France

Séchresse : Les plantes sauvages ne sont-elles pas l’avenir ?

Bernard Heitz, un semencier alsacien, prépare et commercialise des graines à base de plantes sauvages depuis une vingtaine d’années, dont un tiers de sa production est issu de ces plantes. La ville de Strasbourg utilise aujourd’hui des semences de plantes sauvages pour végétaliser ou revégétaliser.

Faire pousser des graines de plantes sauvages, c’est encourager la biodiversité. Dans un contexte où les sécheresses et les canicules se multiplient, l’eau vient à manquer, et la biodiversité est menacée, Bernard Heitz, un semencier alsacien, prépare et vend des graines de plantes sauvages.

Son objectif ? « Permettre » la végétalisation de vastes espaces avec des semences mieux adaptées à l’environnement, qui ne sont pas modifiées et qui résistent beaucoup plus longtemps que les semences horticoles. De plus, Bernard Heitz souligne que « elles ne nécessitent pas d’irrigation, même en pleine sécheresse ». Selon lui, « les plantes sauvages sont présentes dans la nature depuis toujours, elles sont très résistantes. Et nous les prélevons dans onze régions de France, donc elles sont naturellement adaptées au climat local, cela fonctionne. »

Sur son exploitation Nungesser Semences à Erstein (Bas-Rhin), il développe, depuis environ vingt ans, des semences, dont un tiers provient des plantes sauvages. Soucieux de l’environnement, il a été inspiré par ses voyages dans les pays nordiques, convaincu que « beau jour, en France, nous serions obligés, surtout avec l’harmonisation en Europe », de se lancer dans l’aventure des semences de plantes sauvages.

« Le gîte et le couvert pour tous les insectes »

Un atout majeur, qui motive particulièrement cet agri-entrepreneur écolo, est que les fleurs de ces plantes sauvages produisent en grande quantité du pollen et du nectar, ce qui attire massivement les pollinisateurs. Bernard Heitz constate que « les fleurs issues de l’horticulture aujourd’hui n’en apportent plus beaucoup ». Il est persuadé que les semences de plantes sauvages représentent l’avenir. « C’est un peu le gîte et le couvert pour tous les insectes, les pollinisateurs, toutes les bestioles qui circulent dans l’environnement, alors que beaucoup d’entre eux sont en danger ou disparaissent de certaines zones ».

C’est un pari sur l’avenir et une vision innovante qui fait de lui une référence en France, d’où il exporte ses semences à travers tout l’Hexagone. Cette reconnaissance est récente, car au début, le semencier a essuyé quelques railleries, notamment de la part « des paysagistes qui lui disaient qu’il avait fumé la moquette », se remémore Bernard Heitz avec le sourire. « J’étais un peu à la marge. »

L’exemple du tram strasbourgeois

Désormais, les choses évoluent « avec les jeunes générations en général, ceux qui sortent des écoles de commerce, d’ingénieurs, d’agriculture, et qui arrivent sur le marché du travail avec une vision différente ». Bernard Heitz perfectionne ses recettes de semences en obtenant d’abord « quelques grammes d’espèces » en milieu naturel protégé, puis en les cultivant sous serre. Après multiplication, récolte et séchage, il extrait les graines qu’il nettoie et prépare manuellement avant de créer des mélanges. « Cela demande beaucoup de travail, ce n’est pas comme des semis horticoles que tu sèmes et après trois semaines, tu as des fleurs… Non, ça ne fonctionne pas comme ça, c’est encore laborieux. »

Mais les résultats parlent d’eux-mêmes. « Il y a quinze ans, nous avons réalisé deux chantiers sur deux lignes de tram à Strasbourg. L’un avec des semences de plantes sauvages, alors qu’il n’y avait que 15 cm de terre, et l’autre avec du gazon. Aujourd’hui, le gazon a presque complètement disparu, alors que sur le chantier de plantes sauvages, il y a de nombreuses fleurs et c’est très vert, malgré le manque d’eau. C’est incomparable. » Les collectivités deviennent de plus en plus des clients de sa production.

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Actuellement, la ville de Strasbourg utilise encore des semences de plantes sauvages pour végétaliser ou revégétaliser. « Même si parfois, ça peut sembler un capharnaüm, c’est un capharnaüm bien organisé si c’est bien cultivé. »