pour illustrer ses propos, il sort un papier de sa poche. Il s’appuie ensuite sur ces notes, « enregistrées à [son] insu ». Selon lui, elles prouvent qu’il n’était pas au courant. « Je suis impressionnée par cette démonstration », répond la présidente.

Enfin, Gaël Perdriau conclut, amer : « J’ai tenté d’illustrer avec des preuves qui sont dans le dossier. Depuis trois ans, il faut que je sois coupable. Des fuites dans la presse ont été orchestrées pour que médiatiquement, je le sois déjà. »

Notre rubrique sur Saint-Étienne

Avant de suspendre la séance, la présidente confronte une dernière fois le maire à des SMS échangés en 2018 avec Samy Kéfi-Jérôme, faisant référence à Théo, l’escort-boy impliqué dans le piège. L’élu minimise alors ces échanges, évoquant « un mauvais humour » et que son ancien directeur de cabinet avait mentionné ce prénom lors de la première discussion sur la vidéo. « Non, vous n’avez rien oublié depuis 2015 », réplique la magistrate.

L’audition de Gaël Perdriau doit se poursuivre ce mercredi devant le tribunal correctionnel de Lyon, avant d’entendre la victime, Gilles Artigues. Le procès est prévu pour durer jusqu’au vendredi 26 septembre.