Djihad : La France rapatrie 10 enfants et 3 femmes syriennes
La France a rapatrié tôt mardi matin dix enfants et trois femmes âgées de 18 à 34 ans qui étaient détenus dans les camps de prisonniers djihadistes dans le nord-est de la Syrie. Paris refuse de rapatrier des enfants tant que leurs mères n’ont pas donné leur accord, et refuse aujourd’hui leur retour alors qu’ils sont devenus majeurs.
Une première en deux ans. La France a rapatrié tôt mardi matin dix enfants et trois femmes âgées de 18 à 34 ans qui se trouvaient dans des camps de prisonniers djihadistes dans le nord-est de la Syrie.
Parmi les femmes adultes, « deux ont été placées en garde à vue, sur commission rogatoire du juge d’instruction », a annoncé le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué mardi.
### Enfants pris en charge
« Une autre femme, faisant l’objet d’un mandat d’arrêt, sera présentée à un juge d’instruction dans la journée » en vue d’une possible mise en examen, a-t-il ajouté.
« Les mineurs sont pris en charge dans le cadre de procédures d’assistance éducative sous la responsabilité du parquet après le tribunal judiciaire de Versailles », a indiqué le Pnat, qui « assurera le suivi centralisé des mineurs concernés, en lien avec les parquets territoriaux ».
### Question toujours sensible en France
« La France remercie les autorités syriennes de transition ainsi que l’administration locale du Nord-Est syrien qui a rendu possible cette opération », a déclaré le porte-parole du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.
Cette opération est un premier depuis juillet 2023 en France, où ces retours demeurent une question délicate, dix ans après la vague d’attentats djihadistes sur le territoire national.
### « Immense et indescriptible soulagement » des familles
La France a effectué plusieurs opérations de rapatriement de femmes et d’enfants de Syrie depuis 2019, avant de les interrompre à l’été 2023, en raison d’un manque de volontaires selon les autorités. Ce, malgré des condamnations internationales, dont celle de la Cour européenne des droits de l’homme en 2022. Paris refusait de se rendre sur place, invoquant la dangerosité des opérations.
« Pour les familles qui attendaient leurs petits-enfants, neveux et nièces depuis plus de six ans, c’est un immense et indescriptible soulagement », a déclaré l’avocate des femmes rapatriées, Marie Dosé, dans un communiqué transmis à l’AFP.
### Quelque 120 enfants et une cinquantaine de femmes dans les camps
Cependant, « la France laisse derrière elle 110 autres enfants français, toujours détenus dans le camp Roj », l’un des camps contrôlés, comme d’autres centres et prisons, par les forces kurdes depuis plus de six ans, dénonce-t-elle.
Des dizaines de milliers de personnes, d’une cinquantaine de nationalités et soupçonnées de liens avec l’organisation djihadiste État islamique, sont retenues dans ces camps.
En juin, environ 120 enfants et une cinquantaine de femmes françaises y étaient encore retenus, selon le Collectif des Familles unies, qui regroupe leurs proches.
Après ce rapatriement nocturne, ce collectif a rediffusé sur X mardi matin son message habituel dénonçant la détention d’enfants « coupables de rien » dans « des conditions indignes ».
Car pour ces familles, rien n’est encore réglé. « Une nouvelle fois, la France fait le choix de l’arbitraire », regrette Marie Dosé. « La France, qui refusait de rapatrier des enfants tant que leurs mères n’avaient pas donné leur accord, refuse aujourd’hui leur retour alors qu’ils sont devenus majeurs. Ce faisant et plus que jamais, la France décide donc de faire payer à ces enfants le choix de leurs parents », estime-t-elle.
### Camps du nord-est de la Syrie vidés d’ici la fin de l’année
Elle dénonce également le sort de femmes sans enfant ou dont les enfants sont décédés, et que la France refuse désormais de rapatrier, ainsi que d’enfants nés en France et « conduits de force en Syrie » avant d’acquérir la nationalité, ou de jeunes majeurs enfermés dans d’autres lieux de détention syriens.
Pour Matthieu Bagard, responsable du pôle expertise Syrie de l’ONG Avocats sans frontières France, « ce rapatriement démontre une nouvelle fois que la France a la possibilité d’organiser ces opérations ». Mais il déplore également la situation des femmes et des jeunes majeurs toujours « illégalement détenus ».
En février, l’administration kurde a annoncé, en coordination avec l’ONU, son intention de vider d’ici fin 2025 les camps du nord-est de la Syrie des déplacés syriens et irakiens, y compris les proches présumés de djihadistes.

