France

Procès de Cédric Jubillar : « Je suis touché par la disparition de Delphine »

Ce lundi, le palais de justice d’Albi dans le Tarn a vibré dès 9 heures avec l’entrée de Cédric Jubillar dans le box, vêtu d’un survêtement noir et bleu, crâne rasé luisant sous les néons pour le début de son procès pour le meurtre de Delphine Jubillar disparue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020. Cédric Jubillar est placé à l’isolement depuis son incarcération en juin 2021, ses avocats Me Emmanuelle Franck et Me Alexandre Martin en ont profité pour dénoncer ses conditions que seuls les « terroristes du Bataclan » connaissent aussi.


Ce lundi, le tribunal d’Albi, situé dans le Tarn, a vibré dès 9 heures avec l’arrivée de Cédric Jubillar dans le box des accusés, vêtu d’un survêtement noir et bleu, avec le crâne rasé luisant sous les néons, pour le début de son procès concernant la disparition de sa femme, Delphine Jubillar, survenue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020. Avant de s’attaquer aux « choses sérieuses » — indices, témoignages et plaidoiries —, la présidente du tribunal a choisi d’explorer la vie intime de cet homme de 38 ans, accusé d’avoir tué son épouse. L’après-midi, entièrement consacré à son enquête de personnalité, a permis d’entendre pour la première fois la voix de Cédric, ainsi que ses silences et ses réactions, face à un portrait brossé par Gaëlle Carraux-Alfort, psychologue clinicienne spécialisée en criminologie et victimologie, ainsi qu’enquêtrice de personnalité.

Défendant son calme apparent, Cédric Jubillar est resté impassible durant le témoignage de l’enquêtrice, les mains croisées dans le dos, se tenant droit comme un piquet. Son attitude, parfois troublée par un haussement de sourcil ou un sourire éphémère, dénotait une certaine simplicité, presque une désinvolture. Il a fait preuve de coopération tout au long des formalités du matin, répondant directement aux questions, souvent de manière laconique, sans s’étendre. Parfois, une note d’agacement ou une réplique inattendue a surpris l’assistance.

L’enquêtrice a décrit une existence marquée par l’instabilité. Né en 1987, Cédric a été placé en famille d’accueil entre 2 et 7 ans, sa mère Nadine étant dans l’incapacité de s’occuper de lui en raison de difficultés personnelles. « C’était de ma faute [d’être abandonné], je l’ai mérité », a-t-il déclaré, d’une voix monocorde, se considérant comme « un mauvais fils ». Récupéré plus tard par sa mère et son compagnon Olivier, qu’il surnomme « papa », il a grandi dans un foyer modeste, sans lien paternel solide. « J’ai pas beaucoup de souvenirs d’enfance, c’est flou », a-t-il confié, avant d’ajouter à l’attention de la présidente : « Mon beau-père, c’était le référent. » Son ton détaché trahissait une ancienne résignation.

Son adolescence a été marquée par des échecs : décrochage scolaire, consommation de cannabis dès 14 ans, puis une forte addiction — « 8 à 10 par jour », a-t-il reconnu. Il a été décrit par des témoins comme « manipulateur » et « fourbe », mais il se présente plutôt comme quelqu’un qui « aime prendre de la place et donner son avis sur tout ».

Sur ses émotions, il a été plus réticent, parfois déstabilisé. L’enquêtrice a remarqué qu’il parlait peu de Delphine de manière spontanée, la rendant presque absente de son récit. « Je suis touché par sa disparition, évidemment », a-t-il murmuré, avant de réaffirmer avec force : « Mais je conteste toujours les faits qui me sont reprochés. » La prison, où il a passé quatre ans à Seysses, l’a marqué. Il a déclaré avoir arrêté le cannabis en détention. Cédric Jubillar est en isolement depuis son incarcération en juin 2021, ses avocats, Me Emmanuelle Franck et Me Alexandre Martin, ont profité de l’occasion pour dénoncer des conditions de détention que seuls les « terroristes du Bataclan » connaissent également.

À propos de ses enfants, Louis et Elyah, qui sont placés chez une tante, il a montré une certaine émotion : « Je leur écris, mais je n’ai pas de réponse. J’ai baissé les bras mais j’ai repris confiance », a-t-il admis. Ce Cédric, tour à tour complaisant, agacé ou détaché, est-il vraiment capable de passer à l’acte ? Les débats reprendront mardi matin et s’orienteront bientôt vers les faits, laissant pour l’instant cette première esquisse d’un homme complexe en suspens.