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De Paris à Bordeaux, test de la voiture électrique à recharge rapide.

La Smart #5 est capable d’encaisser une puissance maximale annoncée à jusqu’à 400 kW. La consommation est entre 18 à 20 kWh / 100 km selon les versions.


J’ai parcouru près de 2 000 kilomètres au volant de la Smart #5 électrique, le modèle qui offre actuellement la recharge la plus rapide en France. Voici les résultats de nos essais sur des bornes de recharge entre Paris et Bordeaux.

Cet été, j’ai eu l’occasion de conduire la Smart #5 sur une distance significative. Pendant trois semaines, j’ai utilisé la voiture quotidiennement, en effectuant des trajets urbains, des escapades sur autoroute et des arrêts rapides sur des bornes de recharge.

Parmi ses atouts, l’un d’eux se démarque particulièrement : sa capacité à se recharger plus rapidement que toute autre voiture électrique disponible à la vente en France, et ce, dans la réalité.

À noter que dans quelques semaines, la Smart #5 sera devancée par la Xpeng G6 restylée, capable de recharges encore plus rapides. Toutefois, ce modèle n’est pas encore commercialisé en France, les livraisons étant prévues d’ici la fin de l’année, contrairement à la Smart #5 qui est déjà sur les routes depuis plusieurs mois.

### Une batterie XXL et une recharge très puissante

La Smart #5 est conçue sur une plateforme technique bien plus avancée que ne le laisse penser son appellation « Smart ».

Développée sur la plateforme modulaire SEA du groupe Geely, elle intègre pour ses versions les plus puissantes un système de 800 volts, une technologie déjà utilisée par des marques comme Porsche, Hyundai ou Kia, mais encore rare dans sa catégorie.

Le modèle haut de gamme est équipé d’une batterie NMC (nickel-manganèse-cobalt) d’environ 100 kWh bruts (94 kWh utiles), capable d’accepter une puissance maximale annoncée à **jusqu’à 400 kW**. Cette valeur pourrait même être légèrement dépassée selon les conditions pratiques.

En comparaison, une Tesla Model Y atteint une puissance maximale d’environ 250 kW, tandis qu’une Porsche Taycan se limite à 320 kW, et très peu de véhicules dépassent aujourd’hui les 350 kW. On entre ici dans une nouvelle dimension.

Concernant l’autonomie, la Smart #5 peut aller jusqu’à 590 km WLTP, soit environ 350 km sur autoroute. Cependant, la consommation peut être légèrement élevée, variant entre 18 et 20 kWh / 100 km selon les versions, en tenant compte des pertes d’énergie liées à la recharge.

Le modèle avec la petite batterie de 76 kWh brut (74,4 kWh net) est de type LFP (lithium-fer-phosphate, sans cobalt), offrant une autonomie inférieure (465 km WLTP) et une recharge beaucoup plus lente, elle atteignant un pic à 150 kW, nécessitant environ 30 minutes pour passer de 10 à 80 %.

### En Chine : moins de 15 minutes : mais dans la vraie vie ?

Pour la grande batterie, le constructeur annonce un temps officiellement de **18 minutes** pour passer de 10 à 80 % en Europe. En Chine, où les modèles partagent la même architecture, Smart communique sur un temps de recharge inférieur à **15 minutes**.

La marque semble plutôt jouer la carte de la prudence en Europe, mentionnant des temps de recharge inférieurs à ceux qu’elle peut atteindre. Lors de mon essai, les résultats étaient éloquents. Sur une borne haute puissance de 350 kW (Ionity ABB) située sur une aire d’autoroute, j’ai rechargé de 3 à 73 % en 14 minutes.

Ce n’est peut-être pas exactement un 10 à 80 %, mais la quantité d’énergie récupérée était similaire. Plus impressionnant : le passage de 3 à 93 % se fait en 23 minutes, et de 3 à 100 % en 30 minutes, avec une puissance de 131 kW encore disponible à 90 % de charge.

Pour comparaison, une Tesla met entre 25 et 35 minutes pour passer de 10 à 80 %, et environ une heure pour un 10 à 100 % (sauf pour l’ancienne Model Y en cellules BYD qui était plus rapide).

J’ai répété le test sur une borne TotalEnergies à 300 kW (Alpitronic), faisant le 10 à 80 % en 16 minutes et 30 secondes.

Sur une borne 400 kW BP Pulse (Alpitronic) sur l’A10, j’ai atteint un pic de 401 kW en me branchant à 17 % de batterie.

La voiture pourrait potentiellement atteindre des niveaux plus élevés, comme 426 kW constatés lors d’un essai à Porto, mais cela dépendra des bornes disponibles. Et même si la différence de temps entre passer d’une borne 400 à 350 kW est minime, à peine 40 secondes sur le 10 à 80 %, selon les données fournies par Smart.

### Un exploit… conditionnel

En France, la majorité des bornes haute puissance plafonnent encore à 300 ou 350 kW, et il est rare qu’elles permettent à un véhicule d’atteindre un tel pic sans partage de puissance.

Le pic théorique de **426 kW** reste encore à être observé sur des bornes françaises. Il semble que l’arrivée de nouvelles stations Electra ou Ionity (capables de monter à **600 kW**) soit nécessaire pour voir ces chiffres devenir plus fréquents. Toutefois, la courbe de recharge de la Smart #5 demeure impressionnante.

Il est également essentiel de noter que cette performance ne découle pas du hasard. Elle résulte d’une confluence de facteurs. Pour atteindre ces puissances élevées, la batterie doit être préchauffée, à une température idéale comprise entre 25 et 30 °C.

Dans mon cas, les kilomètres parcourus sur autoroute avaient permis de chauffer la batterie. Sinon, le préconditionnement de la batterie (la réchauffer) doit être effectué plusieurs dizaines de minutes avant la recharge, surtout en hiver.

### Un bridage sur les Superchargeurs Tesla

Un point à retenir est la compatibilité avec les Superchargeurs Tesla, qui sont limités à 400 volts. La Smart #5 est compatible avec ce réseau, mais limitée à **80 kW** sur ces stations.

La cause de cela réside dans une incompatibilité de tension : les Superchargeurs V2 et V3 fonctionnent principalement à 400 volts, obligeant les véhicules de 800 volts comme la Smart à utiliser un convertisseur interne, ce qui limite la puissance.

Ainsi, là où une borne Ionity peut fournir jusqu’à 350 kW dans de bonnes conditions, les Superchargeurs agissent comme de véritables goulots d’étranglement, rendant le passage de 10 à 80 % d’une Smart #5 réalisable en environ une heure.

### Une promesse tenue, mais pas universelle

Cela dit, faut-il croire que tous les modèles de Smart #5 vendus atteindront ces temps de recharge ? Non. La version d’entrée de gamme, nommée Pro, est conçue avec une architecture de 400 volts, équipée d’une batterie LFP de 74,4 kWh utiles, et se limite à une puissance de charge DC de 150 kW maximum.

Même pour les modèles 800 volts, divers facteurs tels qu’une batterie froide, une borne capricieuse ou une file d’attente peuvent allonger le temps de recharge. Les performances observées ne sont pas impossibles à reproduire, mais elles nécessitent des conditions favorables.

Lors de mon trajet Paris – Bordeaux le vendredi 1er août, une station Ionity sur l’A10 était pleine, tandis que la station suivante, située à environ 30 km, était presque vide. Il est donc conseillé de vérifier les applications ou le GPS de la voiture pour évaluer l’état des stations et faire le choix judicieux.

En conclusion, la Smart #5 dépasse ses promesses, au moins pour le marché européen. Elle démontre qu’une recharge rapide, comparable à un plein de carburant, est désormais accessible, du moins pendant la durée d’un arrêt.

Quatorze minutes suffisent à peine pour faire une pause toilettes et se prendre un café. C’est exactement ce que l’on attend d’une voiture électrique pour les longs trajets : efficacité, sans trop y penser.

Avec son autonomie appréciable, il est possible d’enchaîner facilement plus de trois heures d’autoroute avant de nécessiter une pause de 15 minutes, un délai suffisant pour les gros rouleurs. Les points forts et points faibles de ce véhicule seront détaillés dans un autre article, mais c’est indéniablement une excellente voiture électrique, comme l’atteste notre essai complet.

Néanmoins, la Xpeng G6 restylée, qui arrive en France dans quelques semaines, pourrait bien lui faire de l’ombre avec une recharge encore plus rapide, à condition de dénicher la bonne borne, son pic de puissance étant annoncé à 451 kW.