« Il y a eu débat » : l’album posthume de Nino Vella, 31 ans.
Nino Vella est mort le 1er juillet 2024 à l’âge de 31 ans d’une pathologie cardiaque dont il n’avait pas connaissance. L’album posthume Plage des bigorneaux a été publié ce vendredi et révèle le travail de l’artiste sur son premier album solo.
Le 1er juillet 2024, Nino Vella est décédé dans son sommeil, victime d’une maladie cardiaque inconnue. Agé de 31 ans, il faisait partie du duo Rouquine et avait composé et produit des titres pour des artistes tels qu’Yseult, Eddy de Pretto, Patrick Bruel et Lord Esperanza, entre autres. À sa mort, il travaillait sur son premier album solo, un projet qui le passionnait et qu’il dédie aujourd’hui au public avec la sortie de l’album posthume *Plage des bigorneaux*.
La sortie de cet album a fait l’objet de discussions. « Il y a eu débat, explique son frère Renaud, à *20 Minutes*. Parmi ses parents, proches collaborateurs et amis, beaucoup pensaient que c’était la chose à faire. Il ne parlait que de ça, lui qui avait tant écrit pour les autres avait hâte de concrétiser cet album solo. Mais certains se demandaient si on ne risquait pas de trahir ce qu’il envisageait réellement, car il était perfectionniste et aucun des titres qu’il avait conçus n’était finalisé. »
Arthur Sachel, son manager, faisait partie des sceptiques. « Pour moi, l’histoire s’arrêtait avec son départ. Je me disais qu’on ne pourrait pas aboutir à ce qu’il espérait. J’étais sous la sidération de la brutalité de sa disparition, confie-t-il. Et puis le temps a fait son œuvre et a permis d’accepter l’idée qu’on ne pourrait pas faire tout ce qu’il avait en tête mais qu’il y avait une matière magnifique qui méritait d’être entendue. »
À la Toussaint, son entourage s’est réuni pour écouter la vingtaine de maquettes qu’il avait laissées. « On a tout écouté et l’évidence de faire un album s’est imposée. Restait alors à décider de la forme. Il y avait plusieurs morceaux aboutis et écoutables tels quels. Même si on savait que sur telle chanson il voulait accélérer le flow de son rap ou changer quatre mots à telle autre », raconte Renaud Vella. Certaines maquettes étaient inachevées. « On en a gardé une [*Mélanco-fenêtre*] comme témoin de ce travail en cours, poursuit son frère. Pour *Barcelone*, on disposait seulement d’un couplet et d’un refrain, mais on savait ce qu’il voulait dire. On a donc invité deux de ses amis chanteurs à la compléter et à l’enregistrer. »
*Plage des bigorneaux* commence par une note vocale de Nino Vella, exprimant son enthousiasme et son implication dans ce projet. « Je réécoute les maquettes […], j’ai l’impression qu’il faut que je fasse plein de nouveaux trucs, ça me paraît être un chantieeeeeer ! », déclare-t-il. « Ouvrir le disque ainsi était la meilleure manière de souligner que le point final a été impossible à mettre. Même lui aurait eu le doute jusqu’au bout. Il lui manquait deux mois pour tout finir », estime Arthur Sachel.
Sur la chanson *Contre temps*, c’est Renaud Vella qui met en mots une mélodie de Nino : « J’ai très vite vu que ce n’était pas un garçon ordinaire dans les yeux des autres. Mais, pour moi, c’était juste mon petit frère, celui que j’ai toujours protégé et qui m’a tout donné, lui qui pouvait se marrer pour un oui et pleurer pour un non. Ma petite éponge. » « C’est en partie le texte que j’ai lu lors de ses funérailles, précise-t-il à *20 Minutes*. Pour les autres, que je m’exprime sur ce morceau paraissait la manière la plus simple d’expliquer en quoi cet album est un hommage. »
Les paroles de *Contre temps* forment en effet une sorte de manifeste intime narratif. « J’ai plus tes câlins alors je m’enveloppe de ta musique et maintenant on la partage à ton public », confie Renaud Vella. Il ajoute : « Que le disque sorte semble faire du bien aux gens de son entourage ; c’est une autre étape dans notre deuil. »
« Durant les six mois qui ont suivi son décès, je me suis consacré à l’administratif, aux droits de succession. Les six suivants, je me suis focalisé sur la préparation de cet album. Et maintenant, je vais entamer ce travail de mémoire », raconte son manager. « C’est paradoxal car c’est un acte généreux de mettre cette matière à disposition du public. Mais c’est aussi égoïste parce qu’avec ce disque, je sais que je pourrais me blottir contre cette musique quand et où je le veux. »
La chanson *Plage des bigorneaux* a été choisie pour titrer l’album, préférée à *Pas Peur*. « Il aimait les intitulés random. Cela dégageait une poésie naturelle », affirme Arthur Sachel. « C’est un titre absurde qui reflète son humour habituel, confirme Renaud Vella. C’est aussi le morceau sur lequel il avait le plus travaillé. Il en avait fait quatorze versions. »
Pour son grand frère, cet album « permet de faire exister encore » Nino, qui pour ceux qui l’ont connu « incarnait la vitalité, l’enthousiasme et l’avenir ». Cette pulsion de vie se ressent à travers chacune des chansons, y compris les plus mélancoliques, et rend l’écoute à la fois déchirante et enrichissante.

