France

Procès du Dr Péchier : un geste choque sa collègue anesthésiste

Une ex-collègue du docteur Frédéric Péchier a témoigné sur une intervention pratiquée le 11 janvier 2017, lors de laquelle une patiente, Sandra Simard, a été empoisonnée avec du potassium. Frédéric Péchier est jugé par la cour d’assises du Doubs pour 30 empoisonnements de patients entre 2008 et 2017, dont 12 sont morts.


Une ex-collègue du docteur Frédéric Péchier, actuellement jugé pour des empoisonnements devant la cour d’assises du Doubs, a exprimé mercredi son choc concernant un incident survenu le 11 janvier 2017 impliquant l’anesthésiste.

L’anesthésiste Anne-Sophie Balon a raconté la journée où sa patiente, Sandra Simard, âgée de 36 ans, a été victime d’une intoxication au potassium, administré dans une poche de soluté de réhydratation. Alors qu’elle était sous anesthésie pour une opération, la patiente a subi un arrêt cardiaque. Le Dr Balon a été appelée d’urgence et a commencé à réaliser un massage cardiaque.

Le Dr Péchier est arrivé dans la salle « avant même le cardiologue de garde ». Il a administré « du gluconate de calcium » sans concertation. « Il ne m’en parle pas. Et il repart », se souvient-elle. Le gluconate de calcium n’est pas un antidote pour une hyperkaliémie, mais permet au cœur de mieux supporter un excès de potassium. « J’ai été choquée par le timing » de son arrivée, par « l’administration précoce » du gluconate de calcium et par « le fait qu’une hyperkaliémie » était envisagée alors qu’il n’y avait « pas le contexte pour ».

Pour la défense, Randall Schwerdorffer a fait remarquer que « quand il y a de l’agitation dans un bloc, il est courant qu’on vienne prêter main-forte ». « C’est vrai », a admis l’anesthésiste. Cependant, elle a précisé qu’il n’était pas habituel d’administrer quelque chose à un patient sans en discuter avec son médecin, ni d’échanger des informations essentielles pour « comprendre ce qui se passe ».

Sandra Simard a survécu. Anne-Sophie Balon a fait saisir et analyser les poches de perfusion utilisées pour l’anesthésie, dans lesquelles une dose de potassium 100 fois supérieure à la normale a été trouvée. Au sein de la clinique, « on avait identifié que ça pouvait être lui », a confié la médecin à la cour, en affirmant avoir été « grandement soulagée » lors de son interpellation. Elle n’avait « jamais » été confrontée à d’autres arrêts cardiaques, ni avant ni après celui de Sandra Simard.

L’avocate générale, Christine de Curraize, a fait remarquer que le Dr Péchier, qui avait « le statut de leader » à la clinique, était peut-être « déstabilisé » par l’arrivée d’une nouvelle génération d’anesthésistes. Lors de l’instruction, Frédéric Péchier avait accusé sa collègue d’avoir injecté le potassium a posteriori pour dissimuler une erreur médicale. « Et Mme Simard, son arrêt cardiaque, il est dû à quoi ? On n’a rien trouvé. C’est rocambolesque, ça ne tient pas ! », a répliqué Anne-Sophie Balon.

L’accusé, qui a toujours nié les accusations, comparaît libre et encourt une peine de réclusion criminelle à perpétuité. Il est jugé pour 30 empoisonnements de patients, dont 12 mortels, entre 2008 et 2017 dans deux cliniques de Besançon. Le verdict est attendu le 19 décembre.